Il faut nuancer davantage "marin". S'il y a des métiers qui ne s'improvisent pas, tels toute la maistrance (bosco, voilier, charpentier, mais aussi cuistot, et certains matelots qualifiés), le gros de l'équipage d'un voilier du XVIIIe et du XIXe siècle est composé de gabiers, qui peuvent apprendre leur métier lors de leur premier engagement. Il s'agit de tâches qui demandent de la force physique (manœuvres des voiles, des embarcations et des ancres, entretien du gréement, de la coque et du pont, manutention, etc), et une bonne dose de courage. Le témoignage de Richard Henry Dana,
Deux années sur le gaillard d'avant (Two years before the mast), 1840, est à ce titre très intéressant car il parle de ces
classes de l'équipage. Du reste, Dana lui-même n'avait aucune pratique maritime avant de s'engager dans ce reportage comme simple matelot, et il ne lui a pas été difficile de trouver un embarquement: la main-d'oeuvre est bienvenue.
Les recrues viennent de classes populaires, voire pauvres. Pour nuancer encore, il faudrait distinguer les marines du commerce transatlantique esclavagiste. Le sort et la provenance des marins ne sont pas identiques entre les navires anglais et les navires français ou portugais. Ce ne sont pas les mêmes périodes non plus.
L'exemple d'Alexandre Dumas tombe un peu à côté. Alexandre Dumas n'était pas officier de marine, mais vous vouliez sans doute illustrer le fait qu'un descendant d'esclave pouvait s'élever socialement dans la France post-révolutionnaire. Pour rester dans le sujet, on parlerait plus à propos de son père, Thomas Alexandre Davy de La Pailleterie, dit le "général Dumas". Sa mère était effectivement une esclave, et son père un aristocrate. Mais nous sommes là en France. Le général Dumas est devenu général sous la révolution. Le contexte est différent dans la marine, a fortiori chez les anglais qui n'ont pas connu la Révolution, et qui font du commerce d'esclaves au XIXe. Il semble que les navires esclavagistes français ont connu leur période de plus grande activité au siècle précédent.
Il n'est pas du tout impossible qu'il y ait eu des officiers ou capitaines noirs ou plus probablement des officiers métis descendants d'esclaves parmi les équipages des navires transportant des esclaves, mais sans exemples à citer, cela me semble douteux et davantage relever de l'anecdote ou de l'exception. Quant aux armateurs, il en va de même. Lire l'article de Tunde Obadina "Slave trade: a root of contemporary African Crisis",
Africa Economic Analysis (2000). Il décrit un partage des rôles et des gains: les rois et chefs africains qui commettaient les rapts pour vendre les captifs aux Européens se chargeaient de la besogne à l'intérieur des terres, maintenant les acheteurs européens sur les côtes.
https://web.archive.org/web/20120502172 ... /slave.htm