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Message Publié : 25 Août 2009 17:36 
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Polybe
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Geopolis a écrit :
* Oui pour le djihad international qui se réclame ouvertement des valeurs wahhabites, même quand il émane d'individus, de groupes et de courants à l'origine non wahhabites (comme les Frères musulmans ou les salafistes) mais qui ont ces dernières décennies calqué leurs valeurs religieuses sur celles des wahhabites.

Le djihad international (notamment "al Qaida") a souvent des vues très différentes des wahhabites et des salafistes, la preuve en est qu'Al Qaida a perpétré plusieurs attentats contre l'Arabie Saoudite "wahhabite".

Le wahhabisme et surtout le salafisme prônent un retour à un islam rigoureux, strictement monothéiste, plus proche de celui pratiqué par le Prophète et les salafs. Ils ne sont donc pas particulièrement "djihadistes" (même s'ils ne remettent pas en cause le djihad, qui a des sources dans le Coran et la Sunna du Prophète), mais ils sont pour une obéissance stricte aux règles islamiques du djihad (comme l'interdiction de frapper des femmes et des enfants), alors que des djihadistes comme Al Qaida semblent beaucoup moins soucieux de ces règles...
Al Qaida veut surtout frapper très fort et marquer les esprits (quels que soient les moyens et les libertés prises avec les règles islamiques), et elle a une haine démesurée de l'Amérique , alors que les wahhabites comme les salafistes sont beaucoup plus posés et prudents sur ces questions, craignant toujours d'outrepasser les règles établies par le Coran et la Sunna.


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Message Publié : 25 Août 2009 17:37 
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Eginhard
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Bonsoir,

Geopolis a écrit :

* Oui pour le djihad international qui se réclame ouvertement des valeurs wahhabites, même quand il émane d'individus, de groupes et de courants à l'origine non wahhabites (comme les Frères musulmans ou les salafistes) mais qui ont ces dernières décennies calqué leurs valeurs religieuses sur celles des wahhabites.

* Et c'est parce que l'influence du wahhabisme est si importante sur cet activisme qui attaque et menace tant d'individus et Etats à travers le monde (de Washington à Bali) qu'on devrait avoir du mal à l'ignorer de nos jours, même si je concède que ce fondamentalisme sunnite sera peut-être considéré comme une mode éphémère et mineure dans quelques siècles (sous réserve de son impact futur sur les musulmans).


La question est: faut il un traumatisme à la seconde guerre mondiale pour espérer un effacement du wahhabisme?

K


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Message Publié : 25 Août 2009 17:45 
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Polybe
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juste deux choses :

_Il y a eu un premier Royaume d'Arabie Saoudite au XVIII eme siecle , resultant d'une Alliance entre les Ibn Al Wahhab et les Ibn Saoud et la conquete du territoire par ceux ci . De 1916 a 1932 il y a eu une lutte entre les Ibn Saoud Wahabite et les Sharif Hashemite de la Mecque , descendant du Prophete , les Ibn Saoud Wahabite on donc usurpé le trone d'Arabie avec l'aide des Britannique .

_Pour ce qui est des emir du Quatar , du Koweit et des Emirats , non , ils ne sont pas Wahabites . ces trois pays là pratique l'Islam sunnite et se reclame de l'ecole Malekite , la meme ecole qui est majoritairement prtaiqué dans le Maghreb (Maroc, Algerie , Mauritanie et Tunisie et Lybie .)


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Message Publié : 25 Août 2009 18:22 
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Plutarque
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Citer :
ils ne sont pas Wahabites . ces trois pays là pratique l'Islam sunnite et se reclame de l'ecole Malekite


(Attention à ne pas mal entendre ce propos : comme l'a indiqué Géopolis, le wahhâbisme est un mouvement sunnite, hanbalite pour être plus précis, puisant dans les œuvres d'Ibn Taïmiya et de son disciple Ibn al-Qaiyîm.)

