jibe a écrit :
Mais pour la rédaction des 7 premiers livres, je pense, d'après ce que j'ai lu chez les auteurs anciens, que le matériel amassé était transmis à Rome (César y envoyait un courrier-estafette quotidien) au fur et à mesure.
César était suivi en permanence d'une escouade de secrétaires auxquels il dictait des notes en "sténo", qui "croquaient" les lieux des batailles sur des tablettes de cire, relevaient les noms, etc. Tout ce matériel partait régulièrement pour Rome.
Pour la rédaction, il s'est aidé, on le sait, d'ouvrages géographiques et historiques existants, ouvrages que l'on ne pouvait certainement pas trouver à Bibracte, ni trimballer dans une campagne militaire vu la fragilité des supports, C'est pourquoi, je pense que la rédaction a été effectuée dans un lieu romanisé, soit en Narbonnaise, soit à Rome même, où César a multiplié les allers-retours pour surveiller la situation politique et où il avait sa résidence de grand pontife.
jibe a écrit :
L'impérium, qui était dans le cas de César un pouvoir militaire, ne lui interdisait pas d'aller seul à Rome et il ne fait pas mystère de ces voyages. L'affaire du Rubicon a été causée parce qu'une loi interdisait à un consul de s'approcher de Rome à la tête de ses légions.
Je serais bien curieux de savoir sur quel élément repose cette affirmation, car César n'écrit à aucun moment qu'il s'est rendu à Rome, pour la simple et bonne raison qu'il ne l'a pas fait une seule fois entre l'hiver 59-58 et début 49.
Les rapports envoyés par César à Rome pour informer le Sénat n'ont rien à voir avec le
Bellum Gallicum, il s'agit de deux choses distinctes. La
Guerre des Gaules n'est pas une mise bout à bout de ces différents rapports : malgré quelques redites, c'est une œuvre très cohérente. Les rapports envoyés à Rome étaient une version largement édulcorée des notes de César, qui devait trier les informations avec beaucoup de soin. Rien n'interdit de penser que César transportait quelques ouvrages avec lui, surtout quand on connait l'importance du train d'une armée en campagne à cette époque. Ce qui me semble le plus plausible, c'est qu'il ait fait recopier sur papyrus les passages importants concernant la Gaule. De plus, il était très fréquent à cette époque de citer de mémoire les auteurs qu'on avait lu, et César a sans doute étudié avec soin les différentes provinces qu'il allait devoir gouverner avant son départ de Rome : c'était là la principale utilité des ouvrages géographiques, sortes de guides du routard à destination des gouverneurs de province et autres généraux en campagne. Enfin, il ne faut pas oublier non plus que César a passé tous ses hivers (sauf celui de 52-51) en Cisalpine, où il pouvait trouver tous les ouvrages qu'il souhaitait, donc compléter ses notes.
Ses
Commentaires constituent une énorme synthèse, rédigée à partir de toutes les notes prises au cours des différentes campagnes, mais aussi des rapports écrits de ses lieutenants (P. Crassus en Aquitaine, Labiénus à Lutèce, etc), de ses observations personnelles et des informations récoltées dans différents ouvrages, notamment chez Posidonios d'Apamée.
Vestitudo a écrit :
Justement, cela me rappelle une question qui m'est venue dernièrement. Goudineau mentionne, dans son
César et la Gaule, que César avait écrit que la Gaule s'oriente du nord au sud... Il ne fournit pas la référence à ce sujet et je ne me souviens pas avoir lu dans le
BG de telles choses, précisément parce qu'il m'a semblé que César avait largement pioché dans l'oeuvre des géographes grecs. Encore avec Strabon, donc après César, on prétend que la Gaule est un espace délimité à l'ouest par les Pyrénées, orientés Nord/Sud, et plus ou moins au Nord par l'Océan, la côte faisant face sur toute sa longueur à celle de la Bretagne. On interprète alors la géographie comme on le souhaite, mais cela suppose une Gaule orientée vaguement est/ouest.
Il va de soi que César et ses troupes, sur place, n'ont pas eu ces problèmes d'orientation et savaient, au moins par le ciel, à quoi s'en tenir. Pourtant je ne retrouve pas le passage auquel fait référence Goudineau. Qui plus est, les campagnes de César dans les Gaules n'étant pas passées pour modestes
, je comprends mal comment Strabon aurait pu faire abstraction de tels commentaires a posteriori, pour se baser à nouveau sur des auteurs l'ayant précédé de plusieurs siècles. Simple conservatisme érudit ou mauvaise information ?
Aurais-tu la référence de ce passage de Goudineau ? Pour cette orientation plus ou moins est-ouest, je te renvoie à la table de Peutinger, copie du XIIIe siècle d'une carte romaine dont l'original semble remonter au début du IVe siècle de notre ère :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Ta ... eriana.jpg (le chargement est un peu long quand on agrandit l'image) La façon dont on se représentait l'Europe occidentale plusieurs siècles après les campagnes de César laisse tout de même assez perplexe quant aux progrès géographiques accomplis par les Romains à l'époque de la guerre des Gaules...