Squalll a écrit :
Dans toutes ces conditions, le choix de l'armistice était-il cohérent ? Si la France avait continué de se battre depuis ses colonies, peut-on imaginer des conditions d'occupation beaucoup plus brutales de la part des Allemands ?
Squalll a écrit :
L'armistice de 1940 était-elle un choix rationnel ?
Alors, le choix des termes n'est pas anodin. Dès la fin de la guerre, une partie des personnes impliquées ont essayé de convaincre que c'était le seul choix rationnel. Globalement, et avec l'appui d'une partie de la Résistance, elle y sont arrivée. J'ai souvent eu l'impression que le rejet de l'uchronie par une partie des historiens français naissait d'une volonté de ne pas remettre en cause cette partie du roman national. Puisque la seule manière de démontrer qu'une autre voie était possible était justement de recourir à l'uchronie.
En fait, il y a déjà une première question à se poser : pouvait-on faire un choix rationnel dans les conditions où se trouvait la France et l'opinion publique ? Certains témoins relatent la drôle d'ambiance qui régnait dans les cercles du pouvoir à l'époque. Des menaces à peine voilées, des tentatives d'intimidation. Des gendarmes qui semblent prêts à arrêter ceux qui veulent poursuivre le combat. 27 députés sont arrêtés sur le Massilia et accusés de désertion, alors qu'ils pensaient partir pour continuer le combat en AFN. Cette affaire montre d'ailleurs un certain renversement des valeurs, des personnes qui veulent continuer le combat sont accusées de désertion. Cette accusation concernera d'autres militaires qui voudront se joindre à la France Libre. Les 27 parlementaires en question, ne pourront pas participer au vote sur les pleins pouvoirs accordés à Pétain. Est-ce que cela aurait changé quelque chose ? On ne le saura jamais.
Donc, la première bonne question est vraiment : est-ce qu'une décision rationnelle, autre que la demande d'armistice aurait pu être prise à ce moment-là ? La population française aurait sûrement mal vécu un repli sur l'AFN, avec un départ d'un maximum de militaires qui auraient quitté la France métropolitaine. Tout de suite après, nait une autre question : en cas de repli sur l'AFN et l'Empire, quid des relations au sein de l'Empire ? Il aurait fallu reconnaitre l'apport de cet empire à la victoire finale, ce qui aurait modifié toute la politique de l'après-guerre. Là-aussi, impossible de répondre à cette question.
Après, il y a la faisabilité technique d'une continuation des combats en AFN. Là, l'uchronie est nécessaire et instructive, puisqu'elle montre que non seulement c'était une option viable, mais qu'elle pouvait mener à la victoire. Avec peut-être quelques mois de guerre en moins. Donc, moins de morts. Mais sûrement plus de destructions sur le territoire national. En même temps, ceux qui regardent parfois la chaine Histoire ou la chaine Toute l'histoire et qui ont vu des films sur la période de la reconstruction doivent se demander ce qu'il restait à détruire dans les infrastructures en France. Les ponts principaux avaient été détruits. Les nœuds routiers et ferroviaires, aussi. De même que la plupart des usines... Les allemands en se retirant avait saboté l'essentiel du tissus industriel français. Soit en emportant les machines, soit en les détruisant.
Globalement il y avait 3 choix : l'union avec le Royaume-Uni, le repli sur l'Empire, et celui qui a été fait de rester en France métropolitaine. Là-derrière, il y a aussi une question d’identité nationale, donc la question qu'était la France de 1940 ?
Alors, oui, ce choix est partiellement cohérent avec l'image que nos concitoyens se faisaient de la France et de l'Empire français en 1940. Seuls quelques esprits libres pouvaient concevoir que l’Empire pouvait représenter la France alors que le territoire métropolitain était occupé. En 1940, ils sont ultra-minoritaires et font figure d'exception.
A titre personnel, je crois possible que le combat puisse se continuer en AFN. Je pense que cela aurait été une bien meilleure solution que celle qui a été retenue. Si je me pose en historien, en amateur de la chose historique, je dois reconnaitre que cela était hors de question pour une grande partie des français de 1940, cela dépassait simplement leur entendement. Sans compter qu'à ce moment-là, ils se trouvent dans un état d’abattement très prononcé. Et cela ressort de très nombreux témoignages. Une majorité de gens est dans un état psychologique proche d'un état dépressif. Peut-on prendre une décision rationnelle dans ces conditions ?