Bonjour a tous, je me permet d'intervenir sur ce sujet
Napoléon III est sans doute un des plus grand dirigeant français du XIX éme et il est très heureux qu'on en est aujourd'hui une vision plus positive et apaisé qui dépasse la légende noire tissé par Victor Hugo et d'autres opposants républicains a l'empire. Maintenant je regrette que ce travail de réhabilitation doivent forcément s'accompagner d'un rabaissement de Hugo. On peut avoir une admiration (mesuré dans mon cas) pour l’œuvre politique et économique de Napoléon III, ainsi qu'une certaine sympathie pour l'homme, et être aussi admiratif de Victor Hugo l'homme comme l'écrivain en ce qui me concerne.
Ybocaj a écrit :
Victor Hugo était surtout pour la liberté de « sa » presse. C’était certes un génie par sa plume, mais c’était un être égoïste, orgueilleux, jaloux. Il ne pardonna pas à Louis-Napoléon Bonaparte, qu’il avait soutenu en 1848 lors de l’élection à la présidence de la République, de ne pas l’avoir nommé ministre de l’Instruction publique.
Victor Hugo était un être complexe avec beaucoup de défaut, et n'était pas un saint c'est le cas de le dire. Inutile pour autant de le diabolisé et de le réduire a ses défauts. J'aimerais bien qu'un jour on me produise une source valable indiquant que Victor Hugo a effectivement souhaité un ministère dans le gouvernement de Louis Napoléon Bonaparte. Aucune source valable n'est jamais cité pour appuyer l'ambition ministériel de Hugo a ce moment précis, même sous la plume d'historien contemporain c'est toujours sous la forme de rumeur et de supposition. Je ne dit pas que ça n'est pas vrai, mais j'ai de sérieux doute.
Napoleonkom a écrit :
Victor Hugo avait espéré devenir le Ministre de l'instruction publique de Napoleon III, mais celui-ci lui a fait comprendre que tout Hugo qu'il soit il n'avait rien à faire d'un homme qui avait été tour à tour royaliste, républicain et bonapartiste en fonction des circonstances en se contredisant souvent et donc qui n'était pas fiable.
Et avoir une connaissance moins superficiel de l’œuvre de Victor Hugo et de ses engagements ça serait pas mal dés fois. Je déteste la manière dont on caricature la trajectoire politique de Victor Hugo. Le jeune Victor Hugo fut légitimiste et embrasser les idées royalistes. Il a été royaliste aussi bien par éducation (ce sont les idées de sa mère) que par opportunisme. Il faut bien comprendre que si il est mort immensément riche il ne l'a pas toujours été, et le jeune Hugo n'avait pas d'argent. Or pour un jeune poète a l'époque et bien obtenir une pension de la part du pouvoir ça pouvait être un moyen de se lancer, et l'obtiendras au moment de la publication des
Odes en 1821. Donc oui les débuts de Hugo sur la scéne littéraire sont ceux d'un conservateur (enfin en politique, esthétiquement si ses tout premiers poèmes ont encore une inspiration relativement classique, très vite il rejoint l'avant garde du moment).
A cette époque Hugo exerce une activité de critique littéraire et dramatique, et sur le plan artistique il est avant tout un poète de grand talent. Ses premiers romans
Bug Jargal (1819) et
Han d'Islande (1823) sont remarqué mais reste encore très imparfait et on ne peut que constater aujourd'hui que ces textes n'ont rien de majeur (le premier est rempli des clichés de l'époque a l'égard des noirs et donc assez pénible pour un lecteur contemporain). Dans le domaine du roman les premiers textes vraiment important de Hugo seront
Le dernier jour d'un condamné en 1829 et bien évidemment
Notre Dame de Paris en 1831. Mais c'est le théâtre surtout qui va en faire un personnage incontournable et très populaire.
En 1827 il publie
Cromwell dont la préface est un manifeste du romantisme, mais encore plus qu'un manifeste un texte théorique majeure qui introduit la fameuse alliance du sublime et du grotesque et par là réhabilite le laid face au beau, détruisant la conception classique du beau idéal. la pièce est intéressante a plus d'un titre d’abord parce que, malgré sa longueur qui la condamne a être inégale, elle est un sommet de la langue française, et d'une audace dramatique qui frappe encore aujourd'hui, c'est vraiment très moderne avec un mélange des genres parfois poussé dans ses derniers retranchement. Mais elle est intéressante surtout pour son propos éminemment politique. De quoi parle
Cromwell sinon des atermoiements d'un pays qui après une révolution hésite quand a son avenir entre une restauration et la république. Ce qui est étonnant c'est que Hugo ne prend pas parti, les royaliste et les républicains sont renvoyés dos a dos avec chacun leur noblesse et leur ridicule. Il reste tout de même que la tirade du puritain Carr a la fin de la pièce qui refuse la clémence de Cromwell dont il condamne le régime autoritaire qui selon lui a trahis les principes de la révolution, offre des résonances avec la situation de Hugo en exil et a posteriori prend des allures programmatiques. Quand a Cromwell c'est une projection de Napoléon Ier, le grand homme tiraillé entre une vision supérieur et son ambition personnelle. Hugo le juge sévérement mais ne peut cacher sa fascination.
