jibe a écrit :
Batiste,
Les travaux de "spécialistes" sont malheureusement souvent illisibles, faute pour eux d'employer la langue de tout le monde et de s'abstraire de cette structure encombrante, de cet "appareil" académique bon pour les publications scientifiques mais pas pour un lecteur lambda : notes, bibliographies (pour des bouquins inaccessibles), références-boomerang. Le tout fait que "l'histoire à la française" reste le domaine de quelques-uns et ne bénéficie d'aucune vulgarisation, perpétuant des notions erronées.
Le vocabulaire technique n'est pas là pour faire le tri parmi les lecteurs mais pour désigner des réalités complexes, parfois spécifiques à la période, qui ne trouvent pas leur équivalent dans le vocabulaire de la vie de tous les jours. Ce n'est pas en simplifiant et en schématisant à outrance que l'on peut faire avancer les choses. Au contraire, ça peut déboucher sur pas mal de confusions. Pareil pour les notes, qui n'ont absolument rien d'encombrant : personne n'oblige à les lire, d'autant plus que les éditeurs ont souvent la fâcheuse tendance de les reléguer en fin d'ouvrage, ce qui rend leur consultation très fastidieuse. C'est malheureux mais parfois j'en viens à devoir les zapper pour ne pas perdre le fil, alors qu'on y trouve souvent des indications précieuses, pas seulement bibliographiques. Dans tous les cas, si le bouquin est bien fait, les notes et références bibliographiques ne sont pas indispensables à sa bonne compréhension par le lecteur. L'accessibilité des bouquins c'est un autre problème. Toujours est-il que quand on fait de la recherche et qu'on tombe sur une affirmation intéressante sans mention de la source utilisée par l'auteur c'est très frustrant, parce qu'on n'a aucun moyen de vérifier sa pertinence sans accomplir une recherche parfois très fastidieuse.
Je ne suis pas sûr de bien vous suivre... Vous affirmez que les bouquins des historiens français sont trop compliqués, que ça a pour effet de compliquer la tâche à la vulgarisation, donc de perpétuer des erreurs au sein du grand public ? Ou que l'absence de vulgarisation permet la prolifération d'erreurs chez les spécialistes ?
J'avais commencé à répondre et avorté mon message faute de temps, mais votre récidive dans le fil sur Gergovie ("Mon livre sera volontairement condensé, facile, pas du tout le genre mémoire illisible de 300 pages avec appareil de notes et 100 pages de bibliographie.") m'a incité à le poster quand même. Il se trouve que j'ai moi-même fait un mémoire de 300 pages, plus d'une quarantaine pour la biblio et près de 1000 notes, et qu'il n'a à mon avis rien d'illisible. Au contraire, l'abondance des notes de bas de page permet de rendre les idées plus faciles d'accès, sans pour autant fragiliser l'argumentation : ça évite d'encombrer le corps du texte avec des démonstrations secondaires parfois fastidieuses et ça a le mérite de montrer que chaque affirmation est étayée par des sources et/ou un raisonnement solide, ce qui est indispensable lorsqu'on amène des idées originales et qu'on critique un point de vue, sans quoi il est impossible d'avoir la moindre crédibilité.
Pour moi, renoncer aux notes de bas de page quand on défend des hypothèses novatrices relève du suicide intellectuel. Et cette affirmation n'a absolument rien d'élitiste : j'estime juste qu'on peut se passer de notes pour vulgariser, mais certainement pas pour proposer quelque chose de neuf.
Pour finir, j'aurais tendance à rester très prudent avec l'étymologie et je ne tirerais pas de conclusions trop hâtives de ce que paraît indiquer le nom de l'oncle de Vercingétorix. Ce n'est pas parce que mon oncle est dans ce secteur d'activité que mes parents et moi-même formons une famille de forgerons, de même que je peux résider à Limoges sans pour autant produire de la porcelaine. Je ne suis pas du tout spécialiste, loin de là, mais il me semble bien plus important, à titre d'exemple, de se poser la question de savoir si Vercingétorix était vraiment le nom du personnage qui a tenté de tenir tête à César, ou une simple indication de sa fonction...