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Message Publié : 14 Mars 2020 12:02 
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Inscription : 20 Déc 2008 14:01
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Un rappel qui n'est pas inutile, à mon sens :
"L'invention du mot "Germains" pour désigner les peuples de la rive droite du Rhin remonte à la Guerre des Gaules de César (cf. H. Wolfram, Die Germanen, Munich, 1997). En 58 av. J-C, le général romain avait battu près de Mulhouse le roi des Suèves, Arioviste, et contraint ce dernier, après ses incursions en Gaule, à se replier sur la rive droite du Rhin. Dès lors, le fleuve était apparu comme une limite. Si César l'a fait traverser à son armée à deux reprises (en 55 et en 53 av. J-C), c'était pour que l'ennemi l'entende ainsi : "La guerre germanique achevée [55 av. J-C], César, pour maintes raisons, décida de franchir le Rhin ; la meilleure était que, voyant avec quelle facilité les Germains se déterminaient à venir en Gaule, il voulut qu'eux aussi eussent à craindre pour leurs biens, quand ils comprendraient qu'une armée romaine pouvait et osait traverser le Rhin" (César, BG, IV, 16, 1). Un demi-siècle avant la conquête des Gaules, le savant grec Posidonios, qui s'était rendu sur place, considérait les habitants de la rive droite du Rhin comme des Celtes, conformément à une représentation géographique pluriséculaire selon laquelle l'Europe était divisée entre les Celtes à l'ouest et les Scythes à l'est. Entre ces deux ensembles, César a donc ajouté les Germains au centre. Sous Auguste, l'emploi du mot "Germains" est désormais courant : le géographe Strabon (VII, 1, 2) tente d'en trouver l'explication en invoquant le sens premier de l'adjectif germanus en latin ("naturel", "vrai", "authentique"), même si, de son avis, l'observation des moeurs ne permet que difficilement de les distinguer des Gaulois : "Ceux-ci [les Germains] diffèrent un peu des Celtes ; ils ont des moeurs plus sauvages, ils sont plus grands et plus blonds mais se rapprochent d'eux pour tout le reste : apparence extérieure, coutumes, genre de vie rappellent tout à fait le portrait que nous avons tracé des Celtes. Aussi me semble-t-il que les Romains, en leur donnant ce nom, ont voulu signifier qu'ils étaient d'authentiques Gaulois ; dans la langue des Romains en effet germani veut dire authentiques". Un siècle et demi plus tard, en 98 après J-C, lorsqu'il compose son petit traité intitulé La Germanie, Tacite s'inscrit dans le sillage d'une représentation géographique et ethnologique issue de la conquête césarienne des Gaules. Et pourtant, lorsqu'il écrit son Histoire romaine dans le premier tiers du IIIe siècle, l'historien grec Dion Cassius emploie encore volontiers le mot Keltoi pour désigner les Germains - par exemple lors de la rébellion au nord du Danube réprimée par L. Domitius Ahenobarbus (55, 10a, 2) lors de son commandement des armées stationnées en Illyrie (6-1 av. J-C). Ou alors il juxtapose les deux termes Keltoi et Germanoi - par exemple à propos des mesures d'expulsion consécutives au massacre de Varus en 9 apr. J-C (56, 23, 4) - comme si les uns et les autres ne formaient au fond qu'un seul ensemble en dépit de cette distinction sémantique. L'emploi du terme "Germains" a donc d'emblée revêtu une portée idéologique et polémique forte, il est indissociable d'une vision du monde toute romaine. Mieux encore, la désignation du Rhin comme une limite de l'Empire doit tenir compte de la volonté de César de rivaliser avec Pompée qui avait atteint et franchi l'Euphrate. [...]
L'auteur souligne en particulier que l'appellation "Germains", très étroitement liée à César et à Tacite, se raréfie à partir des guerres de Marc Aurèle contre les Marcomans (166-180) et surtout lorsque, dans l'Antiquité tardive, les peuples de la rive droite ont été désignés par des noms particuliers (Francs, Alamans, Saxons, Burgondes, etc.). Ce mot ne réapparaît qu'au XVIe siècle. La "Grande Germanie" (Germania Megalè) pour désigner l'ensemble des territoires qui s'étendent du Rhin jusqu'à la Vistule fait son apparition chez Ptolémée (IIe siècle apr. J-C) et Germania interior est employé par Orose (IVe-Ve siècle apr. J-C). Quant à la "Germania libera", trop couramment employée par les Modernes pour désigner les territoires qui ont toujours échappé à la domination de Rome - par opposition aux deux provinces de Germanie inférieure et Germanie supérieure créées par Domitien - cette expression n'est apparue que sous la plume de Jacob Grimm en 1835, l'année même de son édition de la Germania de Tacite".

Tiré de RIVIERE (Yann), Germanicus, Perrin, 2016, pp.477-478.

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Message Publié : 14 Mars 2020 20:22 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile
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Localisation : St Valery/Somme
Jean-Marc Labat a écrit :
Voici un essai de lecture du Hildebrandslied. Je suis un peu surpris d'entendre les w prononcés à l'anglaise et non à l'allemande. Il doit y avoir une raison que j'ignore.

En effet géographiquement l'allemand est plus proche de la zone franque que l'anglais qui a du également subir l'influence celte.
Pourtant en Picard on dit bien Chés Wèpes en le prononçant "ouèps". Mais le passage du "wè" à guè au moyen age et encore une autre histoire.
Dans les retranscription des anciens textes en Tudesque comme le Rithmus Teutonicus il n'y a pas de w mais des uu. et des fois il y a 3 "u"
Heigun sa northman. Harto biduuungan. = Harto bidwungan. = Par les Normands. Si durement opprimé.
quand on écoute l'accent wallon de Charline Vanhoenacker sur France Inter on note une curieuse façon de prononcer le "u" selon sa place dans le mot lol

Dans l'article sur l'origine de la ligature du w, ouikipédia dit ceci :le "w" est passé à "v" dans le normand dans le courant du XIIe siècle, (comme en Allemagne donc), alors que l'anglais conserve ce son dans ses emprunts au normand antérieurs au XIIe siècle : waste (gâter), wait (guetter), walop / galop, warrant / garant, war (guerre), etc.

Le "w" comme façon d'écrire est d'abord apparue dans le sud ouest de l'empire romain, au bas empire pour indiquer le son "ou" à l'anglaise, alors que le "v" se prononçait "b" dans les langue basques et ibérique. (beni, bidi, bicci)

Le passage du "w" à la prononciation "v" en allemand c'est fait probablement plus tard que les premières transcription de ces textes au XIe siècle. Dans le cas de Ludwig / hluduig c'est bien le "u"qui est passé au "w" sans changement de prononciation.

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Lietz her heidine man. Obar seo lidan.
Thiot urancono. Manon sundiono.
(Il permit que les païens traversassent la mer, Pour rappeler aux Francs leurs péchés)


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