Citer :
La question est: faut il un traumatisme à la seconde guerre mondiale pour espérer un effacement du wahhabisme?


Voilà tout le problème : l'historien n'a pas à espérer l'effacement ou la préservation ("menace", "attaque", "épargne", etc.) de son objet. Il n'a pas non plus à le caricaturer en le réduisant à ses sous-produits ou en pratiquant un "à-peu-prisme" qui permet de mêler dans les mêmes mots tout ce qu'on peut, association qui conforte les analyses rapides et les disqualifications symboliques : wahhabisme = salafisme = djihadisme = terrorisme = extrémisme = fondamentalisme = Ben Laden = guerre civile algérienne = etc. Si ces mots doivent avoir un sens, alors il faut creuser un peu pour le définir (i.e. le distinguer de celui d'un autre mot). En l'occurrence, il suffit de se renseigner un peu pour savoir que les méchants wahhabites se caractérisent en général par une da'wa davantage tournée vers la piété et la mise en conformité des corps avec la Sunna, que vers le djihad (concept qui est encore un enjeu de luttes, comme un intervenant l'a justement fait remarquer).

(Pour ceux qui voudraient voir combien un mot peut faire l'objet d'usages fort différents, je vous renvoie à l'exemple - que j'avais trouvé - amusant de celui de "salaf-i-sme" : http://www.maison-islam.com/articles/?p=466 )

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"Pénétrer de présent la tradition elle-même: premier moyen de lui résister." (Lucien Febvre)


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Message Publié : 26 Août 2009 6:53 
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Polybe
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Inscription : 12 Sep 2007 15:16
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D'accord avec Julien_b.
¨
Pour mieux comprendre l'opposition entre djihadistes et salafistes:

L'argument des djihadistes est "la fin justifie les moyens".

Les salafistes leur répondent:
"En islam, la fin est légiférée, et les moyens sont légiférés".


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Message Publié : 26 Août 2009 7:12 
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Eginhard
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Bonjour,

Je sais que depuis l'aube des temps, le pouvoir ne se partage pas!
Donc d'un point de vu purement et exclusivement politique, il est normal qu'une organisation veuille l'effacement d'une autre, fusse telle très proche!

Puis, une loi, une sourate, un verset, une parabole, etc; ne sont que des mots donc interprétable à souhait! alors rien n'indique que dans le salafisme il n'y ait pas des tensions internes, car je ne connais aucune mouvance politique, religieuse, philosophique ou autres qui n'aient pas de querelle intestine.


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Message Publié : 26 Août 2009 11:26 
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Deux réflexions possibles :

1. De vos discussions, on pourrait déduire que le fondamentalisme religieux sunnite est une constance dans l'Histoire des Arabes musulman et je comprendrais alors qu'on ne mentionne pas spécialement ses récentes manifestations, comme la révolution wahhabite et le djihad international.

Par contre et dans ce cas, et puisque les événements cités par Al-Mutakaddam mentionnent la création du chiisme, il serait opportun d'évoquer le soufisme. Cet islam libéral aurait constitué une rupture notable dans le cadre d'un conservatisme sunnite généralisé et ne devant pas être spécialement relevé.

2. Mais il est aussi possible que les mentions du fondamentalisme sunnite et du soufisme soient gênants dans l'Histoire des Arabes musulmans :

- le fondamentalisme sunnite ne s'y mentionne pas parce qu'il écrit une Histoire-des-Arabes-musulmans dominante et parcellaire où il tait ses manifestations déplaisantes (ce qui suppose une mauvaise conscience de sa part, d'où les oublis de certains conflits et phénomènes considérés comme indignes ou honteux, tels ceux que je rappelais) ;

- et dont il évince le soufisme parce que le soufisme concurrence le fondamentalisme sunnite.


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Message Publié : 27 Août 2009 10:51 
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Plutarque
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Pour répondre un peu plus précisément au problème posé par Massinissa, peut-être serait-il intéressant que des gens vivant en pays arabes ou en connaissant le système éducatif, nous fournissent des programmes scolaires d'enseignement de l'histoire, ou des sommaires de grandes synthèses reconnues.

