En marge de l’attentat de la rue Saint-Nicaise, on peut également citer l’affaire Chevalier. Fouché s’en fit l’écho dans ses Mémoires :
« Chevalier, d'un républicanisme délirant et d'un génie atroce, occupé, dans le grand atelier d'artillerie de Meudon, sous le Comité de salut public, à imaginer des moyens de destruction calculés sur les effets extraordinaires de la poudre, conçut la première idée de faire périr Bonaparte à l'aide d'une machine infernale qu'on placerait sur son passage. Excité par les encouragements de ses complices, et plus encore par son propre penchant, Chevalier, secondé par le nommé Veycer, construisit une espèce de baril cerclé en fer et garni de clous, chargé à poudre et à mitrailles, auquel il adapta une batterie solidement fixée et armée, susceptible de partir à volonté à l'aide d'une ficelle, ce qui devait mettre l'artilleur à couvert de l'explosion. L'ouvrage avança; tous les conjurés se montraient impatients de faire sauter, au moyen de la machine infernale, le petit caporal, nom qu'ils donnaient à Bonaparte. Ceci n'est pas tout : les plus hardis, Chevalier à leur tête, osent faire entre eux l'essai de la machine infernale [contenant, dixit l’informateur de la police consulaire, « le feu dit grégeois »]. La nuit du 17 au 18 octobre [1800] est choisie; les chefs du complot vont derrière le couvent de la Salpêtrière, s'y croyant à couvert par l'isolement. Là, l'explosion est telle que les enragés eux-mêmes, remplis de terreur, se dispersent. Revenus de leur premier effroi, ils délibèrent sur les effets de cette horrible invention; les uns la croient propre à couronner leurs trames; d'autres pensent, et Chevalier se range de cet avis, qu'il ne s'agit pas de faire périr plusieurs personnes, mais de s'assurer de la mort d'une seule, et que, sous ce rapport, l'effet de la machine infernale dépend de trop de chances hasardeuses. Après de profondes méditations, Chevalier s'arrête à l'idée de construire une espèce de bombe incendiaire, qui, lancée dans la voiture du premier consul, soit à son arrivée , soit à sa sortie du spectacle, le ferait sauter par une explosion inévitable et subite. Chevalier met de nouveau la main à l'œuvre. Mais déjà l'explosion nocturne avait provoqué mon attention, et les jactances des conjurés transpirant de proche en proche, ne tardèrent pas de mettre toute la police à leurs trousses. La plupart des rapports secrets faisaient mention d'une machine infernale destinée à faire sauter le petit caporal. Je consultai mes notes, et je vis que Chevalier devait être le principal artisan de cette machination perverse. Le 8 novembre, on le trouva caché, et il fut arrêté, ainsi que Veycer, dans la rue des Blancs Manteaux ; tous ceux qu'on soupçonnait leurs complices le furent également. On trouva de la poudre et des balles, les débris de la première machine et l'ébauche de la bombe incendiaire, enfin tous les éléments du corps de délit. Mais il n'y eut aucun aveu, ni par menaces ni par séduction. »
Suite à l'interpellation du suspect, on procéda logiquement à l'étude de la machine infernale trouvée sur place (expertise effectuée par Monge). Finalement, rien de bien révolutionnaire : un baril relié à un canon de fusil équipé de sa batterie devant provoquer la mise à feu par l'usage d'une ficelle reliée à la détente. A l'intérieur (même si on n'est pas sûr que la dite machine soit du même type que celle testée en octobre), point du fameux feu grégeois : huit livres de poudre de munition de fusil et deux livres de scories de fourneaux de fer et de verrerie cassées en petits fragments.
Jugé par une commission militaire, Chevalier fut condamné à mort et exécuté le 11 janvier suivant.
_________________ " Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)
|