Vézère a écrit :
Certainement pas. Mais c'était bien là le but insensé: Franco est allé à l'entrevue d'Hendaye avec la peur au ventre: il n'avait aucun moyen de refuser quoi que ce soit à Hitler.
- il était son obligé (soutien logistique et aérien pendant la guerre civile)
- il était complètement isolé diplomatiquement puisqu'infréquentable pour le camp allié. et il fallait bien pourtant que les approvisionnements en blé canadien demeurassent...
- il n'avait pas le début de commencement d'une force armée susceptible de supporter une politique forte, dans quelle direction que ce fut. Idem pour ses ressources économiques.
- une partie de son entourage était ouvertement pro-allemand. Au premier chef, son ministre des affaires étrangères et beau-frère.
Ma foi, j'ignore ce que Franco avait en tête quand il a rencontré Hitler, mais je ne suis pas sûr qu'il était si inquiet que ça... D'ailleurs, mécontenter le Führer par ses exigences, c'est bien ce qu'il a fait.
Mais, accepter d'accrocher le destin de l'Espagne à l'étoile du IIIe Reich, c'était effectivement une décision extrêmement lourde de conséquences pour lui. Et, pour commencer, ça le transformait
de facto en vassal du Führer. Même si la guerre tournait définitivement à l'avantage des Allemands, l'Espagne n'aurait été rien de plus qu'une province secondaire du IIIe Reich dans l'Europe du futur...
Vézère a écrit :
Donc, ces demandes exorbitantes étaient un coup de bluff qui n'aurait jamais du fonctionner: il aurait suffi au cours de la conférence que Hitler un seul instant reprenne ses esprits, en disant: "nan mais ho, vous êtes qui pour réclamer cela? Qu'est-ce qui pourrait d'exiger de vous, au minimum, de traverser l'Espagne par voie terrestre pour aller prendre Gibraltar? Et au maximum de rentrer dans la guerre à mes côtés?"
Ce sursaut de réalisme n'a pas eu lieu.
Franco, toujours mystique, a attribué cet aveuglement à un miracle privé.
De fait, en tant qu'allié militaire pour le IIIe Reich, l'Espagne aurait été plus un boulet qu'autre chose... Sa principale utilité était de permettre la prise de Gibraltar, sans que ce soit excessivement périlleux pour les Allemands. Les exigences de Franco étaient exorbitantes mais, finalement, elles représentaient sans doute une compensation justifiable...
La prise de Gibraltar, et - à terme - l'éviction des Britanniques de la Méditerranée auraient été une immense victoire stratégique pour Hitler... Peut-être même susceptible de pousser la Grande-Bretagne vers la table de négociations ! Or, Hitler a refusé de payer ce prix fort, et n'a pas trop insisté auprès de Franco... Maintenant, le Führer lui-même croyait-il vraiment en la réalisation de cette « solution méditerranéenne », alors que son grand projet était plutôt l'invasion de l'URSS l'année suivante ?
Quand Hitler entreprend son voyage vers l'Espagne, il oscille entre le désir de « liquider » d'abord la Grande-Bretagne, et le souhait de se lancer bientôt dans l'Opération Barbarossa... Suite au refus de Franco, il retourne en Allemagne convaincu que c'est Barbarossa qui est la meilleure solution.