J. Sémelin évoque ce phénomène de traitement de la violence par les journalistes dans Purifier et Détruire, dans le cadre précis de la "violence ethnique". Les médias insistent sur celle-ci, voire ne parle que d'elle, au détriment d'autres attitudes : "l'action violente étant la plus identifiable, elle se prête aisément au traitement journalistique. Mais une telle couverture médiatique est trompeuse. Car qui dit qu'au même moment d'autres acteurs, de manière discrète, donc sans bruit, ne sont pas en train de déployer des efforts considérables pour sauver des victimes menacées d'être emportées par la tempête ?"(p.129) Il précise ensuite que le recul apporté par l'Histoire permet de reconnaitre l'existence de ces comportements "alternatifs" (j'insiste sur les guillemets). Ainsi, J. Sémelin parle de cette dérive consistant à placer un point focal uniquement sur les débordements de violence, laissant penser qu'un seul comportement fait loi, tandis qu'il existe ces autres attitudes, certes plus prudentes, mais demeurant non-négligeables. Il est vrai que cela interroge plus largement sur la mise en avant régulière des actes de violence dans les médias. Indirectement, si un seul et même comportement est montré, à répétition - même si celui-ci est condamné - cela peut induire qu'il s'agit d'une attitude "normale", répandue, voire inévitable (au sens "nous allons y être confrontés")- ce qui est hautement polluant pour l'esprit.
_________________ La vie est variable aussi bien que l'Euripe - Apollinaire
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