Champollion a écrit :
Je pense donc que Gisla étant fille de Charlemagne, les dialectes que nous entendons dans la série sont des dialectes soit bas-allemands (dont peut être le vieux bas franconien ?) soit haut-Allemands pour la famille de Charlemagne. A la cour devait se parler une des premières formes de l'ancien français (qui apparait au 9ème siècle donc sous Charlemagne). Bref celui qu'on entend dans l'extrait n'est pas le français qu'on lit dans la "Séquence de sainte Eulalie" !
Ce dont je suis sûr c'est pour les dialectes francs, là le mystère est éclaircit mais ici.... N'est ce pas de la langue d'oïl ? Mais ça ne fait pas IXème, on ne retrouve pas trop la langue de la "Séquence de sainte Eulalie"
Á la cour de Charlemagne, entre et parmi les "élites" nobles, cléricales, artistiques ou "intellectuelles" qui la fréquentaient, l´on usait du
latin classique comme langue véhiculaire. Ce qu´on pourrait appeler "ancien français" n´apparaìt que bien plus tard, quelques siècles après vers le XIIe (exemple la chanson de geste). Â l´époque de Charlemagne, avec son règne et la "renaissance intellectuelle" qui l´accompagne on en est justement à constater que le "bas peuple" (dont les guerriers de base et les ouailles dans les églises composent la majorité) ne comprend plus vraiment le latin et ne s´exprime plus, au quotidien, que dans leurs dialectes (francorum et Tudescum) dérivés du
latin vulgaire, soit ce qu´on pourrait peut-ètre qualifier à ce moment précis et encore comme du "bas-latin vulgaire" ou "proto-roman".
Nota bene: le proto-roman tout comme le roman ne sont pas des langues en soi mais des ensembles dialectaux, ensembles qui ne se limitent et limiteront pas à ces deux variantes francorum et tedescum mais s´étendent et s´étendront sur tout l´espace territorial de l´ex-empire romain et donneront naissance aux différentes langues d´oil et d´oc sur le territoire aujourd´hui français, aux ibéro-romanes et italo-romanes dans les péninsules espagnole et italienne etc...
Almayrac a écrit :
Claude de Turin, évêque de cette cité entre 816 et 827, décrivaient les différentes « nations » parlant la langue latine :
Citer :
Bien que la langue latine soit une, elle comprend plusieurs nations en son sein, telles que celles bien connues de nos jours que sont les Francs
(le fameux Roman qui regroupe la langue romane d'oil mais aussi Provençal, auvergnat et Bourguignon.),
Citer :
les Gaulois
(je pense qu'il parle du Gallo dialecte celto-latin de bretagne),
Citer :
les Italiens (appelés aussi Romains), les Lombards, et les Espagnols
(le castillan et le catalan sont indiférentiés semble-t-il? ,
Citer :
les Africains
(Cela n’était pas une erreur, puisque des locuteurs d’une langue latine existaient toujours sur le sol de la Tunisie actuelle, appelée province d’Afrique sous l’Empire romain, au XIIe et au XIVe siècles.)
Citer :
les Asturiens
(intermédiaire entre portugais et castillan)
Citer :
et les Gascons
(Vascones un mélange Latin, Basque, et de Wisigoth).
bref il semble qu'à l'époque la langue d'oc n'existe pas encore, que le roman est parlé sur tout le territoire Franc occidental sauf l'aquitaine ou c'est plus le basque qui domine et sur les marches de bretagne ou c'est le Gallo.
Lorsque Claude de Turin dénombre ces "nations" parlant "la langue latine", dans son esprit de lettré, pour son époque et ici par écrit, il le fait pour porter à connaissance en termes "politiques" ce qui constitue "la latinité" (cad les nations dont les sphères de Pouvoir et Savoir s´expriment tout comme lui en latin classique) et non linguistique pour répertorier et mentionner les différents "dialectes vulgaires" qu´utilisent ces peuples ou nations composant la latinité.
PS: - Pour ce qui est des francs: le "Roman" n´est pas une langue mais un ensemble dialectal (voir plus haut) et la "langue d´oil" (terme-concept créé par Dante en 1304, les linguistes préférant parler "Des Langues d´ Oïl" ) ne regroupe en son sein ni le Provençal ni l´Auvergnat.
