Jean R a écrit :
le bonhomme est quand même bizarre et je n'ai pas pu contrôler
Il n'empêche que vous le sortez à toutes les sauces ... un peu de sérieux et changez de référence !!!
Pour ceux qui sont intéressés :
C’est un « Roman » et à ce titre doit être considéré comme un roman … les personnages (Pierre et consort) sont des figurines construites pour les besoins de la cause … on trouve entre autre … Pierre qui est quasiment un philosophe (doublé d’un thaumaturge) et qui est le véritable « apôtre des nations » en lieu et place de Paul … de plus il est le seul dépositaire des révélations de Jésus … a contrario Paul est qualifié « d’homme ennemi ».
La figure de Simon est aussi « intéressante » c’est avant tout un magicien qui en plus prétend être le Christ, le Fils de Dieu … il se donne le titre de « Celui qui se tient debout » c-à-d « Immuable » … c’est, ici, le rival de Jésus.
Bref …
L’attribution de ce corpus littéraire à Clément de Rome qui est un personnage historique de la fin du I siècle dont la tradition, via Irénée de Lyon, fait de lui le troisième successeur de Pierre … qui semble être l’auteur d’une Epitre aux Corinthiens (vers l’an 96) … une tradition incertaine identifiait le Clément, disciple de Paul que l’on trouve dans le texte canonique de L’Epitre aux Philippines en (4,3), avec notre Clément de Rome faisant ainsi de ce dernier un quasi contemporain de l’époque apostolique et donc un témoin de l’enseignement de Apôtres … c’est à cette tradition que se rattache notre Roman … dans laquelle Clément devient disciple de Pierre … justifiant ainsi le classement de ce roman dans les apocryphes chrétiens anciens.
L’attribution donc de ce Roman à Clément de Rome lui donnait une « autorité » certaine … mais d’une part cela n’est pas prouvé, bien au contraire, et d’autre part cela ne mettait pas ce corpus romanesque à l’abri de variations/retouches et autres aléas de transmission … n’étant pas classé dans le registre des textes canoniques.
Il en existe deux formes … sans trop rentrer dans des considérations historiques/critiques entre ces deux formes de récits.
D’une part les Homélies en grec réparties en 20 livres précédées de 3 textes liminaires … qui tentent d’en assurer la fixation et la transmission fidèles
D’autre part les Reconnaissances réparties en 10 livres … texte latin traduit du grec par Rufin au début du Vième siècle … mais même Rafin précise qu’il avait deux copies non-conformes entre elles en certains passages.
En analysant ces deux formes d’écrit il ressort qu’il sont issus d’un « Ecrit de base » qui serait un premier ensemble littéraire … et à partit duquel ont travaillé des auteurs inconnus donnant par la suite les Homélies et les Reconnaissances … cet « Ecrit de base » serait l’œuvre de juifs chrétiens qui mènent une réflexion d’ensemble … sur leur Judaïsme, leur adhésion à la Foi en Jésus et leur rapport avec les païens.
Datation :
C’est Eusèbe de Césarée qui en parle le premier des Homélies dans Hist-Ecclé (3,38,5) dont la date de rédaction est avant 325 … cette date serait donc le terminus ad quem de composition.
Pour les Reconnaissances le plus ancien témoin est de Basile de Césarée mort en 379 dans une citation … leur composition est donc antérieure à cette date … mais c’est la traduction latine de Ruffin d’Aquilée en 406 qui détermine le terminus ad quem.
La datation la plus importante celle de « l’Ecrit de base » est plus difficile a préciser … le terminus a quo peut être fixé après 222 … date de la mort de Bardesane dont l’ouvrage « Livre des Lois des pays » est largement cité dans les Reconnaissances … le terminus ad quem se situe bien avant 325 … date extrême de composition des Homélies.
Le nombre de manuscrits connus (Homélies et reconnaissances) ont manifestement connu une fortune très différentes … l’intérêt manifesté pour les deux formes tient à trois raisons principales :
1) d’une part l’identification du Clément du Roman avec Clément de Rome … manifeste le désir de connaître sa vie, l’autorité que lui donne son compagnonnage avec Pierre et la succession directe qu’il reçoit … en un temps où chaque siège épiscopal se réclame d’une tradition apostolique.
2) les informations que fournirait le Roman sur la vie communautaire de l’époque apostolique : catéchèse, baptême, installation des anciens et des évêques.
3) enfin l’accès qu’on pensait avoir à l’enseignement de Pierre … d’autant plus attirante qu’il est présenté comme un enseignement ésotérique ... il est aussi possible que la doctrine du « vrai Prophète » rejetée par l’Eglise … ait survécu dans qcq petits groupes aux marges orientales du monde chrétien … jusqu’au jour où on la vit reprise par l’Islam.
Extraits de : Pierre Geoltrain, « Ecrits apocryohes chrétiens – Tome II », collection : La Pléiade.
Cordialement, Epsilon