Mécène a écrit :
Je cherche à comprendre si le changement de perception de la pauvreté date vraiment du XVIIème siècle. .
En lisant des séries de testaments sur la région albigeoise couvrant le XVIe siècle, j'ai noté des variations intéressantes du traitement de l'aumône aux pauvres. Il ne s'agissait pas de les intégrer au cortège funèbre (dans cette micro-région, sud d'Albi, c'est le nombre de curés (capella )qui donne le rang honorifique du défunt) mais de leur offrir, sur une période dont la durée n'est pas indiquée, du pain. Au début du XVIe siècle, ce pain est distribué par l'héritier sur le pas de la porte du défunt (l'expression ,en latin ou en occitan, est "des mains de l'héritier bas nommé au seuil de la maison du défunt"). Par contre vers 1560, la distribution se fait sur le seuil de l'église et par le curé officiant; l'héritier est appelé par le testateur à donner un certain nombre de miches. Puis vers 1580(les dates sont très approximatives et peut-être ont elles une micro géographie), le pain disparaît et le testateur demande une aumône-offrande en argent (quelques sous ou quelques livres).Il semble que la somme allouée soit directement liée au rang scial du défunt.
Parallèlement, les protestants , dans cette région, avaient dans leurs consistoires un "syndic des pauvres" dont le rôle était de canaliser la charité. Un synode provincial du Haut-Languedoc de la fin du XVIe siècle interdisait les aumônes directes au-devant de la maison du défunt.
Par contre élément extraordinaire, la formule, alors archaïque, de distribution directe à la porte du défunt, réapparait en 1685 sur le testament d'un Réalmontais s'apprêtant à fuir la France "pour cause de religion". Je n'ai pas d'explication pourquoi cette formule ressurgit, mais cela me conforte dans la conviction que la vieille tradition de réception des pauvres à domicile a évolué au cours du XVIe siècle (à cause de l'insécurité ambiante de la région ?) en Albigeois vers une charité contrôlée par de autorités ecclésiastiques, au point d'arriver, vers 1680, aux propositions du jésuite R.P. Chaurand (son texte est sur mon blog que vous trouverez dans mon profil).
Si quelqu'un a des précisions sur ce type d'évolution ailleurs, je suis preneur. Idem pour cette resurgence de 1685 : quelqu'un comprend-il pourquoi ?