Par ailleurs, il serait bon de se rappeler que "les Arabes" est un pluriel bienvenu, qu'il faut encore découper en fonction de critères multiples, nationaux ou religieux certes, mais aussi professionnels, culturels et sociaux. Il faut distinguer entre la mémoire collective qui retient quelques grands découpages fondamentaux et qui est produite et entretenue par un ensemble de productions symboliques (ainsi de l'"irruption" de l'islam et de l'histoire de son Prophète, ou d'événements nationaux importants), et l'écriture et la connaissance d'autres faits ou périodes, qui sont surtout le fait de spécialistes.


Citer :
Donc d'un point de vue purement et exclusivement politique, il est normal qu'une organisation veuille l'effacement d'une autre, fusse telle très proche!


Je suis d'accord : c'est un point de vue purement et exclusivement politique. C'est un très mauvais point de vue en histoire ou en sociologie. La "manie du jugement" est le pire ennemi de l'historien, disait l'un de nos maîtres. La preuve par l'exemple dans cette discussion : on ne peut pas ré-écrire sérieusement l'histoire (autrement dit : les histoires) de peuples (le concept additionne déjà, en partie arbitrairement, des éléments fort différents) en se positionnant simplement sur sa réussite ou son déclin, surtout (parce que la manière de poser le problème n'est déjà pas bonne) en fonction de critères parfaitement subjectifs (sont-ils comme nous - comme nous imaginons être ? rationalistes-libertins-novateurs ou religieux-rigoristes-conservateurs ?).

Citer :
Puis, une loi, une sourate, un verset, une parabole, etc; ne sont que des mots donc interprétable à souhait!


Question terrible ! On peut penser que cette liberté est d'autant moins possible ou d'autant moins efficace qu'un groupe religieux ou politique est d'autant plus structuré. Ainsi, les interprétations, libres et philosophiques, qu'un Iqbal peut donner de certains versets du Coran sont possibles, mais ne passent pas dans le corps des spécialistes chargés de l'interprétation des sources de l'Islam (parce qu'il ne respecte pas les règles séculaires pour interpréter, parce qu'il n'appartient pas au corps en question, etc.) et donc dans le public de ceux qui en dépendent (les fidèles). Ce qui ne veut pas dire que rien ne peut changer...

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Message Publié : 27 Août 2009 11:48 
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Eginhard
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Bonjour,

Vous avez raison dans votre raisonnement Julien_b, l'historien pourrait quand même rappeler que dans le monde arabe, ce qui est présent en ce moment n'a pas toujours été et qu'il y a pas si longtemps les dogmes qui régnaient en force dans les grandes capitales arabes furent surtout un nationalisme de gauche (Syrie, Algérie, Libye, Egypte, Irak) et un nationalisme de droite (Maroc, Jordanie, la plupart des pays du golfe), en gros le monde arabe avait aussi son ossature de guerre froide.



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Message Publié : 27 Août 2009 13:15 
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Pierre de L'Estoile
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julien_b a écrit :
On peut penser que cette liberté est d'autant moins possible ou d'autant moins efficace qu'un groupe religieux ou politique est d'autant plus structuré

Je ne sais pas si vous parlez des religions en général ou bien de l'Islam en particulier. Il existe en tout cas un contre exemple assez frappant qui est celui de l'Eglise Catholique ! En effet la liberté de questionnement est extrêmement large et profonde ; le travail sur Vatican II mais celui de Trente et avant ceux du Latran en ont été la preuve.

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« Étudiez comme si vous deviez vivre toujours ; vivez comme si vous deviez mourir demain. » Isidore de Séville


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Message Publié : 27 Août 2009 17:36 
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Plutarque
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Inscription : 03 Mars 2008 20:02
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Isidore a écrit :
Je ne sais pas si vous parlez des religions en général ou bien de l'Islam en particulier. Il existe en tout cas un contre exemple assez frappant qui est celui de l'Eglise Catholique ! En effet la liberté de questionnement est extrêmement large et profonde ; le travail sur Vatican II mais celui de Trente et avant ceux du Latran en ont été la preuve.


