Les contemporains de Charlemagne et leurs descendants actuels.
Dans l’article wiki
https://fr.geneawiki.com/index.php/Prog ... ascendants,
dans l’annexe2 (Descendance actuelle des populations anciennes),
il y a trois tableaux. Le deuxième est précédé du titre : Estimation de la population ayant une descendance jusqu’à nos jours.
Un point de vocabulaire d’abord : un couple fécond est un couple qui peut avoir des enfants, un couple fertile est un couple qui en a eu (lesquels ont survécu on non jusqu’à l’âge adulte) (cette définition n’est pas strictement scientifique mais elle est commode).
Ce tableau prétend montrer, dans les conditions de la société traditionnelle, la probabilité pour un couple G fertile d’avoir des petits-enfants.
Le raisonnement se poursuivra ensuite et aboutira à la conclusion que, quel que soit le nombre de générations subséquent envisagé, la probabilité que ce couple n’ait aucun descendant jusqu’à nos jours ne peut pas dépasser 17,52%.
En d’autres termes, si un couple vivant sous Charlemagne a été fertile, alors la probabilité qu’il n’ait aucun descendant vivant n’est que de 17,52%.
Représentez-vous un couple qui a eu de la descendance : ce couple a au moins cinq chances sur six d’avoir des descendants vivants.
Ce tableau est une étonnante foutaise telle que je ne me souviens pas d’en avoir jamais vue de pareille dans wikipedia.
Les hypothèses retenues pour la constitution du tableau sont données au-dessus du tableau précédent. Les voici :
« Un enfant sur quatre meurt avant 5 ans. Un sur les trois restants avant 20 ans ».
[Donc, par naissance, à vingt ans il reste : 0,75 x 2/3 = 0,5.]
« Pour les adultes : 20 % des adultes n’ont pas de descendance (couples stériles, ecclésiastiques, etc.) ». On admet qu’un couple fertile a en moyenne 5 enfants viables en 10 ans (un tous les 2,5 ans). Il peut avoir entre 1 et 10 enfants (une chance sur 10 pour chaque cas) ».
Avant même de discuter plus avant les hypothèses, on voit tout de suite l’énorme bourde commise.
S’il y a une chance sur 10 d’avoir un enfant, une sur 10 d’en avoir deux… une sur 10 d’avoir dix enfants, il y a bien une moyenne de 5 enfants (plus exactement, 5,5) :
(1 + 2 + 3 + 4 + 5 + 6 + 7 + 8 + 9 + 10) / 10 = 5,5.
Mais, quand la moyenne est de 5 enfants, la distribution est approximativement en courbe de Gauss, comme tant de choses en ce bas-monde : si on lance dix fois un dé à six faces, il y a beaucoup plus de chances d’avoir un total compris entre trente et quarante que d’avoir un total compris entre dix et vingt ou un total compris entre cinquante et soixante. De même il n’y a pas dix pour cent de chances d’avoir 10 enfants mais beaucoup moins, et pas dix pour cent de chances d’en avoir cinq, mais beaucoup plus : il y a plus de couples ayant 5 enfants que 4 ou 6, plus de couples ayant 4 ou 6 enfants que de couple en ayant 3 ou 7, plus de couples ayant 3 ou 7 enfants que de couples en ayant 2 ou 8, et plus de couples ayant 2 ou 8 enfants que de couples en ayant 1 ou 10.
On verra cette erreur capitale engendrer, dans le tableau, un calcul radicalement erroné.
Je traite rapidement de quelques autres erreurs comprises dans ces hypothèses :
Pour une société traditionnelle en général, 50% de naissances n’atteignant pas 20 ans, c’est un chiffre un peu élevé.
20% d’adultes n’ayant aucune descendance, c’est aussi un chiffre trop élevé.
Et je lève une difficulté : « On admet qu’un couple fertile a en moyenne 5 enfants viables en 10 ans (un tous les 2,5 ans) ». On pourrait croire que « viable » ici signifie « qui atteindra l’âge adulte », mais ce serait une erreur : si un couple avait cinq enfants atteignant l'âge adulte, la population serait multipliée par 2,5 à chaque génération. Il faut lire 5 naissances. 5 naissances, dont la moitié donnera des adultes, soit 2,5 adultes. Or il est dit que 20% des adultes n’ont pas de descendance. Donc 80% en ont, ce qui fait : 2,5 x 0,8 = 2 enfants. Sur cent adultes, vingt n’ont pas de descendance, et les 80 qui en ont engendrent : 80 x (2,5 / 2) = 100.
Cent adultes engendrent donc cent enfants qui parviennent à l’âge adulte. On a décrit ici les conditions d’une population stable.
L’article suppose qu’un couple ne peut pas être fécond plus de dix ans… Passons…
Je passe au tableau.
Le voici :
Nbre d’enfants Avec chances Chances de la fratrie G -1 Chances de G de ne pas avoir de
du couple G de ne pas avoir d’enfants petits-enfants
1 10% 60% 6%
2 10% 36% 3,6%
3 10% 21,6% 2,16%
4 10% 13% 1,30%
5 10% 7,8% 0,78%
6 10% 4,7% 0,47%
7 10% 2,8% 0,28%
8 10% 1,7% 0,17%
9 10% 1% 0,10%
10 10% 0,6% 0,06%
TOTAL 100% 14,91%
[Le tableau se tasse, je ne comprends pas pourquoi, j'espère qu'on parviendra quand même à le lire]
Comprendre comment ce tableau doit se lire m’a pris plusieurs heures… Cela dit, il n’y a qu’une seule façon de le comprendre qui soit cohérente avec les hypothèses.
