J'ai évoqué dans mon premier post un câble diplomatique publié en 2011 par Wikileaks concernant la mise en place de l'or papier, c'est à dire la manipulation des prix de l'or via la création d'instruments financiers. En l'occurrence les tout premiers contrats
Futures, c'est à dire sur la production future d'or, instaurés le 31 décembre 1974. Suivront en 1982 les
Options, puis en 2003 les
ETF sur l'or.
Voici maintenant un autre document.
Il s'agit d'
un mémorandum rédigé le 3 juin 1975 par Arthur F. Burns, Président de la Federal Reserve Bank, adressé au Président Gérald Ford et qui apporte de nouveaux éléments sur la volonté de la Federal Reserve de contrôler le prix de l'or.
Le mémorandum était aussi adressé en copie à Henri Kissinger, et Alan Greenspan (président du Conseil des conseillers économiques auprès du Président Ford, et qui devint plus tard Président de la Federal Reserve de 1987 à 2006)
On peut trouver la traduction en français du mémorandum sur ce site :
http://www.larsschall.com/2012/06/06/exclusive-fed-memorandum-related-to-gold-price-suppression-in-french-and-german/La traduction a été effectuée en allemand et en français par l'association des contribuables allemands en 2012.
Le document avait été signalé pour la première fois en septembre 2009 sur le blog financier Zero Hedge :
http://www.zerohedge.com/article/smoking-gun-fed-controlling-goldLe site du GATA l'avait repris le lendemain :
http://www.gata.org/node/7839Puis mis en ligne une photocopie du document originel qui se trouve à la
Ford Presidential Library :
http://www.gata.org/files/FedArthurBurnsOnGold-6-03-1975.pdfVoici la côte du document :
White House Central Files, FI – Finance, FI 9 Monetary Systems, Box 23, Folder FI 9 1/16/75 – 6/30/75.:
Depuis sa création en 1998, le GATA, le Gold Anti-Trust Action Committee, documente et expose aux Etats-Unis la manipulation du prix de l'or depuis les années 70.
Plus les années passent et plus leurs preuves s'accumulent. On peut trouver leurs articles et documents ici
http://www.gata.org/taxonomy/term/21Pour se retrouver dans leur énorme documentation le moteur de recherche interne du site est bien utile.
Extrait du mémorandum :
La question cruciale à débattre est de savoir si les banques centrales et les gouvernements doivent être libres d’acheter de l’or, entre eux ou sur le marché privé, à des prix liés au marché. (Les prix sur le marché ont récemment été de l’ordre de 160 $ à 175 $ l’once, le prix officiel étant de 42.22 $ l’once.) Le Trésor est prêt à accorder plus de liberté pour ce genre de transactions. La Réserve Fédérale y est opposée.
Le point précis de la controverse est de savoir s’il faut permettre ou non aux gouvernements individuels d’augmenter leurs avoirs en or au-delà d’un plafond déterminé (les avoirs réels au 1er mai 1975, par exemple). Le Trésor est prêt à accepter, comme le préconise fermement le gouvernement français, qu’il n’y ait aucun plafond sur les avoirs en or d’un gouvernement individuel. La Réserve Fédérale estime qu’il est essentiel que chaque pays ait son plafond individuel et que les Etats-Unis ne devraient pas accepter de nouveaux arrangements internationaux sur l’or, à moins qu’ils n’y incluent de tels plafonds.L'association des contribuables allemand a fait traduire ce mémorandum pour contrer les déclarations du gouvernement allemand en 2012 concernant la question du stockage des réserves d'or de la RFA, en grande partie entreposées à Londres, New-York et Paris depuis l'après-guerre.
Certains commençaient à douter en Allemagne que le patrimoine national était bien en sécurité là-bas, et se demandaient si leur or n'avait pas été prêté aux bullions banks (les banques privées intermédiaires des banques centrales à la LBMA de Londres et au COMEX à New-York) pour maintenir le cours de l'or sous contrôle.
Pour comprendre leur inquiétude il me faut faire un apparté sur la situation contemporaine :
Il faut savoir que la Federal Reserve en 2007 d'abord, puis à nouveau en 2011, a refusé à une délégation allemande d'accéder aux barres d'or que la RFA lui avait confié !
Le Bundesrechnungshof, la Cour des Comptes fédérale allemande ayant contraint la Bundesbank à effectuer un audit de ses réserves d'or, le gouvernement allemand a finalement pris en 2012 la décision de rapatrier les réserves d'or de la RFA.
La demande a été signifiée aux Etats-Unis en 2012 puis à la France en 2013.
Le moment choisi par les autorités allemandes pour faire leur demande à la France montre le pragmatisme franchement brutal dont elles sont capables, ce qui devrait un peu dessiller les yeux aux apôtres du "couple" franco-allemand.
Figurez-vous que la Bundesbank a adressé sa demande à la France la semaine même des célébrations du cinquantenaire du traité d'amitié et de coopération franco-allemand de l'Elysée !!
Ca faisait des décennies que ces barres étaient entreposées à la Banque de France. Ca ne pouvait vraiment pas attendre un mois de plus !?
Article du 16 janvier 2013 dans le journal Le Monde
http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/01/16/l-allemagne-rapatrie-son-or-de-france-et-des-etats-unis_1817981_3234.html
On peut se demander cependant si c'était la première fois que cette demande était émise, et si l'attitude allemande, ce timing provocateur, ne s'expliquerait pas par un flou inquiétant dans la réponse française.
En France même, depuis la crise financière de 2008, au moins deux demandes d'audit des réserves d'or françaises de la Banque de France ont été adressées à l'institution. Elle n'y a donné aucune réponse.L'Allemagne est citée dans le mémorandum écrit par Arthur Burns.
Le passage est très intéressant et montre que la RFA du chancelier Schmidt combat les positions de son "ami" Français sur la monnaie, le Dollar et l'or :
J’ai conclu un accord secret par écrit avec la Bundesbank – approuvé par M. Schmidt – précisant que l’Allemagne n’achètera pas d’or, ni sur le marché ni d’un autre gouvernement, à un prix supérieur au prix officiel de 42,22 $ l’once.Après avoir été Président de la Federal Reserve de 1970 à 1978, Arthur Burns devint ambassadeur des Etats-Unis en RFA de 1981 à 1985.