A saluer la très bonne initiative de Gallimard, qui à travers la collection La Pléiade, publie l'ensemble des manuscrits de Nag Hammadi, moins connus que ceux de la mer Morte et pourtant essentiels dans la compréhension de l'environnement idéologique des débuts du christianisme.
Au-delà, ils sont surtout un magnifique terrain de reflexion sur les angoisses existentielles de l'humain, au carrefour des diverses croyances de l'époque, plus tout à fait antiques, pas encore médiévales. Des hommes et des femmes, durant les premiers siècles de notre ère ont cherché des réponses à leurs questions : l'avant ici, le pourquoi, l'après. Ils ont répondu en construisant un en haut peuplé d'intermédiaires entre les hommes et les dieux. Je dis bien les dieux, car les gnostiques croient généralement à deux dieux : l'un bon, mais qui se désintéresse de la création (on n'est pas loin des épicuriens) et un mauvais, qui a créé ce dans quoi nous évoluons (c'est une sorte de manichéisme); par là, ils entendaient expliquer le pourquoi de ce qu'ils jugeaient comme être des aberrations (la défécation, le besoin de manger de la viande et donc de faire du vivant avec du mort, les menstruations, la souffrance, l'injustice etc.). Les gnostiques sont indubitablement des révoltés. Certains iront très loin dans leurs pratiques, notamment au niveau sexuel, faisant fi de nombreux tabous.
Bien sûr, on ne peut résumer en quelques lignes ce qu'ils ont été (et qu'ils continuent d'être : nos sectes actuelles sont un curieux echo, en plus mercantile et peut-être en plus manipulateur, de ces gnostiques), dans la mesure où il n'y a pas Une Gnose, car c'est loin d'être un mouvement homogène; mais ils sont passionnants, on devine une spontanéité dans la croyance que trahira le christianisme codifié des conciles. On trouve d'ailleurs dans les écrits gnostiques des documents écartés du canon biblique, notamment le fameux Evangile selon Thomas. Plus de renseignement là :
http://www.gallimard.fr/catalog/html/actu/index/index_gnose.html
Pour une première approche moins coûteuse, il y a l'étude synthétique de Jacques Lacarrière intitulée "Les Gnostiques" ou la vision littéraire de Flaubert à travers son "La tentation de Saint Antoine" (chez Folio, l'édition comporte un utile lexique des diverses sectes gnostiques). Pour ceux qui chercheraient à se renseigner sur le web, il y a un "dictionnaire des gnostiques" qui traine, je ne l'ai que parcouru, mais il mentionne à plusieurs reprises des personnages contemporains ou plus anciens ayant soi-disant fait partie du prieuré de Sion, ce qui fait que j'ai de gros doute quant au sérieux des sources de ce travail...
Hervé.