Bonjour à tous.
Bon il y a beaucoup de messages à lire …
OK pour Jérusalem, je me suis mal exprimé, qui existait bien en tant que ville … nous trouvons ce nom dans les textes anciens … dont ceux d’Ebla (2ième moitié du III millénaires) et en Egypte les «
textes d’extractions » (19/18 siècle).
Je recommence … en m'appliquant
Tout cela est fort compliqué … aux complexités de compréhension de la Bible on ajoute la complexité des écrits égyptiens … nous voulons/essayons de comprendre une « histoire » biblique plus sublimée qu’historique par des écrits très souvent de seconde (voire de troisième) main.
Tous écrivent disons, pour faire simple, entre le V et le III siècle … et relatent, pour s’en tenir à Moïse/Exode, des faits censés se dérouler vers 1500 avant JC … soit donc, en gros, un siècle avant que les différents historiens bibliques/égyptiens mettent sous écrit leur version des « faits ».
Il est indéniable que « l’histoire » qu’ils relatent est largement teintée de l’odeur de leur temps … et de la finalité de leurs écrits … c’est donc cela qu’il faut d’abord appréhender.
Laissons tomber le fait de vouloir identifier Moïse à tel ou tel … je pense qu’il y a à boire et à manger dans toutes les hypothèses soulevées … seul ce qui nécessite investigation c’est la saga qui lui est attribuée.
L’important, à mon sens, est de cadrer notre recherche …
a) quel est la situation des juifs en Judée à partir du retour de l’Exil à Babylone,
b) quel est la situation des juifs en Egypte à partir du Vième siècle av JC ???
c) traditions égyptiennes concernant les associations de termes … « juifs », « lépreux », « envahisseurs », « expulsion » etc
d) parallélisme Hécatée et Esdras-Néhéie,
e) existe-t-il un modèle scripturaire, ancien donc avant le Vième siècle, montrant une « expulsion » à partir de l’Egypte … vers la Palestine que ce soit en Canaan voire en Judée,
f) quid de l’origine des juifs vue par les différentes traditions,
A) L’époque Perse, qui suit donc le retour des Exilés de Babylone, par sa stabilité … absence de guerre pendant une longue durée … donne les conditions favorables politico-religieuses dans lesquelles le Judaïsme s’est ensuite développé … c’est à partir de ce moment que l’écriture de l’AT (et donc l’histoire du peuple d’Israël) va commencer … bien que des récits notamment « prophétiques/oracles » existaient avant.
Les textes d’Esdras/Néhémie sont de l’époque 400 av JC … l’Exode dans sa version finale est postérieure à cette date … comme je l’ai signalé l’Exode est un remake légendaire du retour, réel, de Babylone … et nous pouvons dire que Moïse est aussi un double d’Esdras … à la Loi donnée au peuple par Moïse/Esdras correspond la Loi donnée à Moïse par Dieu.
B) Les Hébreux/Cananéens en Egypte provenaient de différentes causes (famine, déportation suite à des conquêtes militaires etc) … il devait aussi y en avoir en tant que mercenaires aux coté des différents conquérants à l’assaut de l’Egypte … tout ce petit monde devait se retrouver/regrouper au fil du temps notamment dans la colonie d’Eléphantine très active comme le témoigne ce
papyrusCe papyrus prouve, notamment, qu’à la date de 407 av JC (il y a plusieurs papyrus araméens de cette communauté datés du IV siècle) :
1) qu’il y a plusieurs références à Esdras-Jérémie … via le nom de «
Bagoti/Bigvai », de même avec la mention «
le Dieu des cieux » et le nom de «
Sanballat »,
2) qu’il y a, pour le moins, des animosités entre Egyptiens et juifs … par leur dieux/Dieu interposés … puisqu’il est question de détruire/vandaliser/piller le temple de Yahu/Yahwé de la «
forteresse de Yeb » … cette dernière étant construite, sans précision de date, avant la campagne de Cambyse en Egypte en 529-522 av JC,
3) si les Perses laissent intact cette forteresse, contrairement aux autres consacrées aux dieux Egyptiens, c’est bien en tant que remerciement/cadeaux pour cette communauté … et que cette dernière l’a donc bien aidé lors de sa campagne d’Egypte.
