Darwin1859 a écrit :
Arendt est là une politologue davantage que philosophe, "Les Origines du Totalitarisme" est le premier essai définissant et retraçant l'histoire des origines du totalitarisme depuis le 19es.
Vous prêchez une convaincue mais relisez en amont... Déjà évoquer Sémelin fut un grand pas sur certain(s) sujet(s).
Citer :
Furet parle de "dictature personnelle", Gauchet parle d'une "dictature des douze", où l'ascendant de Robespierre "est incontestable". ... “Au sein du Comité, les événements intérieurs de l’hiver et les deux épurations des hébertistes et des dantonistes ont définitivement tourné la page d’un exécutif collégial : c’est Robespierre, en fait, le chef du gouvernement de la République. (...) On peut le dire mieux en vocabulaire monarchique, à condition de substituer « révolution » à « royaume » : l’Incorruptible a fini par incarner la Révolution.”
https://www.youtube.com/v/PHcJ_95WgNwet d'un, c'est fait.
Je suis toujours un peu ahurie que ceci apparaisse comme une "découverte". Robespierre a été "mené" à ce stade par ses amis comme ses ennemis. C'est le besoin (je songe à Obligi) de se trouver une "figure", une "représentation" de la Révolution. Et là, on peut reprendre l'approche de "l'Etre suprême" : c'est un besoin, il faut une représentation qui soit/s'inscrive dans un absolu et là, l'Etre suprême, c'était un peu court. Et qui serait le "pape" à venir ? Ce fut l'erreur.
Une constante : la hiérarchie reste verticale. On peut mettre les mots que l'on veut "dictature de ceci ou cela" et même du "peuple" si ceci peut lui faire plaisir, il n'en reste pas moins que le pouvoir réel/temporel est confisqué par une collégialité/un triumvirat/un seul etc. Il est préférable de la jouer collégiale (et puis on est étonné d'avoir "réussi",
on est encore au stade de l'ébahissement, du tout nouveau, des idéaux) -un peu comme en amour au début-, après on dégraisse.
Ajoutez là-dessus une ou deux figures "tutélaires" et le tour est joué pour la "masse".
Ce n'est jamais qu'un phénomène créé non par la raison/vertu mais par une parodie. On se heurte très vite au pragmatique et là, les mots ne sonnent plus de la même manière, les actes s'adaptent et c'est l'effet papillon...
Citer :
“Ce singulier dictateur était complètement inconscient d’en être un et s’indignait même que l’on puisse le tenir pour tel. Cette étrangeté n’a pas échappé à certains observateurs de l’époque.
Bien sûr. Mais c'est déjà faire entrer un paramètre nouveau : celui de l'introspection (de Robespierre) et de la vision de son entourage et là on n'avance sur des oeufs. On touche à la psychologie d'un personnage et sa place. D'où mon interrogation : quid de Robespierre et de la "normalité" ? Danton était aussi "normal" mais d'une "normalité" estimée différente puisqu'on est arrivé à s'en défaire... Alors ? Où est le problème ? Deux hommes, deux logiciels. Une des différences est que Danton, ceci s'inscrit dans son "logiciel" n'a pas vu venir le "truc" parce-qu'il avait soudain un temps de retard : celui du balayage d'Hébert (et un certain rapport à sa propre popularité/assise etc.).
Robespierre ne pouvait comprendre le mot "tyran" parce-que sa définition personnelle du "tyran" était restée celle du roi, les autres étaient des "contre révolutionnaires" etc. Chaque "déviance" ayant un mot et un seul, Robespierre pouvait entendre/comprendre la superposition mais lui expliquer qu'un contre-révolutionnaire n'était pas forcément ou un "tyran en puissance" ou "un traître à la vertu", là ça coince (son esprit ne peut pas). D'où ma difficulté à le placer comme un théoricien.
Citer :
Un article étonnant de pénétration
L'expression est parlante. L'altérité peut se sentir "terrorisée" ou "tyrannisée" par un silence, tout dépend de qui vient ce silence. C'est tout. Un fois le personnage posé, un enchaînement des faits, une collégialité "marquée", c'est plié !
