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Message Publié : 22 Août 2008 21:58 
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Salluste
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Inscription : 13 Oct 2007 10:18
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Châtillon a écrit :
Les Protestants sont effectivement 2 millions environ en 1562. Mais, quarante ans plus tard, en 1600, ils ne sont plus qu'1 million environ (source: dico de B. et J.).

La révocation de l'édit de Nantes a t-elle joué un rôle ? Oui mais pas seulement. Le 17e siècle est le siècle de la Contre-réforme Catholique. C'est le siècle où l’Eglise se reprend en main et où l’église de France confirme sa position de fille aînée de l’Eglise romaine.

De plus, bien avant Louis XIV, Henri IV et Louis XIII encouragent les conversions au catholicisme. L'édit de Nantes, lui-même ne donne pas la liberté totale de culte aux Protestants. Le règne d'Henri IV marque le début de la reconquête catholique.

L'édit de tolérance de Louis XVI a été en partie pris pour répondre à l'immigration massive des hollandais dans les années 1780 suite à l'échec de la Révolution batave. Mais ces derniers sont retournés chez eux après.


Merci pour ces précisions, donc si je comprends bien, on a perdu 1 million de protestants en moins d'un siècle, juste par réforme de l'Eglise catholique au XVII° siècle ? Alors que les extrémistes catholiques du XVI° siècle qui ont cherché véritablement à anéantir les "hérétiques" n'ont fait "que" plusieurs dizaines de milliers de victimes ? (c'est déjà beaucoup je le conçois).

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Message Publié : 22 Août 2008 23:56 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 19 Mars 2005 18:17
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Raoul Glaber a écrit :
Merci pour ces précisions, donc si je comprends bien, on a perdu 1 million de protestants en moins d'un siècle, juste par réforme de l'Eglise catholique au XVII° siècle ? Alors que les extrémistes catholiques du XVI° siècle qui ont cherché véritablement à anéantir les "hérétiques" n'ont fait "que" plusieurs dizaines de milliers de victimes ? (c'est déjà beaucoup je le conçois).

Le fait que les Protestants soient passés d'1 million à 2 millions en moins de 40 ans, s'explique par de nombreux facteurs. Le plus important d'entre eux est la pression que subissent les Protestants dans la société catholique qu'est celle de la France du XVIe siècle. La menace d'être agressés, d'être pillés voir d'être tués en ont contraint plus d'un à revenir au catholicisme. Pour éviter le rejet et garder une vie sociale, les Protestants se sont vus obligés de revenir au catholicisme. Les Protestants qui sont restés fidèles à leur foi sont ceux qui vivaient dans les lieux où ils étaient majoritaires.

Il y a deux grands évenements qui ont causé le reflux du protestantisme.

- la première guerre de religion (1562-1563) : l'échec des Protestants à s'imposer et les violences effroyables perpétrées dans les deux camps, tant catholiques que protestants ont fait beaucoup réfléchir les nouveaux convertis et les sympathisants, de sorte qu'on constate une stagnation.
- la Saint-Barthelemy (1572) .

Les autres facteurs sont :
- les massacrés et tués au combat
- les "défauts" du protestantisme qui ont poussé certains à revenir au catholicisme; je pense d'une part aux paysans qui ont un temps suivi leur seigneur, et d'autre part, aux gens de grande noblesse trop attachés à la vie de cour pour accepter les règles austères imposées par Calvin (Antoine de Bourbon par exemple)
-le renouvellement de la spiritualité catholique en particulier sous le règne d'Henri III, qui n'est pas sans rappeler le retour à l'intériorité recherchée par les Protestants
- La Contre-Réforme qui constitue un recadrage de l'Eglise dans ses instituions et des abus trop criant. Elle débute sous le règne d'Henri III et s'impose sous le règne d'Henri IV. Je ne sais pas si cette iimpression est bonne, mais j'ai l'impression que le protestantisme n'arrive plus à répondre et tombe en panne devant le renouvellement de la théologie catholique. Parmi d'autres exemples, le cardinal du Perron qui est un ancien protestant mais surtout un très grand orateur parvient à convertir deux fameux pasteurs protestants et en 1600, a lieu cette conférence de reflexion spirituelle où le cardinal affronta (et triompha ?) avec talent Duplessis-Mornay.
- les évenements qui jouent de la défaveur des Protestants: entre autres, la conversion d'Henri IV qui fait d'Henri IV un roi catholique. Cela a beaucoup choqué les Protestants. Cela les a d'autant plus choqué que la situation n'allait pas en s'améliorant pour eux à la fin des troubles. Défaveur des Protestant auprès du roi, ménagement des Guise, nomination d'anciens ligueurs comme ministres, etc.

