Lili98 a écrit :
Que pensez-vous de la terminologie relative au génocide des Juifs d'Europe, plus volontiers adoptée de nos jours ?
Je pense notamment au qualificatif « centre de mise à mort », proposée par Raul Hilberg dans La Destruction des Juifs d'Europe, se substituant à celle de « camp d'extermination ».
Les arguments avancés en défaveur de l'usage de « camp d'extermination » que j'ai pu rencontrer sont les suivants :
1. Le mot « camp » est inadapté, car il ne permet pas de se représenter correctement la topographie de ces sites, mais également car il favorise la confusion avec les lieux concentrationnaires.
2. Utiliser le terme d' « extermination » revient à adopter la conception nazie considérant les Juifs comme des "nuisibles".
Je n'ai pas d'avis tranché sur la question, je vous demande donc vos points de vue.
D'avance merci !
Lili.
En fait, la plupart des gens ont du mal à comprendre comment fonctionnaient les "camps" et comment tout cela s'articulait.
On parle souvent des "camps de concentrations", ce furent les premiers mis en place. Généralement sur des initiatives locales dès 1933. C'étaient des endroits où on retenait des opposants, officiellement pour les "rééduquer" par le travail. Mais aussi soumis à des sévices parfois orchestrés par les autorités, et parfois laissés à la libre appréciation des gardiens-tortionnaires.
Petit à petit, l'empire concentrationnaire nazi s'étoffa. On a vu apparaitre des centres de transit, des centres de redressement. On a évoqué le Struthof, il est classé comme camp de concentration. Le camp de Schirmeck est un cas plus complexe, à l'origine ce devait être un cantre de redressement, il devint un camp de transit, mais aussi un camp de concentration.
En fait, ces camps devaient ne rien coûter à la communauté nationale, donc, on y exploitait le travail des internés. Du coup, les dirigeants de ces camps essayaient d'avoir le plus grand nombre d'internés. Dans un certain nombre de ces camps, on trouve une chambre à gaz et un four-crématoire. Mais, leurs capacités sont limitées.
Venons aux "camps de la mort", il en existe de deux types. Il y a les quatre camps de
l'Aktion Reinhard. Il s'agit de Majdanek, Belzec, Sobibor et Treblinka. Ces camps n'existaient pas au préalable. Ils ont été créés dans un seul but : tuer le plus rapidement possible un maximum de gens. Sur place ne vivent que les internés du commando spécial nécessaires au bon fonctionnement du camp, leurs gardiens et les SS responsables du camp. Quand les ghettos polonais furent vides, les camps ont été démantelés. Comme à la fin de la guerre, il ne restait plus de bâtiments debout. Donc, rien à commémorer".
Et, puis, il y a Auschwitz, le camp le plus connu. Il est à la fois camp de concentration (Auschwitz I) et camp de la mort (Auschwitz-Birkenau). Du fait de cela, il restait des bâtiments, donc on a institué comme lieu principal de mémoire de la Shoah.
Or, on se rend compte que cela induit pas mal de gens en erreur. Quand un train arrivait dans un camp de la mort, il n'y avait souvent plus aucun survivant au bout de quelques heures. Que ce soit à Auschwitz-Birkenau, à Majdanek, à Belzec, à Sobibor ou à Treblinka. Même si les modalités de mises à morts différaient. Zyklon B à Auschwitz-Birkenau ou gaz de moteurs diesels aux quatre autres camps.
Effectivement, le fonctionnement de ces "camps" est plus proche du fonctionnement d'un abattoir, pour dire les choses crûment. Utiliser un terme spécifique, comme "centre de mise à mort", ne serait pas choquant. On peut aussi utiliser "camps de la mort", ou d'autres.