Sur les relations entre le roi et la noblesse, il suffit de voir l'adhésion fréquente de la noblesse à la fronde parlementaire, comme par exemple le soutien du Prince de Conti, que Louis XV appelait pour cette raison "mon cousin l'avocat".
Ce qui situe d'ailleurs l'ambiguïté de cette fronde parlementaire, vue par le peuple comme luttant pour la liberté, alors que les parlementaires sont nobles - par fonction - et que les nobles en attendent une augmentation de leur pouvoir face au roi.
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D'ailleurs en 1789 les cahiers du Tiers État semblent avoir exprimé un attachement réel à la monarchie.
Oh mais les paysans français ont sans doute parlé de "notre bon roi" jusqu'au 21 janvier 93 !
Il y a le mythe éternel du bon souverain entouré de mauvais serviteurs - "si le roi savait ça !" - le fait que Louis XVI était réellement un "brave homme", le pauvre, et une certaine distance de la province avec l'agitation quotidienne à Paris. Mais cela n'a pas empêché les paysans d'aller piller les châteaux ou d'aller y réclamer les baux seigneuriaux ! Sans compter qu'on peut à la fois aimer "notre bon roi" et faire davantage confiance aux "politiques" qu'on connaît lorsqu'il s'agit de fixer ses pouvoirs réels. (Ces histoires de "Constitution" devaient passer très au dessus de la tête d'une bonne partie du peuple.)
En réalité, dans l'opinion éduquée - disons celle qui savait lire... à haute voix ! - le prestige de la monarchie a déjà été fortement entamé sous Louis XV, qui n'a jamais compris l'importance de l'opinion publique (sa censure était inefficace, voire complice) et a laissé sa réputation d'abord au Parc aux Cerfs puis dans les jupons de la Du Barry. Les journaux - livres, mémoires, libelles, petites feuilles, feuilles à la main... tous les médias de l'époque déchaînés - n'ont fait que redoubler ensuite contre Louis XVI et "son autrichienne", jusqu'à l'affaire du Collier qui a été le clou sur le cercueil.
On a relevé récemment sur ce forum que le mot de Marie-Antoinette "s'ils n'ont pas de pain, qu'ils mangent de la brioche" était apocryphe, mais c'est une plaisanterie, des phrases comme cela les auteurs parisiens de libelles en fabriquaient tous les jours. Celle-là est bien trouvée, certes, mais leur imagination était sans limite. Que penser quand on publie sous le manteau "les amours de la sultane et de son vizir Vergennes" ? La Révolution était engagée bien avant 1789 dans le petit peuple parisien chauffé à blanc.
La raison en est simple : le roi, monarque absolu, est l'homme à abattre, ou en tous cas à contraindre, si on veut abolir les privilèges. Louis XV l'avait fait marquer par Maupeou dans sa réforme des parlements. Le mot de trop venait du parlement de Paris :" le pouvoir que vous tenez de la Nation..." Là Louis XV pète un câble : il ne tient son pouvoir que de Dieu et les parlementaires le savent parfaitement. Licenciement du parlement de Paris, remplacement des titulaires, réforme des pratiques judiciaires (jusque là il fallait payer ses juges et les procédures s'éternisaient) et discours de Maupeou qui leur rappelle les limites de leur rôle - qui est d'abord judiciaire :" Ici s'achève votre office." La monarchie française est une monarchie absolue de droit divin, on peut vouloir changer cet état de fait mais cela s'appelle une révolution.