Il suffit d'un peu se pencher sur le 9 Thermidor. Robespierre avait été absent, cette absence -silence- a été la source de supputations multiples et comme souvent dans ce cas, les pires. Alors déjà, chacun a numéroté ses abattis ; lorsque le quidam revient (on a tiré les leçons de ce que fut le
silence obligatoire de Danton pour son "procès") : surtout ne pas laisser parler l'homme, c'est fichu...
Robespierre avait obtenu -conscient ou non peu importe- une sorte de communication à la "pile je gagne, face tu perds". Vu la période, ses convulsions, ses craintes, ses attentes -le tout fondé ou pas/plus- et ce qu'engendrent la terreur/la Terreur/la justice par délation etc., la France était arrivée à un attentisme, plongée qu'elle était à savoir l'image que renvoyait chacun au voisin.
Jerôme a écrit :
« Bien que les dictatures fascistes soient un phénomène historique nouveau ... son esprit laïc, son nationalisme et sa démo- cratie de masse, trois éléments étroitement liés du point de vue de leur origine idéolo- gique».
Le problème est que ce mot "dictature" qui était un choix par des représentants, choix s'inscrivant dans une légalité (même si on avait pu apprécier combien la captation du pouvoir était aisée en ces moments), l'erreur a été -lors de la continuation de l'analyse de ce phénomène/choix et de ses dérives- de poser des adjectifs : fasciste etc. dont la connotation biaise l'approche, nous renvoyant à des "figures/visages" et là, notre appréhension des choses est impactée/biaisée. Comme l'évoquait Pascal : "Vétrité au-delà des Pyrénées, erreur au-deça...".
Je pense que les trois exemples donnés qui feraient la différence ne tiennent pas la route : esprit laïc, nationalisme, démocratie de masse.
Je suis comme vous : je ne crois pas à l'esprit laïc, déjà la construction de l'expression avec "esprit" en dit long. Alors oui lorsque l'on met le bon mot : anticlérical. Et la nuance est grande. Déjà aussi vaste que ce qu'un "esprit" peut embrasser alors vous démultipliez par le nombre d'esprits, la qualité, le niveau, le vécu, le personnel etc.
Citer :
D abord parce que , à long terme, Robespierre et ses amis rêvaient d une société libérale de petits propriétaires paisibles. Certes dans cette société l'Etat aurait dominé l Ecole et la religion. Mais pas dans l'idée consciente et explicite d en faire des instruments de contrôle social.
Ceci n'engage que moi et ce n'est pas un jugement mais je pense que Robespierre avait un logiciel qui se plaisait voire se complaisait tout de même à la "vigilance" -disons le comme ceci-... De vigilance à hypervigilance, il n'y a qu'un pas et comment entretenir ce réseau ? Déjà avec la mise en mode "normalité" de la délation, plus de liberté -individuelle ceci faisait longtemps qu'elle était fossoyée- mais même collégiale : on ne pouvait arriver nulle part dans cette ambiance...
Citer :
Ensuite, à court terme, la Terreur n est pas issue d un plan d ensemble, bien Préparé et bien exécuté. Il s agirait plutôt, à mon avis, de l'initiative spontanée de la plèbe parisienne (les sans culottes) élargie et judiciarisée par des conventionnels aux abois, eux mêmes terrifiés par la possible victoire des coalisés et des diverses révoltes intérieures.
C'est la terreur (non commun) d'un maximum (et là il faut décortiquer le comment, la diffusion etc.) qui a amené l'évidence de la Terreur. Comme il était difficile d'aller plus loin et bien on en arrive à un paradoxe : les "meneurs" d'une minorité ayant le pouvoir se "suicident" politiquement et pas que politiquement pour certains...
Il y a encore peu, on a vu des suicides politiques dus à des personnalités s'accrochant comme des berniques à des évidences qu'elles ne voulaient pas voir et ce, à tous niveaux, de tous côtés et depuis la nuit des temps.
.