1ère ligne : Il y a dix pour cent de chances qu’un couple G fertile ait 1 et seulement 1 enfant, cet enfant (génération G – 1) a lui-même 60% de chances de ne pas avoir d’enfants, puisque il a 50% de chances de ne pas devenir adulte, et, s’il devient adulte, 20% de chances de ne pas avoir d’enfants, si bien que 6% des couples G doivent se trouver avoir eu un enfant mais pas avoir eu de petits-enfants.
2ème ligne : Il y a dix pour cent de chances qu’un couple G fertile ait eu 2 et seulement 2 enfants, ces enfants ont chacun 60% de chances de ne pas avoir d’enfants, si bien que 10% x (60% puissance 2) des couples G doivent se trouver avoir eu un enfant et pas de petits-enfants.
…
10ème ligne : Il y a dix pour cent de chances qu’un couple G fertile ait eu 10 enfants, ces enfants ont chacun 60% de chances de ne pas avoir d’enfants, si bien que 10% x (60% puissance 10) des couples G doivent se trouver avoir eu dix enfants et pas de petits-enfants.
Ensuite on fait le total et on a la probabilité qu’un couple fertile n’ait pas de petits-enfants : 14,91%.
Tableau, donc, radicalement erroné.
L’article se poursuit.
15% des couples fertiles n’ont pas de petits-enfants. 15% de ces petits-enfants n’ont eux-mêmes pas de petits enfants.
On voit donc que les couples fertiles qui n’ont pas d’arrière-arrière-petits enfants sont : 15% + (15% puissance 2) = 15% + 2,25% = 17,25%.
La limite de cette suite est 17,52%.
D’où la conclusion : « C'est-à-dire que quel que soit le nombre de générations « G - N », le pourcentage de chances de ne pas avoir de descendance (dans ce cas) ne peut pas dépasser 18 %. Tout couple d’ancêtres [= tout couple fertile] de génération G a donc environ 82 % de chances d'avoir une descendance jusqu'à nos jours. »
Après quoi la suite de l’annexe est grandiose mais ultra-concise.
Nos ancêtres représentent 55 à 60 % de la population vivant au temps de Charlemagne ou auparavant.Ce qui équivaut à : 40 à 45% de la population vivant au temps de Charlemagne n’a pas eu de descendance jusqu’à nos jours.
Comment a-t-on aboutit à ce chiffre ? Aucun calcul. On ne nous dit pas quoi a été multiplié par quoi. Je vais essayer de chercher…
On se souvient que 20% des adultes ne formaient pas un couple fertile. Par ailleurs 18% des couples fertiles n’ont pas de descendance jusqu’à nos jours.
Sur cent jeunes adultes, on en a donc 20 qui n’auront pas d’enfants. Sur les 80 qui restent, 18% n’auront pas de descendance jusqu’à nos jours. 80 x 0,18 = 14,4.
Donc, auront des descendants jusqu’à nos jours : 80 – 14,4 = 65,6.
Ils auraient donc dû écrire :
Nos ancêtres représentent les deux tiers de la population au temps de Charlemagne.
Mieux dit :
Les deux tiers de la population au temps de Charlemagne sont nos ancêtres.
Ou :
Les deux tiers de la population au temps de Charlemagne sont ancêtres de gens qui vivent actuellement.
Ou :
Seul un tiers de la population au temps de Charlemagne n’a pas de descendants.
Comment l’article a-t-il pu aboutir au chiffre de 40 à 45% et non à un tiers ?
Si 17% des couples fertiles n’ont pas eu de descendance jusqu’à nos jours, et si 40 à 45% de la population n’a pas eu de descendance jusqu’à nos jours, c’est que ces couples fertiles représentent une fraction F de cette population P :
0,83 x F = 0,40 x P.
F / P = 0,4 x 0,83 = 0,33.
Ou : 0,83 x F = 0,45 x P.
F / P = 0,45 x 0,83 = 0,37.
Les couples fertiles composeraient donc 33 à 37% de la population totale ! Or les couples fertiles composent 80% de la population adulte.
Il faut donc supposer que, dans la population vivant à l’époque de Charlemagne il faille inclure les enfants morts avant d’atteindre l’âge adulte. Pour cela il faut connaître l’âge moyen auquel meurt un enfant qui mourra avant d’atteindre l’âge adulte.
Je renonce…
En résumé.
Cette annexe commence par deux hypothèses excessives (50% de décès chez les enfants, 20% de non-reproduction chez les adultes), une hypothèse incohérente avec les précédentes (5 naissances par couple fertile), et une bourde gigantesque (distribution égale du nombre de naissances chez les couples fertiles).
Il en conclut par un chiffre de 15% de couples fertiles n’ayant pas eu de petits-enfants.
De ce chiffre erroné il conclut par un raisonnement juste : 18% des couples fertiles n’ont pas de descendants jusqu’à nos jours.
Après quoi, au lieu de conclure que les deux tiers des adultes ont des descendants jusqu’à nos jours, il annonce que 40 à 45% de la population n’a pas eu de descendants.
Qui s’appuie sur cette Annexe repose sur du Néant…