C'est un énoncé général - une théorie désignée généralement par des concepts comme celui d'institutionnalisation ou de "path dependence". Mais, évidemment, il y a du changement, de l'histoire, et un corps de spécialistes ou son point de vue peuvent être renversés, marginalisés, dominés (ou l'inverse !) : en interne, par une révolution à l'intérieur du champ ; de l'extérieur, par l'organe politique. Cela dit, cette distinction est utile mais pas pleinement satisfaisante dans la mesure où ces deux éléments s'interpénètrent constamment. Pour le dire simplement : quand les conditions sociales changent, les dignitaires religieux traduisent dans leur propre "langage" ces changements. Un parti de "religieux modernistes" peut très bien devenir dominant i.e. imposer un nouveau discours, au diapason de la société (mais gardant tout de même ses spécificités). Ainsi, du discours sur la femme en Iran à la suite de la Révolution de 1979. Les discours de Shariati et de Khomeiny, notamment, y ont introduit des éléments forts peu légitimes religieusement (du point de vue du fiqh) auparavant : l'engagement social et politique des femmes, leur présence à la mosquée de l'Université le vendredi pour la prière, etc. Mais cette "révolution symbolique" ne peut s'opérer qu'à condition de justifier la légitimité de la nouvelle idéologie, ici, par une argumentation fondée sur les sources reconnues de l'Islam. Shariati s'appuie ainsi sur la figure de Fatima, la fille du Prophète. La révolution n'est pas totale, on devrait plutôt parler de révisions, dans la mesure où il ne s'agit nullement de renier la tradition, mais bien d'y revenir, de se réinscrire dans le pur islam (c'est la "réformation" des chrétiens de l'époque médiévale et moderne).

Il me semble que c'est Mohammed Arkoun qui insiste justement sur l'importance de l'herméneutique dans les "religions du Livre" ; cette herméneutique a toutefois des conditions sociales et historiques de production qui rendent compte de ses évolutions. Terrible question, ai-je dit : elle est en effet très compliquée puisqu'il s'agit, ni plus ni moins, que de rendre compte des changements symboliques, autrement dit des croyances (religieuses ou non).

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Message Publié : 28 Août 2009 12:55 
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Pierre de L'Estoile
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Merci Julien_b pour votre explication. Certes je suis d'accord avec la mécanique que vous expliquez mais elle me semble valable pour toute organisation dans le temps. Ainsi même dans un club sportif de quartier, il sera toujours fait référence à une figure tutélaire, à des symboles considérés comme relevant de la tradition quand il s'agira d'effectuer quelques changements profonds ou pas. C'est même le fondement du fonctionnement des sociétés primitives (Clastres) la référence aux anciens, aux fondements, aux traditions sert à préserver les équilibres, à justifier l'ordre établi.

Donc oui "techniquement", mais le pouvoir explicatif, pour reprendre un terme de statisticien, de cette approche me paraît être très différent selon les religions. Ainsi quand on lit aujourd'hui les écrits de Vatimo, Girard , on n'est pas (ou plus ) tant que cela dans la "réformation". Leur réflexion est certes inscrite dans un cadre mais ce cadre est bien lâche et bien large ! Et ces réflexions, je pense notamment à "Christianisme et modernité" de Vatimo et Girard paru chez Champs Flammarion au printemps, sont souvent hardies et bien peu ... "canoniques" même au regard de traditions plus profondes si souvent rappelées quand il s'agir de justifier les révolutions !

Et j'irai même jusqu'à dire que les révélations religieuse ne peuvent se lire qu'en fonction des événements qui l'ont précédé. Un "path dependance" universel... celui de l'histoire des hommes...

