Jerôme a écrit :
L'attitude de Staline face à Hitler et au national socialisme est souvent condamnée pour des raisons évidentes mais que je voudrais un peu approfondir.
Certes avant1933 Moscou n'a pas demandé au KPD de lutter efficacement contre les nazis.
Comment lutter efficacement contre Hitler?
-Par la force: le RFB a été interdit en 1929 par le gouvernement allemand tandis que la SA continue de prospérer (elle avait été interdite entre 23 et 26 pour cause de putsch).
-Par les élections: même face une alliance de toute la gauche, une coalition de la droite allemande l'emporte encore en 33. Les rapports entre KPD et SPD ne sont pas mauvais de la seule faute de Staline, le SPD ne veut pas d'une alliance. Tandis que la droite allemande ne sera pas longue à voter les pleins pouvoirs à Hitler.
Tant à gauche qu'à droite les communistes font dans les années 30 plus peur que les nazis, d'ailleurs Hitler aura une marge diplomatique bien supérieure à celle de Staline jusqu'à la guerre (cfr Munich).
Jerôme a écrit :
mais qu'en fut il entre 1933 et 1939 ? là aussi on n'a pas l'impression (mais j'ignore sans doute certains aspects de la lutte clandestine) que les communistes allemands aient été très engagés contre le régime.
La résistance communiste allemande est un sujet qu'on ne traite pas beaucoup, la RFA n'a guère cherché à la mettre en valeur et tout ce qui a été produit en RDA sur le sujet est taxé de propagande. Difficile donc de faire le bilan, mais 14000 communistes sont arrêtés en 34, 11000 en 36, encore 3800 en 38, en 1936, 70% des 1 643 200 tracts saisis par la Gestapo sont d'origine communiste, je pense donc que les communistes allemands ne sont pas les moins "engagés dans la lutte".
Jerôme a écrit :
En revanche la diplomatie soviétique a été plus active avec la signature de divers pactes (avec Pierre Laval en 1935 par exemple). Cela signifie-t-il que Staline ne croyait pas en une révolution allemande antinazie mais se préparait à une crise internationale voire à une guerre, seul moyen d'éliminer Hitler ?
Justement Staline croyait à un soulèvement en Allemagne, c'est une des déceptions de la guerre, il pensait qu'une révolution prolétarienne serait possible et même décisive en Allemagne.
Jerôme a écrit :
En 1939 la pacte "de non agression" (terrible euphémisme) marque un revirement complet - ou l'aboutissement logique d'une attitude prudente et défensive depuis le début ?
De la prudence assurément.
Jerôme a écrit :
En 1941, Staline est surpris par l'attaque allemande, qui était pourtant prévisible !Pourquoi cette constante sous évaluation du danger hitlérien par Moscou ?
La préparation militaire soviétique prouve tout de même que le danger allemand n'était pas sous-évalué, l'essentiel des ressources de l'URSS dès les années 20 et surtout dans les années 30 est orienté vers l'industrie de la défense. On peut difficilement parler d'impréparation ou de manque de prévision. Mais il est sûr que Staline aurait préféré avoir un an de plus.
Jerôme a écrit :
parce que les Soviétiques croyaient que le nazisme n'avait aucune réalité et que Hitler n'était qu'une marionnette du grand capital ? mais alors même si cette théorie avait été vraie, Staline n'aurait il pas du être au moins méfiant, ne' serait-ce que pas simple prudence (bien dans son caractère) ?
Staline voyait sans doute en Hitler une sorte d'aventurier, il s'en méfiait mais ne le voyait comme vraiment dangereux que dans une alliance avec une autre puissance. Il craignait que son anticommunisme n'attire vers lui des pays comme la G-B, d'où le soulagement du pacte qui oriente Hitler vers l'ouest et cesse d'en faire un partenaire fiable dans l'anticommunisme.
Jerôme a écrit :
Parce que les soviétiques ne croyaient pas à l'efficacité de la machine politico-militaire allemande et sous estimait la reconstruction effectuée depuis 1933 ? ou parce qu'ils surestimaient leur propre force, s'illusionnant sur leurs effectifs (cela dit à long terme, ils ont eu raison sur ce plan) ?
Les Soviétiques ont plus que probablement été déçus des prestations de l'armée rouge face aux nazis, ils prévoyaient de perdre moins de territoires et surtout de pouvoir lancer plus vite les contre-offensives en profondeur sur lesquelles reposaient la théorie soviétique.Mais je crois qu'au final, ce sont plutôt les Allemands qui ont sous-estimés les Russes.
Jerôme a écrit :
Moscou ne voyait pas qu'il existait une forme de parenté entre les deux régimes ? violence policière, contrôle de la pensée, persécution impitoyable des opposants, cynisme des dirigeants, etc ... s'ils croyaient en leur force pour ces raiosn, ils auraient pu imaginer que les mêmes facteurs pouvaient jouer en faveur de l'Allemagne ?
Staline ne voyait aucune parenté entre l'URSS et l'Allemagne nazie, il est communiste, il ne croit pas en sa force parce qu'il est cynique ou qu'il contrôle la police, il croit d'abord à la supériorité de sa vision du monde. C'est un fanatique qui ne se trouve rien de commun avec le nazisme, même s'il trouve remarquables certains aspects de la politique nazie et en particulier sa capacité à faire taire le prolétariat allemand.