La Contre-réforme catholique a fait le reste au XVIIe siècle. Je crois que pour Louis XIV, il était impossible de ne pas être tenté par la révocation. Je pense que c'était pour lui et de nombreux catholiques un aboutissement. Le gallicanisme est également un autre facteur.


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Message Publié : 23 Août 2008 11:18 
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Plutarque
Plutarque

Inscription : 03 Mars 2008 20:02
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Un autre élément, inverse des vexations en quelque sorte, pourrait être pris en compte, de plus ou moins d'importance évidemment en fonction de la situation des individus : le sentiment d'être dans le Vrai, de s'assurer le salut (ce qui était, idéalement, la chose primordiale dans la vie), de participer à une entreprise exceptionnelle: restaurer l'Église (au sens spirituel) et la Parole de Dieu. L'observation contemporaine des engagements sectaires (à ne pas prendre dans un sens négatif) ne peut manquer de nous faire apprécier l'importance de ces encouragements "intérieurs" et "extérieurs" à continuer ce que l'entourage ne comprend pas toujours : la rupture avec les traditions, les habitudes, les règles mondaines, etc.

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Message Publié : 23 Août 2008 17:56 
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Hérodote
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Inscription : 29 Déc 2007 18:09
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Un petit élément pourrait peut-être se rajouter à tout ce qui a été dit: depuis le début du XVIe siècle on assiste en France dans le royaume de François 1er à un retour des angoisses eschatologiques, des signes avants-coureurs d'un effondrement du monde, comètes, etc... La foi réformée est aussi un moyen de "désarmer" ces angoisses: la Réforme est donc une réponse à ce grand mouvement de fond qui bouleverse les mentalités collectives...
Au départ, devenir Protestant c'est donc sans doute un acte personnel, mais après est-ce qu'on ne finit pas par le devenir, par naître protestant?

Sinon pour la méthode sociologique ( à la grande époque de l'interprétation marxiste il me semble ), l'exemple typique c'est les ouvriers de l'imprimerie de Lyon, convertis à la Réforme. Ces gens sont des artisans qualifiés, nouvellement arrivés en ville, voire nouvellement immigrés, et auraient trouvé dans la Réforme un palliatif à leur isolement social, d'autant que la profession d'imprimeur était toute neuve et ne pouvait manquer de provoquer l'ire des bouchers, charpentiers, restés fidèles à la "Vraye Foy". Mais bon, l'exemple ne marche pas pour d'autres villes comme en Normandie par exemple.


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Message Publié : 24 Août 2008 16:52 
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Salluste
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Inscription : 13 Oct 2007 10:18
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Merci pour les précisions. Mais finalement quand est-ce que la papauté va-t-elle reconnaître définitivement les Réformés ?

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 Sujet du message : La "panne" théologique ??
Message Publié : 25 Août 2008 13:49 
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Plutarque
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Inscription : 24 Août 2008 16:03
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Localisation : Le Mans
Châtillon a écrit :
- La Contre-Réforme qui constitue un recadrage de l'Eglise dans ses instituions et des abus trop criant. Elle débute sous le règne d'Henri III et s'impose sous le règne d'Henri IV. Je ne sais pas si cette iimpression est bonne, mais j'ai l'impression que le protestantisme n'arrive plus à répondre et tombe en panne devant le renouvellement de la théologie catholique. Parmi d'autres exemples, le cardinal du Perron qui est un ancien protestant mais surtout un très grand orateur parvient à convertir deux fameux pasteurs protestants et en 1600, a lieu cette conférence de reflexion spirituelle où le cardinal affronta (et triompha ?) avec talent Duplessis-Mornay.


Je doute fort de la "panne" de la théologie protestante au moment de la Réforme catholique. Vous citez Duplessis-Mornay, il suffit donc de penser à l'"école de Saumur" (la formule est de François Laplanche), véritable institution théologique novatrice. Sur la seule question de la grâce, la triade Cameron (+1623) - Amyraut (+1664) - Pajon (+1685) révèle une effervescence intellectuelle au sein des penseurs réformées. Pajon est d'ailleurs admiré tant du côté catholique que protestant pour son talent de prédicateur et ses textes imprimés (l'un en réponse à l'un des ouvrages majeurs de Pierre Nicole le janséniste - l'autre en réponse à l'Avertissement pastoral de 1682).

Enfin, pour revenir à Mornay, l'exemple que vous citez est tout sauf une victoire talentueuse !! Dans sa thèse Les Huguenots et le Roi. Le combat politique de Duplessis-Mornay (Droz, 2002), Hugues Daussy montre que la conférence de Du Perron avec Mornay est un traquenard : le gouverneur de Saumur se voit soumettre une liste de 60 citations d'un de ses textes dont il doit élaborer la défense en quelques heures ! La liste lui est donnée dans la nuit (entre 23h et 01h) et la conférence se tient le lendemain matin ! La partie est pour le moins inégale.