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Message Publié : 29 Sep 2009 16:24 
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Plutarque
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Isidore a écrit :
Merci Julien_b pour votre explication. Certes je suis d'accord avec la mécanique que vous expliquez mais elle me semble valable pour toute organisation dans le temps. Ainsi même dans un club sportif de quartier, il sera toujours fait référence à une figure tutélaire, à des symboles considérés comme relevant de la tradition quand il s'agira d'effectuer quelques changements profonds ou pas. C'est même le fondement du fonctionnement des sociétés primitives (Clastres) la référence aux anciens, aux fondements, aux traditions sert à préserver les équilibres, à justifier l'ordre établi.

Donc oui "techniquement", mais le pouvoir explicatif, pour reprendre un terme de statisticien, de cette approche me paraît être très différent selon les religions. Ainsi quand on lit aujourd'hui les écrits de Vatimo, Girard , on n'est pas (ou plus ) tant que cela dans la "réformation". Leur réflexion est certes inscrite dans un cadre mais ce cadre est bien lâche et bien large ! Et ces réflexions, je pense notamment à "Christianisme et modernité" de Vatimo et Girard paru chez Champs Flammarion au printemps, sont souvent hardies et bien peu ... "canoniques" même au regard de traditions plus profondes si souvent rappelées quand il s'agir de justifier les révolutions !

Et j'irai même jusqu'à dire que les révélations religieuse ne peuvent se lire qu'en fonction des événements qui l'ont précédé. Un "path dependance" universel... celui de l'histoire des hommes...


Bien entendu, mais les hommes ont sans cesse besoin qu'on le leur rappelle ! Et certains s'acharnent à montrer comment cela se passe dans les faits, dans les têtes, dans les institutions, dans les outils... Le travail de l'historien n'est-il pas de faire ce travail de contextualisation mais sur un objet précisément situé et découpé, avec donc une précision accrue et une complexité plus éprouvante ? Je ferme la parenthèse théorique.

Vous notez justement que la marge que l'on peut prendre vis-à-vis de l'institution varie grandement, ce que vous rapportez à la différence de religion. Je la rapporterais davantage à la position occupée par rapport à l'institution (en son cœur ou en ses marges, en position de pouvoir ou en position dominée) et au pouvoir dont elle dispose pour imposer ses règles, ses croyances, ses pratiques (reconnaissance officielle de l'Etat ou non, proportion de croyants dans la société d'appartenance, densité des liens par lesquels la population ou l'élite est en relation avec l'institution...). Ne connaissant pas bien le champ de l'Eglise catholique, je ne saurais vous répondre sur les cas individuels que vous évoquez et je vous laisse, ici, tester la solidité de mes hypothèses. Elles me semblent toutefois bien fonctionner dans le cas du champ religieux de l'islam.

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Message Publié : 29 Sep 2009 17:23 
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Salluste
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calame a écrit :
Formulons la question à l'envers, peut-être... Peut on parler d'une "nation arabe" avant l'invasion Saljukide ? Les populations étaient en majorité non-arabes, déjà présentes avant la conquête. Au Maghreb, une très grande proportion de berbères, loin d'être tous islamisés avant le XIXe siècle, en Egypte des Coptes, en Iran des persans et des Turcs... Comme Sami, je préfère largement parler de monde islamique, c'est à dire d'une zone dominée par des dirigeants musulmans, issus, au moins au début, des armées Arabes (pour les Umayyades et les Abbasides), mais qui recouvre des réalités variables. D'ailleurs, en Egypte, depuis le milieu du IXe siècle, ce sont des Turcs qui dominent (Tulunides, Ikhshidides), et pourtant, le Caire est un des plus grands centres scientifiques et culturels de son époque ! Pour la Cordoue du XIIe siècle, combien y-avait-il d' Arabes, par rapport aux populations autochtones ?
D'ailleurs, si vous estimer que les Turcs mettent à bas la "civilisation arabe", il fut remonter plus tôt, aux invasions buyides : n'oubliez pas qu'à partir de 945, les Abbasides ont été mis sous tutelle par cette dynastie, et l'arrivée des Saljukides a parfois pu être vue plus comme une libération du calife abbaside.

