De Gaulle n'aimait pas ce discours. il l'avait improvisé dans le feu de l'action (quelle journée !) et ne le trouvait pas à la hauteur.
(Au passage il a fait attendre les représentants de la Résistance à l'Hôtel de Ville toute la journée, pour qu'il soit bien clair qu'ils n'allaient pas prendre un rôle dirigeant. De même pour cette idée de "rétablir la République" : Quoi ? Valider ainsi la parenthèse Vichy ? Ces résistants se laissaient emporter par le romantisme révolutionnaire ! L'un d'eux dira :"Il avait certainement raison, mais ça nous aurait fait tant plaisir !")
Aujourd'hui, le "Paris outragé" fait sourire mes gamins, qui l'ont entendu rabâché chaque fois qu'est évoquée à la télé la libération de Paris ou même de la France, et que cette répétition exaspère. C'est devenu un marronnier médiatique, le discours de De Gaulle qu'on entend le plus souvent.
Hé bien pour moi je le trouve très bien, en particulier dans son début, qui n'est jamais cité, et c'est un tort, c'est la meilleure partie :
Citer :
Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l'émotion qui nous étreint tous, hommes et femmes, qui sommes ici, chez nous, dans Paris debout pour se libérer et qui a su le faire de ses mains.
Non ! nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes qui dépassent chacune de nos pauvres vies.
Paris ! Paris outragé...
J'aime ce début parce qu'on y sent la vraie fraternité de ce soir-là (tous ensemble / chez nous) et pour cette phrase magnifique que seul De Gaulle était capable d'improviser, et qui le met au même niveau que chaque participant présent, jusqu'au plus simple des FFI : "Il y a là des minutes qui dépassent chacune de nos pauvres vies."
Le "Paris outragé" me fait sourire : quatre ans après, il n'a toujours pas digéré ce "Paris ville ouverte" de juin 40, qu'il aurait aimé, lui, voir défendu.
La suite est de bonne tenue : on reste dans l'idée de départ, mais il souligne cette fois que c'est la France qui rentre chez elle.
Citer :
Eh bien ! puisque l'ennemi qui tenait Paris a capitulé dans nos mains, la France rentre à Paris, chez elle. Elle y rentre sanglante, mais bien résolue. Elle y rentre, éclairée par l'immense leçon, mais plus certaine que jamais, de ses devoirs et de ses droits.
Il ne le dit pas, mais c'est en filigrane : depuis juin 40, quel chemin parcouru ! Et comme il revient de loin !
Non vraiment, il est très bien, ce discours !
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