Cher Ruyven,
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Louis XI et Charles le Téméraire, l'entrevue de Péronne par exemple, où pour le coup le roi est véritablement retenu. Je suis certain qu'il en existe d'autres exemples qui ne me viennent pas immédiatement à l'esprit.
Oui mais, dans le contexte de l'époque, Charles est plus qu'un Grand, c'est un prince qui traite ou veut traiter d'égal à égal avec le roi de France. Rien à voir avec Condé, donc.
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Toujours est-il qu'il y a des raisons à la "surprise de Meaux". Tout d'abord, la paix d'Amboise qui en 1563 a mis fin à la première guerre de Religion est bancale et surtout propice à la révolte du parti protestant. Bien moins avantageuse pour eux que l'Edit de Janvier de 1562, cette paix restreint considérablement l'exercice du culte protestant. Interdiction de pratiquer le prêche dans les villes et hors les villes, il est limité aux demeures des seigneurs nobles. Or, il ne faut pas oublier que si de nombreuses provinces sont touchées, il existe un protestantisme urbain très bien structuré (Paris, Lyon, Montpellier...) et dans le fameux croissant sud/sud-ouest, la proportion de calvinistes est très forte. Peu ont l'opportunité de pouvoir suivre le prêche chez le grand seigneur du coin. Bref, la liberté de culte n'est assuré qu'aux nobles.
Que l'édit d'Amboise limitât quelque peu la liberté accordée aux Protestants, d'accord. Mais:
- il était quand même plus favorable aux nobles protestants qu'aux roturiers (et comme vous le dites, Condé a des devoirs vassaliques, envers les nobles justement, pas les roturiers! Je doute que les nobles huguenots aient fortement poussé Condé à entreprendre son action)
- l'édit avait quand même quatre ans et demi d'âge et Condé l'avait accepté! Quelle mouche le pique soudain?
Pour toutes ces raisons, l'argument de l'édit d'Amboise me semble ne pas tenir la route.
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Condé est chef de parti. Plus loin, il est au sommet d'une pyramide vassalique, d'une clientèle envers laquelle il doit tenir certains engagements. Il n'est pas interdit de penser que cette clientèle exerce une forte pression sur Condé pour qu'il essaye de faire tourner la situation à l'avantage protestant.
Voir ci-dessus: les nobles protestants bénéficiaient d'une situation somme toute pas si mauvaise que ça avec l'édit d'Amboise. Je doute qu'ils aient fait pression sur Condé pour qu'il se lance dans son aventure incertaine et qui risquait de leur faire perdre certains atouts.
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On peut également y voir la peur causée par la massive levée de Suisses afin de garantir les frontières Est où transitent les armées espagnoles qui vont mater la révolte aux Pays-Bas. Il apparaît qu'un grand nombre de chefs du parti protestant craignent que ces contingents ne soient utilisés pour détruire les coreligionnaires. Il ne faut pas oublier que l'entrevue de Bayonne entre Catherine de Médicis et le duc d'Albe est relativement récente et que partout l'on craint une grande extermination des protestants décidée à ce moment-là.
Mmmm... Quand on sait les fantasmes ultérieurs liés à cette fameuse entrevue de Bayonne, on a un doute. Et puis, là encore, cette entrevue est vieille de plus de deux ans! Pourquoi se réveiller un beau jour de septembre 1567? Le passage des "Suisses espagols" a effectivement pu inquiéter quelque peu, mais de là à enlever un roi...!
Parmi tous les événements des Guerres de religion, ce coup de sang de Condé me paraît le plus aberrant. C'est également, au final, l'un des plus tragiques car il a rouvert le chapitre des guerres, fermé depuis cinq bonnes années. Qui sait si, sans cet événement, les Guerres de religion eussent existé?