L'ouvrage ci-dessus affirme que Brasillach, lors de son procès , avait perdu une grande partie de ses illusions politiques, ainsi qu'une grande partie de son crédit auprès des collaborationnistes parisiens. A partir de 42, selon l'auteur, il s'éloigne peu à peu des collaborationnistes radicaux de l'équipe de JSP: le bailleur de fonds et directeur Lesca, Rebatet (dont Louvrier affirme que l'antisémitisme était plus virulent que celui de RB), Pierre-Antoine Cousteau, Laubreaux. Ces journalistes veulent un alignement total de la politique française sur les objectifs allemands. A partir d'août 43, la mention "rédacteur en chef" n'apparait plus à côté de son nom; selon l'auteur, ce serait parce que RB a pris la décision de ne plus écrire en faveur de la collaboration d'Etat. Il désapprouve la ligne éditoriale du journal qui serait devenue : "le fascisme seul", alors que lui au contraire, face au chaos de la guerre, ne voit plus qu'un seul repère, un seul point fixe auquel s'ancrer, la Nation, la "Nation d'abord, car elle seule ne trompe point". Maxime qui est une transposition abstraite du "la terre ne ment pas" de Pétain. La chute de Mussolini en juillet 43 déclenche un clash à l'intérieur de la rédaction de JSP: Brasillach demande les pleins pouvoirs pour ce qui est de la ligne rédactionnelle du journal, ils lui sont refusés et sa ligne est mise en minorité. Les ultras l'accusent alors de "se dégonfler"; Rebatet écrira plus tard que, face à la déconfiture militaire de l'Allemagne en cours , "les censeurs refusaient de l'imprimer mais Robert refusait de mentir à nos lecteurs..." RB démissionne donc de JSP, et Cousteau lui adresse une lettre lui reprochant son attitude: "que tu le veuilles ou non, Robert, tu as flanché, et ce n'est pas la première fois..." RB soupçonne aussi son directeur Lesca de l'avoir dénoncé comme agent gaulliste aux autorités allemandes. Une complicité politique et amicale d'une dizaine d'années se termine ainsi dans les injures, les soupçons et l'acrimonie. Cousteau devient le directeur politique de JSP, et 3 mois plus tard, le journal organise à la salle Wagram un grand meeting politique dont le mot d'ordre, visant directement RB et les tenants du collaborationnisme vychissois, est: "nous ne sommes pas des dégonflés"; même Laval est hué durant ce meeting. PAC déclarera encore plus clairement: "les fascistes en peau de lapin se sont éliminés d'eux-mêmes". Brasillach continue à écrire ailleurs, à la "Chronique de Paris", à "Révolution nationale", etc. Et en été 44, alors que les alliés avancent en Europe, les élites de la collaboration parisienne, dont les journalistes de JSP, commencent à quitter la France, au point qu'un journaliste rebaptise finement JSP en "Je Suis Parti". Darnand, Brinon, Déat, Doriot, Laubreaux, tous quittent la France en août. Ses amis, et même l'écrivain Résistant (et plus tard communiste) Roger Vailland conseillent à RB de quitter la France, mais il ne le fait pas. On peut s'interroger sur les raisons de ce refus de partir, qui équivaut à un suicide.
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