Raoul Glaber a écrit :
Merci pour ces précisions, donc si je comprends bien, on a perdu 1 million de protestants en moins d'un siècle, juste par réforme de l'Eglise catholique au XVII° siècle ? Alors que les extrémistes catholiques du XVI° siècle qui ont cherché véritablement à anéantir les "hérétiques" n'ont fait "que" plusieurs dizaines de milliers de victimes ? (c'est déjà beaucoup je le conçois).
Le fait que les Protestants soient passés d'1 million à 2 millions en moins de 40 ans, s'explique par de nombreux facteurs. Le plus important d'entre eux est la pression que subissent les Protestants dans la société catholique qu'est celle de la France du XVIe siècle. La menace d'être agressés, d'être pillés voir d'être tués en ont contraint plus d'un à revenir au catholicisme. Pour éviter le rejet et garder une vie sociale, les Protestants se sont vus obligés de revenir au catholicisme. Les Protestants qui sont restés fidèles à leur foi sont ceux qui vivaient dans les lieux où ils étaient majoritaires.
Il y a deux grands évenements qui ont causé le reflux du protestantisme.
- la première guerre de religion (1562-1563) : l'échec des Protestants à s'imposer et les violences effroyables perpétrées dans les deux camps, tant catholiques que protestants ont fait beaucoup réfléchir les nouveaux convertis et les sympathisants, de sorte qu'on constate une stagnation.
- la Saint-Barthelemy (1572) .
Les autres facteurs sont :
- les massacrés et tués au combat
- les "défauts" du protestantisme qui ont poussé certains à revenir au catholicisme; je pense d'une part aux paysans qui ont un temps suivi leur seigneur, et d'autre part, aux gens de grande noblesse trop attachés à la vie de cour pour accepter les règles austères imposées par Calvin (Antoine de Bourbon par exemple)
-le renouvellement de la spiritualité catholique en particulier sous le règne d'Henri III, qui n'est pas sans rappeler le retour à l'intériorité recherchée par les Protestants
- La Contre-Réforme qui constitue un recadrage de l'Eglise dans ses instituions et des abus trop criant. Elle débute sous le règne d'Henri III et s'impose sous le règne d'Henri IV. Je ne sais pas si cette iimpression est bonne, mais j'ai l'impression que le protestantisme n'arrive plus à répondre et tombe en panne devant le renouvellement de la théologie catholique. Parmi d'autres exemples, le cardinal du Perron qui est un ancien protestant mais surtout un très grand orateur parvient à convertir deux fameux pasteurs protestants et en 1600, a lieu cette conférence de reflexion spirituelle où le cardinal affronta (et triompha ?) avec talent Duplessis-Mornay.
- les évenements qui jouent de la défaveur des Protestants: entre autres, la conversion d'Henri IV qui fait d'Henri IV un roi catholique. Cela a beaucoup choqué les Protestants. Cela les a d'autant plus choqué que la situation n'allait pas en s'améliorant pour eux à la fin des troubles. Défaveur des Protestant auprès du roi, ménagement des Guise, nomination d'anciens ligueurs comme ministres, etc.
La Contre-réforme catholique a fait le reste au XVIIe siècle. Je crois que pour Louis XIV, il était impossible de ne pas être tenté par la révocation. Je pense que c'était pour lui et de nombreux catholiques un aboutissement. Le gallicanisme est également un autre facteur.