On voit donc que l'idéologie personnelle de Victor Hugo est un peu plus complexe qu'on ne veut bien le croire et son théâtre témoigne des nombreuses interrogation qui le traverse a cette époque. Il commence a se rapprocher de son père, général de Napoléon et subit en partie son influence sur le plan politique. il s'interroge notamment sur le véritable héritage bonapartiste, remettant en cause les condamnations des ultras-royaliste, ça donneras entre autre le poème
A la colonne de la place Vendôme, véritable coming out bonapartiste.
D'une manière général le théâtre de Victor Hugo est assez audacieux politiquement parlant (esthétiquement aussi mais c'est une autre question)
Marion De Lorme (1829),
Hernani (1830),
Le roi s'amuse (1832),
Marie Tudor (1833),
Ruy Blas (1838), offre une attaque en règle de l'image du monarque: qu'il soit apathique et dominé par son ministre (
Marion de Lorme), qu'il se conduise comme brigand (
Hernani), qu'il soit un pervers sadien et imbécile (
Le roi s'amuse), une hystérique tyrannique (
Marie Tudor), un médiocre incompétent (
Ruy Blas), il y a une déconstruction de la figure royale radical qui d'une manière général s'inscrit dans une optique de glorification des exclus de la société opprimé par un pouvoir arbitraire (pouvoir qui du reste n'est pas forcément royale, cf le conseil des 10 de la république de Venise dans
Angelo tyran de Padoue). Dans ses pièces Hugo opte une posture critique a l'égard du pouvoir quel qu’il soit et cela lui vaut des ennuis avec la censure:
En 1829
Marion De Lorme est interdite par le gouvernement ultras de Charles X, la représentation de Louis XIII étant jugé trop négative, Hugo s'insurge. Le roi et le gouvernement qui jusqu’à présent avait vu en lui un poète officiel du régime tente de l'assagir en doublant sa pension, il refuse et réclame la levée de l'interdiction, la presse libérale prend sa défense.
Hernani avec son roi brigand qui s’élève a la grandeur en devenant empereur (ce qui en 1830 rappelle inévitablement quelqu'un) est une provocation délibéré a l'égard du régime.
Sous la monarchie de juillet bien que Hugo soit un proche de la famille royale, Le roi s'amuse est également interdit et Hugo se défendras a nouveau et feras même un procès (qu'il perdras évidement). Malgré ses démêlés avec le régime Hugo n'en reste pas moins un royaliste et un soutiens du roi. Sous la monarchie de juillet, c'est un proche de la famille royale et notamment du duc et de la duchesse d'Orléans. Il fréquente le premier ministre Guizot et entre à la chambre des pairs en 1845. Il aurait souhaité a cette époque devenir ministre de l'instruction, comme en ce qui concerne Napoléon III je n'ai rien trouver qui aille au delà de la rumeur, pourtant il avait toutes les possibilité a ce moment là pour pouvoir entrer au gouvernement ou en tout cas exercer une influence. Quoiqu'il en soit, que cette rumeur sur ses ambitions ministérielles soit fondé ou non, il n'en a pas tenus rigueur au régime puisque pendant la révolution de 1848 il essaye de faire proclamer la régence de la duchesse d'Orléans, son ralliement a la république n'est qu'un ralliement de raison
Si l'on s'efforce maintenant de dépasser le clivage républicain royaliste on peut peut être observer quels furent les idées que Victor Hugo a toujours défendu dés qu'il a commencé a faire de la politique: L'abolition de la peine de mort dés 1829 avec
le dernier jours d'un condamné, la réforme d'un système judiciaire et la dénonciation de la misère comme cause du crime avec
Claude Gueux en 1834 (on peut citer également son discours contre le travail des enfants en 1847, il y a aussi ses prises de positions pour l’abolition de l'esclavage), la dénonciation des dérives autoritaire de toutes les formes du pouvoir (tout son théâtre), la liberté de la presse, et si dans ce dernier cas il possède un intéret personnel (du fait de la censure qui a frappé ses pièces), c'est de la pur mauvaise foi que de dire qu'il ne voulait que la liberté de sa presse. Les articles et les discours qu'il a prononcé en faveur de la liberté d'expression sont sans ambiguïté et témoigne d'un engagement totale pour cette cause. Hugo s'est opposé a toutes formes de censure. L'abolition de la peine de mort, le rejet du pouvoir absolue, la liberté d'expression, la lutte contre la misère et l'éducation gratuite et obligatoire sont les grands axes de la pensée politique de Hugo et ce quel que soit le "parti" auquel il adhère. Sur ces points là il n'a jamais varié.