Quant à la disparition de savant "hérétiques", je trouve ça un peu tranché, mais je serais bien en peine de vous donner des contre-exemples sans quelques recherches. Ceci dit, on peut quand même citer l'importance des Juifs dans la médecine au XIIe siècle, illustrée en particulier par le célèbre Maïmonide, médecin de Saladin. Pensons aussi à Avicenne, savant protégés par l'émir buyide Samsam al-Dawla...

Citer :
(En parlant du Khorasan et de l'influence des Turcs sur le monde arabe, ce sont des Turcs qui, moins d'un siècle et demi après avoir déclenché la première croisade, déchaînent la fureur mongole sur le Moyen-Orient, l'Europe et l'Inde. C'est la même morgue et la même intransigeance de deux dirigeants turcs qui attirent deux "fléaux" (tout court ;) ) sur le monde arabe.)

Certes, les invasions mongoles furent très très destructrices. Mais à partir du milieu du XIIIe siècle (quelques décennies après la prise de Baghdad en 1258), on assiste en Iran à un foisonnement des sciences, avec construction de bibliothèques et d'observatoires astronomiques (celui d'Ulugh Beg à Samarkand, notamment), avec des savants de tous horizons (venant du Proche Orient, persans, ou étrangers au monde islamique, et de confessions variées). Ni noir ni blanc, donc :wink:

Citer :
On s'en tient là au type de développement intellectuel que permettait une Europe ultra-religieuse au Moyen Âge.

Oui, mais avant ou après l'invasion Saljukide itou. Et on a vraiment trop tendance à considérer le moyen-âge occidental comme une période sombre : bien sûr, les sciences s'y sont développées, en partie grâce aux apports du monde islamique.
Citer :
Les savants arabes nés jusqu'à l'arrivée des Seldjoukides innovaient sortaient des sentiers battus. On était loin du recensement cartographique et historique ou de la construction d'écoles et de temples religieux fermant les esprits aux hérésies parfois fécondes.

Auriez-vous des exemples de ces innovaations, que l'on ne retrouverait pas après l'invasion saljukide ?
Parce que je ne suis pas sûre que la religion n'ait pas eu une énorme influence avant l'invasion saljukide. Dans les arts par exemple (oui, je travaille sur l'histoire de l'art :mrgreen: ), on assiste au IXe siècle à une absence totale (ou presque) de représentation figurée, ce qui ne se reproduira jamais, sauf dans les pays maghrébins, et ceci, probablement en raison de religieux rigoristes.

Le construction des madrasa sous les Saljukides était sans doute fortement liée à leur sunnisme, mais elle a aussi permis une diffusion exceptionnelle des sciences.



Les populations non-arabes du monde arabe n'ont jamais été un fardeau , bien au contraire..les conflits du 21ième siècle N'ont rien avoir avec la situation d'il y a des siècles...il y a eu rarement des emeutes de populations dans le monde arabe...les plus grandes ont été déclanchés par des éléments de crises ou des éléments venus de l'exterieur (notament par ex l'expansion des tribus turques venus d'Asie centrale...qui ont ravagés Baghdad & La Perse).


