La prothèse de Daumesnil :
Autre jambe de bois célèbre : celle de Caffarelli du Falga, surnommé « le Père la béquille ».
Il avait eu la jambe gauche emportée par un boulet de canon en 1795 à Staudernheim-sur-la-Nahe. En Egypte, les nostalgiques du pays s’amusaient à dire de lui : « Il se moque bien de cela, lui, il a un pied en France. »
Blessé au coude droit lors du siège d’Acre, il subit une seconde amputation qui, elle, lui fut fatale.
Napoléon, à Sainte-Hélène, conta cette anecdote (Guerre d’Orient, campagnes d’Egypte et de Syrie) :
« La marée montait, il y avait autant de danger à aller en avant qu'à reculer [Bonaparte revenait de sa visite des Fontaines de Moïse, face à Suez, le 28 décembre 1798]. La position devint assez critique pour que Napoléon dit :
« Serions-nous venus ici pour périr comme Pharaon ? Ce sera un beau texte pour les prédicateurs de Rome. »
Mais l'escorte était composée de soldats de huit à dix ans de service, fort intelligents. Ce furent les nommés Louis, maréchal-des-logis et Carbonel, brigadier, qui découvrirent le passage. Louis revint à la rencontre, il avait touché bord, mais il n'y avait pas un moment à perdre. L'eau montait à chaque moment. Du Falga était plus embarrassant que les autres à cause de sa jambe de bois; deux hommes de cinq pieds dix pouces, nageant parfaitement bien, se chargèrent de le sauver; c'étaient des hommes d'honneur, dignes de toute confiance. Rassuré sur ce point, le général en chef se hâta pour gagner la terre. Se trouvant sous le vent, il entendit derrière lui, une vive dispute et des cris. Il supposa que les deux sous-officiers avaient abandonné du Falga. Il retourna sur ses pas, c'était l'opposé, celui-ci ordonnait aux deux hommes de l'abandonner. « Je ne veux pas, leur disait-il, être la cause de la mort de deux braves; il est impossible que je m'en puisse tirer, vous êtes en arrière de tout le monde, puisque je dois mourir, je veux mourir seul. »
La présence du général en chef fit finir cette querelle. On se hâta, on toucha la terre, Caffarelli en fut quitte pour sa jambe de bois, ce qui lui arrivait au reste toutes les semaines. »
Autre jambe de bois perdue : celle de Brechtel. Alors lieutenant, il avait été amputé suite à la bataille d’Ocana, en 1809, mais avait continué à servir. Rapp (Mémoires) conte ceci à la Bérézina :
« [L’Empereur] fit presser l'établissement des ponts, mettre une vingtaine de pièces en batterie. Celles-ci étaient commandées par un brave officier à jambe de bois, nommé Brechtel; un boulet la lui emporta pendant l'action, et le renversa. « Cherche-moi, dit-il a un de ses canonniers, une autre jambe dans le fourgon n° 5. »
Il se l'ajusta, et continua son feu. »