Pendant la II éme République, Victor Hugo est d’abord un conservateur qui affronte d'ailleurs le peuple sur les barricades pendant les émeutes de Juin 1848, il regretteras toujours cette répression et sa violence et très vite critiqueras le gouvernement de Cavaignac. Il reste néanmoins un membre de la droite mais avec des idées très social. C'est dans cet esprit qu'il apporte son soutiens avec son journal
L'événement a Louis Napoléon Bonaparte qui a déjà celui des conservateur et qui peut séduire le peuple en se targuant d'être l'auteur d'un livre intitulé
De l'extinction du paupérisme, ou il exprime des idées socialistes. Hugo se rallie donc (nulle ambition chez lui d'être président de la république) et apporte un soutiens modérés au futur empereur, séduit par son programme social. Encore une fois qu'on me montre la preuve des ambitions ministérielles de Hugo a ce moment là. Il est élus député en 1848 et réélus en 1849. Si au début il continue de siéger et de voter avec les conservateur il s'abstient de plus en plus et désapprouve de plus en plus les mesures réactionnaire qu'ils mettent en place: citons son opposition mémorable a loi Falloux, et la limitation du suffrage universelle. Ajoutons a cela que son discours sur la misère est moqué par les conservateurs. Finalement lorsqu'il rejoint la gauche et se radicalise, Hugo ne fait que se mettre en accord avec lui même. la droit conservatrice et légitimiste ne correspond plus a ses convictions politiques profondes. Défenseur de la liberté de la presse, d'une école laïque et du suffrage universelle Victor Hugo ne pouvait que se séparer de la majorité conservatrice. Pour quelqu'un qui serait simplement assoiffé de pouvoir il faut avouer que c'est une attitude étrange que celle qui consiste a parler et a voter contre la politique du pouvoir en place. Pendant ce temps le prince président en fin politicien qu'il était (et soyons juste bien plus fin politique que ne l'était Victor Hugo) profite de la politique réactionnaire voulu par l'assemblée parce qu'elle lui permet dans un premier temps d'éliminer des adversaire politique comme les fameux démocrate-socialiste pénalisé par la limitation du suffrage universel tout en s'en désolidarisant dans un second temps pour apparaitre comme un défenseur du peuple. Dans ces conditions Hugo ne peut qu'être déçu, et son opposition au président participe de sa radicalisation vers la gauche.
Quand au coup d'état Hugo ne pouvait pas, sans une cohérence totale avec ses idées qui place la notion de droit au centre de tout (ainsi il n'accepte le droit d’insurrection que si le suffrage universel n'est pas en place), l'accepter. Le coup d'état du 2 décembre est, c'est une évidence illégale, Napoléon III n'a assis son pouvoir qu'en violant la constitution et en brisant son serment. Au delà de ça, et même si Hugo a largement surestimé pour diaboliser un peu plus le second empire le nombre des victime, le coup d'état fut violent. La répression a été sanglante, l'armée a ouvert le feu sur la population soulevé. De même il a été suivis par de nombreuses arrestation, souvent arbitraire, et déportation, pour établir un régime autoritaire. J'entend bien que Napoléon III a ensuite tout fait pour adoucir cette répression et a toujours regretter que le sang ait du couler, il en porte tout de même la responsabilité, et Hugo n'est pas en tort lorsqu'il qualifie ce coup d'état de crime. A partir de là le poéte devenus un des leader de l'opposition au régime va écrire ses pamphlets Napoléon le petit et Histoire d'un crime, qui malgré leur vue partiale et caricaturale (en même temps ce sont justement des pamphlets) valent quand même mieux que des tissus de méchanceté et des tissus de mensonge. De même
Les Châtiments sont l'un des chefs d’œuvres de la poésie française au delà de toutes considération d'objectivité historique. C'est de la poésie satirique ou Hugo retrouve la verve de Juvénal (référence avoué) et d’Homère. Derrière les insultes (qui après tout peuvent aussi être un art ce recueil le prouve) et la mégalomanie délirante de leur auteur, ces poèmes sont porteur d'une réflexion sur le droit, la démocratie, la résistance et le peuple, et également sur le sens de l'histoire avec le poème
l'expiation qui lie le crime originel de Napoléon Ier a celui de Napoléon III qui en est une conséquence (bien évidemment c'est une conception propre a Hugo qui n'a rien de scientifique, mais qui est plutôt mystique, ça a sa valeur mais dans le cadre d'une réflexion moderne sur l'histoire).
Les écrits satiriques de Hugo sur le second empire ont une grande valeur intellectuel et artistique a condition de ne pas les considérer comme un récit objectif et historique. Historiquement ces livres ne sont que des documents témoignant d'un certain contexte politique, ils ont une grande valeur également dans la mesure ou ils illustrent Hugo tout entier avec ses défauts: ses excès et sa mégalomanie qui lui interdisent définitivement l'objectivité, et ses qualités: littéraire tout d’abord, elles sont indéniable, mais aussi sa sincérité dans son combat contre toutes les forces d’oppressions, et toutes les formes de violence, au delà du contexte historique c'est un superbe appelle a la résistance!
J'ai beau avoir beaucoup de respect pour Napoléon III et son œuvre, malgré ses excès et sa mauvaise foi je ne peut éprouver que de l'admiration pour la ténacité de Hugo en exil, sa constance dans on opposition au second empire et Napoléon III, jusqu’à refusé l'amnistie.