Dupleix a écrit :
Puisque Eisenhower a été cité, je trouve que (au moins pour la première partie de sa carrière) il mérite d'être rangé dans cette catégorie que l'on n'arrive pas à nommer simplement (médiocres de génie, génies inattendus...). Bref les gens qui n'ont pas été considérés comme des flèches au début de leur carrière et qui ont fini par faire de grandes choses.
J'approuve tout à fait ce choix.
Eisenhower n'a pas d'états de service fracassants, n'a pas combattu en France - à son grand dépit - pendant la Grande Guerre, n'est pas un personnage tonitruant à la Patton, lorsqu'il se voit confier le commandement des troupes américaines en AFN et Italie, puis le commandement interallié pour le débarquement et jusqu'au VE Day. (Je crois simplement que Marshall a repéré chez lui un organisateur-né, et sa capacité à tenir le job.)
Dans ce travail ingrat ("Depuis que j'ai commandé une coalition - sous entendu, c'est une vraie galère - j'admire beaucoup moins Napoléon", disait Foch.) il se montre à la fois efficace et diplomate, et si on peut critiquer certains de ses choix ou arbitrages (je pense à celui de Market Garden, "un pont trop loin", au détriment de l'avancée de Patton) il s'en acquitte avec un talent qui force l'admiration. Tiens, un moment crucial : je n'aurais pas aimé être à sa place lorsqu'il a parié sur une vague fenêtre météo entrevue pour ne décaler le débarquement que de 24 heures.
"Special thanks" de notre part, à nous Français, il met de côté, sans trop le lui dire, les consignes insensées de son président (Roosevelt) sur une occupation militaire - et un gouvernement militaire allié - de la France, et pave chaque fois qu'il le peut la route de De Gaulle, assurant ainsi au maximum de ses possibilités l'ordre et la démocratie dans la France libérée, ce qui n'allait pas de soi.
Il faut y ajouter la description que Beaumont fait de sa présidence. Je ne sais si elle fut si exemplaire, mais la formule "Truman a créé la CIA, Eisenhower a créé la NASA" a fait mouche chez moi.
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Dans cette catégorie des personnages en apparence un peu falots qui font de grandes choses, j'ai pensé à
Jenner, le médecin anglais qui est parti du constat de l'absence de variole chez les fermiers dont les vaches avaient contracté la vaccine (une affection de la peau qui touchait spécialement les pis) pour en tenter l'inoculation sur des jeunes gens, fournissant ainsi le premier vaccin contre la grande tueuse de l'époque. "Ne croyez pas, essayez !" Jenner a essayé.
(Cela sans connaissances biochimiques, et environ 80 ans avant que Pasteur identifie microbes et bactéries. C'est ainsi que Napoléon a fait vacciner - on disait "varioliser" - son fils le roi de Rome.)