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Duc de Raguse a écrit :
C'est un ensemble de leviers qui ne sont plus utilisés par les gouvernements français...
Pour la chose politique, votre analyse est certainement plus pertinente que la mienne. J'aurais eu tendance à songer qu'ils n'avaient jamais été très "utilisés".
Il arrive souvent que l'on évoque un point de non retour qui initie -question de survie- de profonds changements. La société s'est ankylosée et la force d'inertie a ajouté à cet état : le tout a créé une sorte de pourrissement où chacun s'essaie à y trouver son compte.
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A l'école de la République ces questions ne devraient même pas se poser.
Et pourtant ces questions ont largement dépassé le stade de se poser puisque la réponse ou l'interrogation qu'elles suscitent laissent les enseignants visiblement démunis.
Mais là encore, s'il faut enseigner aux enseignants, vous avouerez... ces enseignants font partie de nos élites, ils savent le rappeler.
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Je passe sur la gestion politique des différentes vagues migratoires de la seconde moitié du XXème siècle, entrainant une ségrégation socio-spatiale honteuse pour un pays comme le nôtre, tout comme l'absence de l'Etat dans de nombreux territoires.
Il a fallu faire au plus vite. Ceci allait de parallèle avec une notion de temps qui changeait. Rien n'est bien fait quand le temps n'est pas pris pour construire.
Je comprends la notion de ségrégation socio-spatiale mais il faut y ajouter un choix parfois qui s'inscrit dans une normalité : on se retrouve avec les mêmes aspirations, les mêmes souvenirs, les mêmes coutumes etc. Ceci fut "rassurant" dans un premier temps.
Concernant la culture narcissique, Cyrulnik l'évoque dans un de ses livres et en fait un sujet intéressant visible sur le net.
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Il a laissé en place l'élite blanche et mulâtre et s'est mis à "assister" socialement les descendants des esclaves à titre de compensation morale.
N'ayant pas votre optimisme, je crains/pense qu'une élite noire aurait été tout autant rejetée parce-que faisant de la "politique de blanc", après être allés à l'école des "blancs".
Haïti s'est libéré, a choisi une structure politique, a choisi ses élites : quel est le résultat ? Faut-il penser que ce choix d'une république était mauvais parce-que issu de la "pensée blanche" ? Rien n'est simple.
Je ne pense pas que la paix sociale ait été achetée, il faut des gestes symboliques qui s'inscrivent dans l'instantané. En retour nous avons la même chose. C'est devenu le mode d'expression et la culture.
Comment annoncer un travail qui verra son accomplissement dans la génération future voire plus ? Ceci renvoie chacun à quelque chose de difficile : sa propre fin.
Nous sommes devant le discours -tant raillé- des lendemains qui vont chanter, cependant -je me répète- on veut de l'instantané. La barre est mise dans l'impossible.
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... on évite d'apporter avec soi des aigreurs d'un passé - parfois fantasmé - d'il y a plus de 10 générations. Dans le cas contraire, l'opération est vouée à l'échec dès le départ.
Souvent fantasmé mais là aussi, la force du symbolique est indéniable.
Concernant certains rapprochement européens, je crois que le discours et surtout le besoin -il fut un temps- de se grouper face à un bloc a -là aussi- construit une entente "fantasmée" dans le discours.
Ce que nous nommons dans notre histoire "
Guerre de la Ligue d'Augsbourg" est mieux nommé outre-Rhin à savoir : "
guerre de succession des Orléans". Ce qui est totalement vrai. Nous avons tous des accommodements avec l'histoire.
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Enfin, je ne me sens nullement tributaire de ce que des négriers nantais ou bordelais ont pu faire il y a trois ou quatre siècles. Faudra-t-il, une énième fois, rappeler que ces population étaient déjà esclaves lorsque les Européens les achetaient ou les troquaient ?
Certes mais il faut cependant l'expliciter autrement et cet "autrement" est devenu tellement caricatural que s'en est une contre-vérité, un contresens historique.
Cependant le sujet est bien trop chaud pour que des locuteurs puissent entendre qu'et bien oui, chez eux, il fut un temps, la société était hiérarchisée et que le choix de ceux qui allaient devenir esclaves était bien souvent initié par des personnes de couleur identique.
Cet appel d'air, cette ouverture -dans le déni- permet de se défosser de manière décomplexée : il faut cette soupape faute de mieux. Un "mieux" ne peut que se construire ensemble, faire chacun un pas vers l'autre -en même temps- et un pas consenti, curieux de renouveau.
Là nous en sommes au stade des rustines...