1) du temps ! Il nous a manqué du temps, puisque nous ne créons nos deux premières divisions spécialement conçues pour neutraliser les Panzer Divisionen qu'en janvier 1940. Quand les Allemands ont en trois depuis octobre 1935, cinq depuis novembre 1938, six depuis avril 1939, sept en juillet 1939, dix en janvier 1940 (les quatre dernières formées d'unités existant depuis 1937). Ils ont donc eu le temps d'instruire et d'entraîner ces unités interarmes et de leur donner une cohésion et une capacité à la manoeuvre d'ensemble qu'il était difficile voire impossible d'atteindre pour des unités trop récemment formées. Le cas des DLM est légèrement différent : la première est mise sur pied en juillet 1935, la seconde à l'automne 1937. Elles n'ont donc pas cet inconvénient. Le problème, c'est qu'elles ne sont pas conçues et utilisées comme des unités destinées à contrer les Panzer Divisionen, mais comme des successeurs mécanisés des divisions de cavalerie. Leur entraînement et leurs missions sont donc orientés en ce sens : reconnaître, freiner, flanc-garder, au profit d'une formation d'infanterie, exploiter le cas échéant une brèche déjà réalisée. Ni détruire, ni percer.
2) les enseignements tirés par le Groupement d'instruction de Nancy, réuni à partir de février 1938 pour préparer la mise sur pied d'une grande unité cuirassée, sont insuffisamment approfondis et exploités. Rassemblant pourtant trois bataillons de chars (un de chars D1, un de D2, un de B1), deux bataillons de chasseurs de type porté et un groupe d'artillerie tracté tout terrain, ce groupement n'a effectué aucune manoeuvre d'ensemble ni même aucun exercice préparatoire. Il n'a même jamais pu réunir l'intégralité de ses unités en manoeuvre. Il a pu produire une note provisoire à l'usage de la division cuirassée approuvée le 1er février 1939, mais cette expérience était bien faible, portant sur des aspects superficiels, qui ne seront d'aucune utilité pratique lors de la constitution des divisions cuirassées début 1940. Elle n'avait surtout reçu aucun semblant de début de commencement d'exécution le 1er septembre 1939.
3) l'organisation des DCr est clairement déficiente : leur tableau d'effectifs guerre (TEG) ne comprend que 6 444 soldats et 168 chars, quand une Panzer Division en comprend le 10 mai 1940 17 000 environ et entre 250 et 300 (en fait, de 153 à 341, mais la grande majorité en dispose entre 247 et 314). La DCr n'a qu'un simple bataillon d'infanterie portée, quand une division blindée allemande en comprend de quatre à sept. Il n'y a qu'en artillerie où elle fait théoriquement jeu égal avec ses opposantes (24 tubes et même 36 pour la 1re DCr, pour 24 à 36 tubes pour une Panzer Division organique - dans la réalité, leur seront subordonnés des groupes tirés des Heerestruppen "boostant" leur puissance de feu à 48 voire 60 tubes !). Pour les appuis et soutiens organiques, c'est encore pire : elle n'a qu'une compagnie de génie (contre trois), une compagnie de transmissions (contre deux), une seule batterie antichars (contre un groupe qui en dispose de trois), aucune reconnaissance divisionnaire (contre un bataillon complet). Les DCr disposent d'un groupe aérien d'observation de trois à six appareils, alors que les Panzer Divisionen n'en ont pas organiquement, mais les escadrilles de reconnaissance disponibles au niveau du corps d'armée motorisé allemand annulent cet avantage et même le supplantent largement, de même que la supériorité aérienne acquise sur le champ de bataille. Même problème pour la défense contre les aéronefs : aucune n'est dédiée, alors que les Allemands détachent systématiquement un bataillon antiaérien au profit de leurs divisions blindées (sans compter les éléments organiques du corps d'armée !). En logistique, c'est la catastrophe, le groupe d'exploitation divisionnaire (GED) ne comprend 46 soldats et cinq véhicules, la compagnie de transport respectivement 254 et 106, quand les divisions blindées allemandes comprennent jusqu'à dix compagnies de transport (sept de transport, trois de transport pétrolier), sans même parler des unités dédiées au soutien (ateliers de réparation, compagnie de bouchers et de boulangers, etc). Bref, c'est une structure qui n'est en rien capable de mener la même guerre qu'une Panzer Division. En particulier, elle est incapable d'exploiter ou d'opérer dans la profondeur. Son seul rôle, c'est de servir de barrière antichars linéaire, ou de brécher un dispositif au profit de l'infanterie. Les DLM s'en sortent (un peu) mieux, mais il n'y en a que trois, et leurs missions spécifiques n'anticipent pas un rôle "char contre char". Elles doivent au contraire opérer dans la profondeur, mais demeurent malgré tout moins bien fournies que les Panzer Divisionen : trois bataillons d'infanterie (contre quatre à sept), 190 chars (plus 49 AMD et 72 AMR), 36 canons de 75 ou de 105, deux batteries antichars (contre trois), deux compagnies du génie et deux compagnies de transmissions. Leur logistique est cependant globalement identique à celle d'une DCr, donc largement insuffisante.
CNE EMB
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