Barbetorte a écrit :
L’insurrection parisienne avait imposé sa volonté à l’ensemble du pays en 1789, en 1793, en 1830 et en 1848. En 1871 elle n’y est pas parvenue.
Lorsque l'insurrection du 18 mars 1871 éclate à Paris, la nouvelle parvient vite dans le reste de la France grâce au télégraphe. Les communications ne sont d'ailleurs nullement interrompues entre Paris et la province, les autorités cherchant à rallier à leur cause les municipalités et l'opinion des grandes villes.
Et si les responsables municipaux de Lyon ou Marseille sont largement favorables à la Commune, ils sont réticents à l'idée de s'engager matériellement à ses côtés. La loi municipale du 14 avril, décidée par Versailles, ôte pourtant aux villes de plus de 20 000 habitants le droit de choisir leur maire et menace donc directement les municipalités radicales. Mais celles-ci restent modérées.
Les facteurs de cette modération sont multiples : la crainte d'une « guerre fratricide » pointée par les conseils municipaux bordelais ou lyonnais, la peur d'aggraver les « malheurs de la patrie » deux mois après la signature de l'armistice avec la Prusse, l'état désastreux des finances municipales, déterminent largement l'absence d'engagement concret en faveur de la Commune.
Les grandes villes cherchent en revanche à se poser comme médiatrices entre Paris et Versailles. Elles souhaitent pour cela réunir un congrès en mai, initialement prévu à Bordeaux puis interdit et néanmoins tenu à Lyon, dont la municipalité ne craint pas de braver les consignes de Versailles. Réuni le 13 mai, le congrès envoie ses représentants à Paris, où ils sont reçus à la fois par les autorités versaillaises et par celles de la Commune le 20 mai. Cette tentative de médiation révèle l'existence d'un « tiers-parti », hommes de province désireux de se placer entre Paris et Versailles pour trouver un terrain d'entente. Elle échoue cependant : le lendemain des entrevues entre les délégués de province et les différentes autorités, le gouvernement versaillais lance l'assaut contre Paris qui marque le début de la Semaine sanglante.
Comment expliquer cette relative faiblesse des mouvements communaux provinciaux au moment de la Commune de Paris ? L'une des clés réside dans le décalage chronologique entre la capitale et le reste de la France : alors que les tentatives révolutionnaires se sont enchaînées dans le Sud depuis l'été 1870, une partie du personnel insurrectionnel disponible à Lyon comme à Marseille est éliminé au printemps 1871, emprisonné ou en exil. « La révolution parisienne est partie trop tard, ses arrières sont découverts, voilà son drame » (Jeanne Gaillard).