Sigmund a écrit :
Ok Marie-Laetitia. Mais justement, J.Garrisson dirait certainement la même chose. C'est quand même une historienne, protestante, mais reconnue par l'institution. Je ne suis pas spécialiste, mais pourriez-vous me donner des exemples de travaux où elle "abuse" un peu?
Être universitaire ne constitue pas un label rouge qualité optimale...
ça fait disons, un premier tri.
Je ne crois pas que dans le domaine de la religion, beaucoup d'historiens professionnels ou en tout cas bien formés et reconnus par leurs pairs, commettent de grosses bourdes. C'est en revanche le cas dans d'autres domaines où la vieille culture machiste européenne s'est exprimée à loisir: comme lorsqu'il s'agissait de traiter du rôle des femmes dans l'histoire (ouvrez Michelet, ou plus précisément les biographies des reines de France jusqu'aux années 60)... Mais ce n'est pas le sujet.
Donc je perçois ces écarts comme des fautes presque imperceptibles aux yeux du grand nombre. Exemple avec J. Garrisson : prenez ses publications où elle parle de l'édit de Nantes, et de sa révocation (tout ce que j'ai sous la main, c'est un article de la revue l'histoire(Janine Garrisson, Enquête sur une révocation, paru dans Les Collections de L'Histoire n°17 - 10/2002), si de généreux donateurs veulent bien m'aider à constituer la bibliothèque de mes rêves, je prends tout don en CB, espèces ou livres
) où comme dans d'autres publications, pour prendre un cas très précis, elle ne définit pas le mot tolérance au 16e siècle.
Or surtout dans une revue grand public, il est absolument essentiel de préciser le sens du mot tolérance, qui au 16e s. ne correspond pas avec notre tolérance d'aujourd'hui. Avec cet article, je reste sur ma faim : on voit les excès dans la camp catholique, idem dans le camp protestant. Mais par Zeus ! C'est une historienne des années 60, 70, 80, alors qui d'une histoire plus subtile des "mentalités"comme on disait alors, images construites, représentations réciproques, provocations des deux côtés et en tout genre qui sont à l'origine de l'exacerbation des deux camps?
Avec l'ouvrage de Michel GRANDJEAN et Bernard ROUSSEL (dir.), Coexister dans l’intolérance : l’Édit de Nantes (1598), Genève, Labor et Fides, 1998,544 p. dont vous trouverez le compte-rendu ci-dessous (CR à consulter sinon sur le site du CAIRN), là ma faim est satisfaite :
Citer :
L’esprit de ce livre est donné par M. Grandjean qui constate : « S’il est un concept que l’amalgame collectif associe volontiers à l’édit de Nantes, c’est bien celui de la tolérance. [...] Or, rien n’autorise à lire son édit comme un texte fondateur de la tolérance religieuse. [...] Les analyses recueillies dans ce volume montrent que l’édit de Nantes est l’aboutissement d’un long processus social, politique, culturel et religieux, et qu’il énonce des règles pragmatiques non pas de tolérance mais de maîtrise de l’intolérance religieuse par le politique ».
http://tinyurl.com/6xsbr5Accessoirement, ça me gêne quand un historien connu pour ses convictions religieuses fait de sa religion son sujet de recherche principal, sans jamais vraiment en sortir. Faire de l'histoire c'est comprendre. Je dis souvent pour blaguer que les gens comme moi m'ennuient. Donc je crois que même si l'on peut sans aucun problème parler de la religion que l'on professe, exactement au même titre que des autres religions, ne parler que de ça, eh bien ça m'embête.
Je fais une comparaison avec mes propres difficultés : j'ai commencé par faire de l'histoire du genre. Or je me suis rendue compte que je ne pouvais pas continuer, tant que je continuerai à réagir à cause de mon passé familial, où une forme de "machisme" (ce n'est pas le mot parfait mais bon...) parfaitement ancré dans les traditions culturelles françaises, était omniprésent.
Par prudence, sachant que je ne saurai pas pour l'instant gérer mon besoin de revanche, qui me faisait aller trop loin dans mes interprétations, je me suis tournée vers un autre problème, lié à mon histoire, qui me fascine (l'histoire économique et culturelle) mais pour lequel je ne pense avoir de problème de parti pris.