Néanmoins, il est indéniable que la Réforme catholique propose un renouveau théologique chez les "papistes", pour reprendre la terminologie de l'époque.

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L'avantage avec le passé, c'est qu'il est passé.
"Je pense donc je suis". Mieux vaut donc ne pas penser.
Personne n'est revenu de la mort. Pas fou.
- Paul Rancoeur -


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 Sujet du message : Re:
Message Publié : 06 Sep 2008 15:43 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 27 Avr 2008 14:42
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Oliviert a écrit :
La concurrence n'existait pratiquement jamais entre le catholicisme et le protestantisme à l'intérieur d'une même ville, ou d'une même région. C'est aussi le cas de nos jours où dans de nombreux pays, une seule religion est permise.


Les exemples de cohabitation des deux religions dans les villes de France sont pourtant fort nombreux. Un certain nombre de villes ont de fortes minorités protestantes (ex Lyon, Metz) Paris conserve une faible minorité. Au contraire il y a des minorités catholiques dans des villes majoritairement protestantes comme Montpellier ou Nîmes. Il est vrai que malgré tout c'est fortement lié au groupe, la famille par exemple. Les raisons économiques ou de parentèle sont dominantes, mais il y a aussi des choix individuels.

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Alceste

Que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants... ne soient pas des signaux de haine et de persécution...

La prière de Voltaire, Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII


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Message Publié : 06 Sep 2008 23:35 
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Jean Froissart
Jean Froissart
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Inscription : 28 Avr 2006 23:02
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Localisation : Orne
Raoul Glaber a écrit :
Mais finalement quand est-ce que la papauté va-t-elle reconnaître définitivement les Réformés ?
1. Ce n'est pas la mission du pape de reconnaître les réformés ou de reconnaître les papous.

2. Les anglophones apellent les catholiques, des Roman catholics, pour les distinguer d'autres catholiques, mais aussi pour insister sur la soumission au pape. C'est une vision fausse, et qui l'était encore plus au XVIe siècle que de nos jours. Le pape n'avait qu'assez peu de pouvoir. Pour les questions de la doctrine, ce n'était pas lui qui décidait, mais les conciles. Pour la nomination des membres du clergé, bien que le pape fut placé au sommet de la pyramide, il ne pouvait, la plupart du temps, rien faire d'autre qu'offcialiser les décisions prises par les chefs d'état. Par exemple, les cardinaux de France sont généralement choisis par le roi.

3. Le catholicisme n'est pas uniforme. Il y a des nuances, qui constituent parfois des différences assez importantes d'un adepte à l'autre. Par exemple, en France, il y avait des catholiques ultramontains, souhaitant que tous les décrets du pape s'appliquent en France, et il y avait des catholiques gallicans, souhaitant que le pape intervienne le moins possible dans les affaires françaises. Dans l'Empire romain germanique, les membres du clergé étaient plus dépendants de la papauté. Ceux qui la rejettait ne pouvaient pas rester catholiques et ils passaient dans le camp des réformés.


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Message Publié : 10 Sep 2008 19:52 
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Salluste
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Inscription : 13 Oct 2007 10:18
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Oui d'accord je suis d'accord avec vous, mais concrètement Benoît XVI aujourd'hui ne fait plus la "chasse" aux Réformés ! Donc je reformule ma question : quand l'Eglise romaine a-t-elle assouplie ses positions envers les protestants et de discuter sereinement avec eux ?

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Message Publié : 10 Sep 2008 20:01 
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Philippe de Commines
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Inscription : 26 Déc 2005 21:13
Message(s) : 1829
Localisation : Metz
Là, on sort des bornes du forum "Renaissance"... :wink:
La position du Saint-Siège ne s'assouplit que très lentement et la première ouverture digne de ce nom date des années 1950 et de l'essor du mouvement œcuménique, plus ou moins soutenu ensuite par Vatican II.
Mais encore à la moitié du XIXe siècle, une des propositions condamnées par le Syllabus de Pie IX (1864) est "Le protestantisme n'est pas autre chose qu'une forme diverse de la même vraie religion chrétienne, forme dans laquelle on peut être agréable à Dieu aussi bien que dans l'Église catholique" (article 18, placé dans la section 3, intitulée "Indifférentisme, Latitudinarisme". Le même pape avait déjà condamné le protestantisme dans son encyclique Nostis et Nobiscum, lettre ouverte aux archevêques et évêques d'Italie, le 8 décembre 1849.

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«L'humanité est comme un paysan ivre à cheval: quand on la relève d'un côté, elle tombe de l'autre.»
(Martin Luther)


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