- Pour les "Gaulois": Le gallo n´apparaitra que bien après Claude de Turin qui lorsquïl cite cette "nation" se réfère bien sur aux habitants et entité politique occupant et dominant les ex-provinces romaines des Gaules.
- Pour les "italiens" et les Lombards : Idem que pour les gaulois, c´est sont des "appelations-référence" géo-politiques.
- Les Espagnols: ce sont les hispaniques des marches carolingiennes. Castille, Catalogne, castillan, catalan n´existent pas à son époque.
- Les Africains: l¨Afrique du nord après la chute de l´empire romain d´occident (et avant la conquête arabe du VIIIe s. ) est passée entre les mains des Vandales (dont les élites pratiquent aussi le latin) puis de Byzance (puissance de langue latino-grecque).
- Les "Asturiens": ce sont les ressortissants et sujets du royaume asture d´Hispanie, et la "proto-langue" (plutôt "parler vulgaire") qu´ïls pratiquent au quotidien entre eux est un dialecte roman mais aucunement "intermédiaire" entre portugais et castillan (puisque les deux entités politiques des royaumes de Castille et Portugal n´ont encore vu le jour et que le territoire que ces deux royaumes occuperont, ainsi que les personnes/peuples qui l´occupent, sont depuis l´an 711 sous domination arabo-musulmane).
- Les Gascons: ce sont les Vascons (ceux mèmes qui attaquent l´arriére garde de l`armée carolingienne menée par Roland dans les pyrénnés...) qui s´exprimaient certainement en basque de l´époque car ils sont toujours restés très indépendants des différents pouvoirs (qu´ils soient romains ou wisigothiques) et rétifs à l´usage de leurs langues.
Pour finir, éffectivement ni
LES langues d´Oc n´existaient à cette époque, ni le roman n´est parlé en tant que langue (puisque ce n´en est pas une), ni le gallo est parlé dans les marches bretonnes (puisq´itou que les langues d´oc ou oïl il n´existe pas davantage á cette époque).
Mab an tourc'h a écrit :
Je pense que par "francs" il entendait les descendants des anciens locuteurs de langues germaniques. Et par gaulois les locuteurs de roman ou plutôt "gallo-roman" (qui donneront langues d'Oïl et d'Oc).
Cela semble être une division sociale : latin des "francs" = parler de l'élite, latin des "gaulois" = roman populaire. Non ?
(Le concept de langue gallèse n'apparaît que très tardivement en réalité (XV ou XVI), dans la Bretagne de cette époque il n'y a que les bretonnants (sur les trois quarts du territoire) et les locuteurs de roman (à l'est de Rennes/Nantes), la langue bretonne n'a alors pas encore entamé son recul. Le gallo n'est pas un créole brito-roman, pour des raisons sociologiques il n'y a que très peu d'emprunts lexicaux au breton, et reste très semblable au mayennais ou aux autres langues de l'Ouest.).
Les autres catégories semblent être un mélange de frontières politiques et linguistiques. Il était déja bien difficile de "trancher" des parts dans le continuum linguistique roman (une vidéo à propos de ce dernier:
https://www.youtube.com/v/IY4ONx7QQhc) !
En raison des différentes considérations que j expose ci- haut je ne peux qu´être globalement d´accord avec vous Mab an tourc´h.
Almayrac a écrit :
Mab an tourc'h a écrit :
Cela semble être une division sociale : latin des "francs" = parler de l'élite, latin des "gaulois" = roman populaire. Non ?
En 820 pour un évèque de Milan ça me parait douteux. Sous les Mérovingiens j'aurais dit oui mais l'élite Carolingienne que rencontre l'évèque en Italie vient du nord et parle Tudesque donc non-roman....
En tout cas la Reine Gisla fait partie de l'élite si c'est une fille de Charles le chauve. bon il n'a pas eu de fille appelé comme cela. On est au siège de Paris de 845 elle à 18 ans. Son enfance entre 827 et 832 se passe plutot à Worms ou en Alsace ou son père est duc d'Alémanie, elle apprend à parler en Tudesque ou en alsacien.
Les élites en 820, dont les évêques font partie, s´expriment usuellement entre eux, et en tous cas par écrit, en Latin classique (devenu le latin d´église), bien qu´elles sachent toutes manier à l´oral un ou plusieurs des dialectes proto-romans en usage dans leurs régions d´origine.
Par ailleurs, Almayrac, parler d´alsacien au IXe. siècle est totalement anachronique
Cordialement ,