Barbetorte a écrit :
Je crois que la grande idée de de Gaulle en matière sociale était la Participation qui a fait l’objet d’une ordonnance en 1967. Pompidou ne devait pas être très enthousiaste.
En 67, Pompidou interrogé par un visiteur sur les objectifs à terme de De Gaulle sur la participation, fait le geste de se vriller la temps avec l'index, sans ajouter un mot. (Lacouture, vous l'auriez deviné !
)
En même temps Pompidou, ancien fondé de pouvoir à la banque Rotschild, donc banquier d'affaire, ne pouvait pas approuver. Je trouve que c'est même une erreur de De Gaulle que d'avoir voulu promouvoir la participation avec Pompidou comme premier ministre. (En même temps, est-ce une priorité, réellement, pour De Gaulle ? A cette période il mène une politique étrangère qui lui semble essentielle, en particulier vis-à-vis de l'Est. Une politique visionnaire, prophétique, mais qui a trente ans d'avance, et ne donnera rien. Franchement en 67 il aurait dû s'intéresser davantage aux problèmes domestiques, il aurait peut-être pu éviter la catastrophe politique qui couvait...)
Citer :
Il en est résulté un intéressement des salariés aux résultats de l’entreprise mais je crois que de Gaulle voulait aller bien au-delà, vers une sorte de cogestion à l’allemande.
Cela ne s’est pas fait pour deux raisons.
Le patronat français n’est pas du tout disposé à partager ses pouvoirs avec les salariés.
Les salariés français et les syndicats qui les représentent ne sont pas du tout disposés à partager une responsabilité de gestion avec le patronat.
Soit deux bonnes raisons pour l'imposer, le conflit médiéval entre patrons et salariés aurait pu évoluer vers davantage de dialogue.
Sans parler totalement de "cogestion", on aurait pu imaginer une présence, élue par les salariés, de délégués du personnel... au Conseil d'Administration !
(Je parle sérieusement. Bien entendu les actionnaires privés seraient allés discuter ailleurs entre eux des options stratégiques à prendre - il se dit des choses très confidentielles et sensibles, dans un CA - mais ils auraient eu une obligation minimale d'informer les salariés sur ce qu'ils avaient en tête, et pourquoi pas, auraient pu prendre en compte certaines remarques émanant des discussions que cela aurait déclenché parmi le personnel.)
Mais je rêve : le Comité d'Etablissement ne verra le jour que l'année suivante, glissé par la CFTC dans le paquet de concessions consenties à l'occasion des Accords de Grenelle, au moment de la Grande Peur...
De Gaulle : "Ce pays ne fait des réformes qu'à l'occasion des révolutions !"
Mais peut-être justement De Gaulle aurait-il pu tenter ça, en 67, ce qui aurait été une réforme historique. Ou encore, tant qu'à perdre un référendum la tête haute, aurait-il pu le proposer au référendum de 69, à la place d'une réforme du Sénat un peu sibylline pour le grand public.
On imagine les cris du patronat et le dédain automatique du PCF - on n'aide jamais, par principe révolutionnaire, le capitalisme à se réformer, donc "poudre aux yeux", "piège tendu à la classe ouvrière", bla bla bla... on les connait - mais c'était passer par dessus les appareils pour une proposition directe faite au peuple, que l'idée étonnante pouvait intéresser : n'est-ce pas l'esprit même du gaullisme que d'en appeler au peuple "dans ses profondeurs" ?
Après, un pays qui impose deux délégués du personnel au CA, pour les Américains c'est un soviet, avec des réactions effrayées très prévisibles, qui n'auraient pas forcément favorisé l'investissement étranger en France, mais qui peut prévoir comment cela aurait évolué avec le temps ? (Personne ne se choque plus, aujourd'hui, de l'existence du CE et de l'obligation d'informer le personnel des changements majeurs...)