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Message Publié : 29 Sep 2009 17:23 
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Salluste
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calame a écrit :
Formulons la question à l'envers, peut-être... Peut on parler d'une "nation arabe" avant l'invasion Saljukide ? Les populations étaient en majorité non-arabes, déjà présentes avant la conquête. Au Maghreb, une très grande proportion de berbères, loin d'être tous islamisés avant le XIXe siècle, en Egypte des Coptes, en Iran des persans et des Turcs... Comme Sami, je préfère largement parler de monde islamique, c'est à dire d'une zone dominée par des dirigeants musulmans, issus, au moins au début, des armées Arabes (pour les Umayyades et les Abbasides), mais qui recouvre des réalités variables. D'ailleurs, en Egypte, depuis le milieu du IXe siècle, ce sont des Turcs qui dominent (Tulunides, Ikhshidides), et pourtant, le Caire est un des plus grands centres scientifiques et culturels de son époque ! Pour la Cordoue du XIIe siècle, combien y-avait-il d' Arabes, par rapport aux populations autochtones ?
D'ailleurs, si vous estimer que les Turcs mettent à bas la "civilisation arabe", il fut remonter plus tôt, aux invasions buyides : n'oubliez pas qu'à partir de 945, les Abbasides ont été mis sous tutelle par cette dynastie, et l'arrivée des Saljukides a parfois pu être vue plus comme une libération du calife abbaside.

Quant à la disparition de savant "hérétiques", je trouve ça un peu tranché, mais je serais bien en peine de vous donner des contre-exemples sans quelques recherches. Ceci dit, on peut quand même citer l'importance des Juifs dans la médecine au XIIe siècle, illustrée en particulier par le célèbre Maïmonide, médecin de Saladin. Pensons aussi à Avicenne, savant protégés par l'émir buyide Samsam al-Dawla...

Citer :
(En parlant du Khorasan et de l'influence des Turcs sur le monde arabe, ce sont des Turcs qui, moins d'un siècle et demi après avoir déclenché la première croisade, déchaînent la fureur mongole sur le Moyen-Orient, l'Europe et l'Inde. C'est la même morgue et la même intransigeance de deux dirigeants turcs qui attirent deux "fléaux" (tout court ;) ) sur le monde arabe.)

Certes, les invasions mongoles furent très très destructrices. Mais à partir du milieu du XIIIe siècle (quelques décennies après la prise de Baghdad en 1258), on assiste en Iran à un foisonnement des sciences, avec construction de bibliothèques et d'observatoires astronomiques (celui d'Ulugh Beg à Samarkand, notamment), avec des savants de tous horizons (venant du Proche Orient, persans, ou étrangers au monde islamique, et de confessions variées). Ni noir ni blanc, donc :wink:

Citer :
On s'en tient là au type de développement intellectuel que permettait une Europe ultra-religieuse au Moyen Âge.

Oui, mais avant ou après l'invasion Saljukide itou. Et on a vraiment trop tendance à considérer le moyen-âge occidental comme une période sombre : bien sûr, les sciences s'y sont développées, en partie grâce aux apports du monde islamique.
Citer :
Les savants arabes nés jusqu'à l'arrivée des Seldjoukides innovaient sortaient des sentiers battus. On était loin du recensement cartographique et historique ou de la construction d'écoles et de temples religieux fermant les esprits aux hérésies parfois fécondes.

Auriez-vous des exemples de ces innovaations, que l'on ne retrouverait pas après l'invasion saljukide ?
Parce que je ne suis pas sûre que la religion n'ait pas eu une énorme influence avant l'invasion saljukide. Dans les arts par exemple (oui, je travaille sur l'histoire de l'art :mrgreen: ), on assiste au IXe siècle à une absence totale (ou presque) de représentation figurée, ce qui ne se reproduira jamais, sauf dans les pays maghrébins, et ceci, probablement en raison de religieux rigoristes.

Le construction des madrasa sous les Saljukides était sans doute fortement liée à leur sunnisme, mais elle a aussi permis une diffusion exceptionnelle des sciences.



Les populations non-arabes du monde arabe n'ont jamais été un fardeau , bien au contraire..les conflits du 21ième siècle N'ont rien avoir avec la situation d'il y a des siècles...il y a eu rarement des emeutes de populations dans le monde arabe...les plus grandes ont été déclanchés par des éléments de crises ou des éléments venus de l'exterieur (notament par ex l'expansion des tribus turques venus d'Asie centrale...qui ont ravagés Baghdad & La Perse).


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