Diviacus a écrit :
Le prix des matériaux est rarement le poste le plus important de dépenses dans le bâtiment. Le transport et la main d'œuvre représentent habituellement les plus gros postes. Et l'excavation de terre, sans les moyens mécaniques du XIXe siècle, n'est pas du tout négligeable.
Aujourd'hui. Pas autrefois.
J'ai un exemple concret d'un arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père qui s'est construit une maison de ville à la mode en 1783 dans un faubourg neuf.
Rien d'extraordinaire, même si évidemment, cette maison XVIIIème s. aujourd'hui nous paraît un bijou (elle fut remplacée dans les années 1950 par une barre d'immeuble en béton mais il y a des illustrations). Ce n'était pas un homme riche, même s'il était très indubitablement dans une frange aisée de la population: militaire en retraite et agriculteur, une petite ferme, qui existe toujours, qui serait bien incapable de nourrir une famille aujourd'hui. Son train de vie était le fruit de son travail.
Or, voici quel fut le financement de cette maison:
Il a coupé des châtaigniers qu'il possédait près de sa ferme.
La
moitié de ces châtaigniers a été utilisée pour la construction elle-même: charpente, parquets, boiseries.
L'
autre moitié a été vendue et avec cela il a payé le reste de la construction dont la main d'oeuvre.
Dans notre monde industrialisé, ce qui coûte cher, c'est la main d'oeuvre tandis que les matériaux sont accessibles.
Autrefois, c'est la main d'oeuvre qui est ce qu'il y a de plus courant et de moins cher.
Et la pierre, la terre, l'ardoise sont en fait de la main-d'oeuvre condensée, car elles nécessitent avant tout d'énormes manipulations.
Le bois en revanche est cher, la terre cuite également, car la consommation d'un four est telle que l'on peut dire qu'une tomette est en quelque sorte un concentré de bois. Idem pour le verre.
Dans ma jeunesse j'ai été guide de (petit) chateau, et c'était toujours le point le plus difficile à expliquer aux visiteurs: "mais comment donc des gens pouvaient être assez riches pour construire si grand, si haut"?
Ben justement, leurs revenus n'était pas outrageusement plus élevés que ceux de la population moyenne. C'est difficile pour nous de nous projeter.
En gros, aujourd'hui, si mon voisin a une maison deux fois plus grande que la mienne, je peux supputer qu'il a quatre fois plus de revenus que moi. S'il a du personnel à demeure, c'est carrément quelqu'un de très, très fortuné.
Alors que n'importe quel paysan du Cantal d'il y a 180 ans peut doubler la surface habitable de sa fermette et prendre une souillon à son service pour peu que la récolte soit bonne.