Tres bonne question capa ...
Ayant vécu et travailler en RDA (bien après 1945
) je puis témoigner que l'antifascisme était une composante idéologique majeure - et à mon sens sincère - du régime SED. N'oublions pas que les dirigeants octogénaires de la RDA de 1989 étaient des survivants du IIIè Reich (Honecker a été emprisonné de 1935 à 1945). Ils voyaient dans leur résistance au nazisme (qui contrastait avec la collaboration massive des allemands avec leurs dirigeants) la source de leur légitimité - ce qui les distingait des communistes polonais par exemple qui savaient bien (au moins avec jaruzelski) que leur pouvoir était fondé sur les baionettes soviétiques.
Le concept de "totalitarisme" imaginé par H Arendt pour regrouper les régimes nazis et staliniens (et que je trouve très pertinent pour ma part) n'a jamais été admis par les dirigeants communistes qui ont toujours suivi une analyse marxiste selon laquelle
nazisme = pouvoir du grand capital
démocratie = pouvoir du Peuple ;
Peuple = ouvriers et paysans ;
ouvriers et paysans = parti communiste et satellites ;
parti communiste = bureau politique
et enfin (souvent) bureau politique = secrétaire général ... donc est démocratique l'Etat dans lequel le SG du PC décide de tout ...quant à Hitler il n'aurait été que la marionette de l'IG Farben et de Krupp ...
Comme les classes sociales assimilées (hâtivement) au nazisme (noblesse, grande bourgeoisie) avaient été éradiquées de facto (généralement en fuyant vers l'ouest dès 1945 notamment après les nationalisations systématiques dse grandes entreprises et des grands domaines dès 1945), la dénazification avait été faite "toute seule" à l'est.
A l'ouest, on n'a pas raisonné en classes sociales mais en responsabilité individuelle... la dénazification était donc très délicate à conduire car
- la structure administrative et judiciaire du IIIè Reich était fort complexe et opaque... il était très difficile d'identifier clairement qui faisait quoi
- chaque inculpé pouvait individuellement se défendre en disant qu'il n'avait fait qu'obéir, éventuellement en citant des cas dans lesquels il avait désobéi (ou obéi sans zèle ), et surtout en invoquant l'utilité que ses compétences pouvait apporter à l'Allemagne renaissante (et qui entre 1945 et 1948 manquait terriblement de bras et de cerveaux pour se reconstruire).
Cela étant je crois que Churchill adhérait (un peu) à la vision marxiste : pour lui le militarisme prussien (incarné par les officiers généraux, les grandes industries lourdes et les grandes propriétés de l'Est) était la matrice du nazisme. Pour de nombreux anglais, il n'y avait aucun point commun entre le libéralisme intrinsèque des lords et de la gentry et la noblesse bottée des Junkers...
Alors que le nazisme est à mon sens un mouvement de "masse" (voyez Arendt) animé par des dirigeants incultes aux idées simplistes et remplis de ressentiments contre les structures sociales traditionnelles (armée mais aussi Eglises) et les couches sociales supérieures - et radicalement dénués de conscience morale. Bref la dictature d'un caporal !
Un dernier point : comme souvent avec les communistes, il suffisait d'être fidèle au régime pour être purifié de toute faute antérieure ... On disait par exemple (sans preuve évidemment) que si Honecker n'avait pas été exécuté en 1945 par les nazis (qui ont tué de nombreux dissidents dans les prisons peu avant la chute du régime) c'était qu'il avait donné des gages à la Gestapo (comme Marchais en France)... il aurait été donc "tenu" par le KGB qui pouvait le destabiliser en révélant cela. c'était une rumeur que je n'ai rien pour confirmer...
On disait aussi qu'un certain nombre d'officiers de la Wehrmacht (voire de SS) s'étaient retrouvés dans la NVA à partir de 1956 (qui ? combien ?) ... Un point sur lequel je n'ai jamais eu de réponse : pourquoi les uniformes (et les fanfares) de la NVA étaient ils si proches de celles de la Wehrmacht ?