Mais, dans le management, il n'y a pas de "laissez faire". En fait, on peut déléguer des tâches et des responsabilités. Mais, le manager doit déléguer à la bonne personne selon des critères les plus objectifs possibles. Bref, on sait que le délégataire va réaliser sa tâche de la "bonne" manière. Dans le management moderne, on demande un reporting plus ou moins constant. Le délégataire connait l'objectif qu'on attend de lui, il sait aussi dans quelles conditions il doit réaliser sa tâche. Bref, même s'il se sent libre, sa liberté est encadrée.
En fait, c'est dans les échecs qu'on voit les effets du laissez-faire. Il faut lire le rapport Folz sur l'EPR pour comprendre l'écart qu'il y a entre l'attendu et ce qui est une mauvaise gouvernance de projet.
https://minefi.hosting.augure.com/Augure_Minefi/r/ContenuEnLigne/Download?id=104AF2DA-FA4D-4BED-B666-4D582E2C7A8A&filename=1505%20-Rapport%20Flamanville%20pdf.pdf. Ce rapport est très intéressant car on y voit un manageur de très haut niveau qui va regarder comment le projet a été managé. Je pense qu'au niveau technique, aussi bon qu'il soit, monsieur Folz n'a qu'une connaissance limité des spécificités du nucléaire. Mais ce n'était pas ce qu'on lui demandait. Ce qui transparait dans le rapport, c'est qu'il a regardé comment le projet a été managé, et qu'il a comparé cela aux standards actuels
On y trouve ce commentaire sur le niveau de management :
Citer :
Le vocabulaire utilisé par EDF au lancement et pendant les premières années du projet «architecte-ensemblier, commanditaire, pilote stratégique, pilote opérationnel,....» masque une confusion entre les rôles majeurs dans la gestion d’un projet, maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre, qui sont dans les faits tous les deux assumés par la direction des études. A la différence des pratiques usuelles dans d’autres secteurs industriels mettant en œuvre des grands projets, on ne trouve pas dans le projet de Flamanville un maître d’ouvrage bien identifié, qui devrait sans doute être le futur exploitant veillant au respect des prescriptions de l’autorité de sûreté, et un maître d’œuvre, responsable de la conduite du projet, disposant d’une équipe dédiée puissante, et faisant appel aux ressources d’études et d’ingénierie selon les besoins qu’il définit.
La gouvernance mise en place en 2006 est loin de cette configuration généralement considérée comme optimale et pour commencer il n’y a pas de «chef de projet» clairement identifié; dans les faits il apparaît que ce rôle a été successivement assumé par le directeur de l’Ingénierie Nucléaire (DIN) puis , lorsque cette entité est confiée à une direction tricéphale, par l’un de ses directeurs assisté de son adjoint, puis par le responsable de l’un des centres d’études faisant partie de la DIN ( le CNEN ); il est surprenant que chacun de ces responsables successifs ait toujours assumé simultanément d’autres responsabilités que la conduite du projet Flamanville.
Ce n’est qu’en 2015 qu’un véritable directeur de projet à temps plein est désigné et placé hiérarchiquement en N-2 par rapport au président directeur général, alors que certains de ses prédécesseurs étaient en N-3 , voire N-4 .Ainsi l’organisation mise en place pour la direction du projet comme le suivi de celui-ci par les instances de gouvernance du groupe paraissent ne pas avoir été pendant longtemps en adéquation avec l’ enjeu financier , stratégique et de réputation que constitue la construction de l’EPR de Flamanville
Bref, il faut quelqu'un qui dirige, mais ce quelqu'un doit être du bon niveau. Bref, dans le management actuel, on ne demande pas à un N-4 de prendre des responsabilités qui relèveraient d'un N-2. Bref, pas de "laissez faire". Au niveau de la direction, mais aussi aux niveaux intermédiaires. Dans la rapport, on voit que le grand reproche de Jean-Martin Folz est bien que dans ce projet on a trop "laisser faire", mais surtout que les informations ne remontaient pas au bon niveau hiérarchique.
En fait, plus haut j'ai parlé de leader ou de pilote. L'on demande au manager de proximité d'entrainer son équipe tout en surveillant son travail. Il y a 2 images qui servent pour cela, soit le leader qui entraine le monde derrière lui, soit le pilote du paquebot qui depuis l'arrière dirige d'une main sûre sur la bonne voie. Bref, soit il est à l'avant, soit il est à l'arrière, et ce n'est pas qu'une métaphore. Mais, il ne faut pas le laisser seul, et surtout, il faut contrôler qu'il fait ce qu'on lui demande.