GustavedeBeaumont a écrit :
Il ne s'agit donc pas "d'exemptions" financières mais de la prise en charge des investissements de la milice par la Couronne britannique, ce qui est bien normal, et conforme à ce qui se fait en métropole
Ce n'est absolument pas "normal" puisque traditionnellement ces propriétaires-colons devaient s'armer et se défendre seuls contre les Amérindiens et les Français (guerres de succession d'Espagne et d'Autriche), sans pratiquement recevoir aucune aide de Londres et certainement pas d'être payés pour cela. C'est pour cette raison qu'ils ne payaient pratiquement pas d'impôts directs, mais devaient tout de même verser des subsides à la Couronne et c'est aussi pour cette raison que la métropole les laissait s'organiser politiquement de manière autonome. On comprend ainsi le courroux de ces colons à qui on demandait de payer des taxes pour rembourser l'endettement de la Couronne, alors qu'eux avaient toujours dû se débrouiller seuls.
Or, là, non seulement tout est financé par Londres, mais en plus Pitt ne demande aucune participation financière aux colons, mieux encore les combattants "coloniaux" sont payés par le gouvernement de sa Majesté - ce qui n'existait pas jusqu'alors.
GustavedeBeaumont a écrit :
Le Congrès d'Albany que vous mentionnez a largement échoué
Ce n'est pas ce que les modernistes retiennent de ce fait. Que trop peu d'Amérindiens se soient finalement ralliés (les Iroquois tout de même) aux colons britanniques ou que tous les représentants des 13 colonies ne partageaient pas les mêmes vues n'est pas ce qui est retenu, mais bien que pour la fois première de son histoire cette colonie a réussi à s'exprimer collectivement à cette occasion dans les préparatifs d'une guerre contre les Français, sans que Londres ne soit véritablement "derrière", et que la plupart de ses participants furent parmi les (plus vieux) signataires de la
Déclaration d'Indépendance de 1776 et parmi les principaux chefs de la rébellion contre Londres.
C'est en cela que la tenue de ce Congrès fut retenue comme étant aussi novatrice que fondatrice, davantage à moyen terme qu'à court terme.
GustavedeBeaumont a écrit :
Personne ne voulait s'engager pour la paie minable proposée, et le coeur n'y était pas. Il fallait user de la menace de la conscription, et engager des hommes tout droit venus des prisons
Forcément, ce ne fut pas une guerre de défense contre un envahisseur franco-amérindien qui brulait vos terres, mais bien une guerre de conquête. Il fallait donc motiver ces hommes pour qu'ils s'engagent, alors que le feu n'était pas près de leurs maisons.
Même si les subsides offerts étaient faibles, il n'en demeure pas moins que de nombreux colons s'engagèrent et même si ces miliciens anglais se révélèrent médiocres sur le théâtre des opérations, peu courageux et hardis, ils n'offrent pas moins un poids numérique conséquent - c'est également pour cette raison que le Congrès d'Albany a loin d'être un échec puisqu'il démontra aux yeux de tous la capacité de ses colons de s'organiser et de s'administrer, ce qui n'était pas le cas chez les Français, où les représentants de Louis XV dans les colonies nord-américaines ne cessèrent de se mettre des "bâtons dans les roues", privilégiant leur carrière personnelle (sauf Montcalm et Bougainville) au sort des colons français et canadiens, demandant à ces derniers rarement leurs avis.
Il faut tout de même rappeler qu'aux 90 000 habitants de la gigantesque "Nouvelle France", il y avait près de 2 millions d'habitants opposés dans les 13 colonies anglaises. Alors même si cette indemnité parait faible - qui n'existait naturellement pas chez les miliciens canadiens obligés de défendre terres et maisons - on ne peut pas dire pour autant qu'elle fut sans effet dans les enrôlements volontaires.
GustavedeBeaumont a écrit :
Lorsqu'il s'agira pour Washington de recruter des hommes contre la couronne britannique, ce sera une tout autre histoire!
Comparaison n'est pas raison !
Il semble normal que lorsqu'on vous assomme de taxes de toutes sortes, vous n'acceptiez pas cette situation, encore moins lorsque des tuniques rouges sont envoyées pour vous mater par la force. C'est essentiellement lorsque le sang des colons coula à Lexington ou Concord en 1775, que Washington et les "patriotes" trouvèrent davantage de volontaires pour combattre l'armée anglaise car, auparavant, leurs forces n'atteignaient même pas 3000 hommes et étaient considérées, à juste titre, comme totalement inopérantes face à une armée de professionnels (leurs armes étaient cependant craintes).
A noter que la plupart de ces "miliciens" étaient les mêmes qui avaient fait la guerre contre les Français et les Amérindiens la décennie précédente.
Une anecdote pour finir : Washington, alors lieutenant-colonel dans la milice, fut obligé de se rendre aux Français en juillet 1754, après sa pitoyable expédition visant à harceler les franco-canadiens, encerclé dans le fort Necessity. Il reste à ce jour le seul président des Etats-Unis à avoir capitulé devant l'ennemi.
On dit que cet "exploit" des miliciens fit rire jusqu'à la Cour de Londres. Il illustre bien la faible estime dans laquelle étaient tenus les colons en Europe. Cette condescendance orgueilleuse et vaniteuse fera le lit de la défaite anglaise à la fin de la décennie 1770.