De ceci nous pouvons déduire :
Que dés le IV, voire bien avant, la rivalité entre Egyptiens et Hébreux/juifs … trouve sa justification d’une part par le fait que nous trouvons les habitants d’Eléphantine du coté du conquérant Perse … et d’autre part par dieux/Dieu interposés montrant que le culte/coutume des uns et des autres étaient pointés du doigt.
C) A partir de quel moment la thématique littéraire qui consiste à associer un ou plusieurs des termes … hébreux, lépreux, envahisseurs venus d’Asie, expulsion d’Egypte etc etc … c-à-d à associer le thème d’expulsion/exode à celui de l’anti-judaïsme sous-jacent … c’est’elle imposée ???
Est-ce une thématique purement Egyptienne … sorte de réaction des auteurs Egyptiens par l’utilisation à des fins polémique du récit de l’Exode en gestation chez les auteurs Juifs … ou inversement ???
C’est le thème de Manéthon, mais non pas exactement celui d’Hécatée, qui fait l’association «
lépreux » et «
juifs » … et s’il faut donc mentionner une date nous pouvons retenir le III siècle.
Hécatée qui écrit vers 300 (les dates allant de 315 à 301) … est conforme avec ce portrait, en gestation, de la nation judéenne centrée sur Jérusalem … dirigée par des prêtres qui en plus d’être agents de culte sont aussi juges et de gardiens des lois/coutumes nationales.
Hécatée souligne bien que c’est les Egyptiens qui en se détournant de leurs rites religieux … sont punis par leurs dieux et deviennent malades … de plus pour Hécatée les gens expulsés sont des «
étrangers » et non des «
Egyptiens lépreux » (thèmes des récits ultérieurs) … ttfois en Diodore (1,28,1-4) qui est aussi attribué à Hécatée il est fait mention de l’origine Egyptienne des juifs (et des Colques) en tant que «
colons égyptiens » … donc entre les deux mention d’Hécatée chez Diodore que c’est-il passé ???
Dans le premier Hécatée, tout comme Hérodote avant lui, se réfère au discours traditionnel Egyptien … comme quoi la « colonisation » égyptienne s’est faite aux quatre coins du monde … donnant ainsi une origine égyptienne à la civilisation humaine … ttfois Hécatée donne aussi sa propre version notamment concernant l’origine des Juifs … c’est cette raison qui lui fait modifier le récit Egyptien en (40,3) sur les juifs il fait, ici, échos aux idées juives … Hécatée se veut ainsi « critique » des discours égyptiens.
Selon la Bible, les Juifs étaient bel et bien des étrangers en Égypte … si donc Hécatée eut connaissance du récit biblique … il se peut qu’il ait réalisé qu’il existait des convergences entre ce récit et sa version « grécocentrée » de l’histoire.
Il resterait à analyser l’accusation d’Hécatée sur les Juifs … comme quoi (Moïse) introduisit une sorte de mode de vie misanthrope (
apanthrôpos) et inhospitalier (
misoxenos) … c’est une autre question … que l’on pourrait rapprocher aux Spartes (voir Contre Apion II.258-261) mais qui est tt à fait conforme aux lois sur les étrangers que l’on trouve en Esdras-Néhémie voire aussi en Dt (7,1-6).
Mais sous la plume d’Hécatée n’est-ce pas, ici, un reproche fait aux Juifs, qui après avoir servis dans les armées d’Alexandre et Ptolémée … au point de les assimiler non plus comme des Egyptiens mais comme des Hellènes … sont restés fidèle à leur Loi ils s’excluaient par conséquent de la vie sociale/politique de la polis … leur Loi leur servant en qcq sorte de rempart envers les «
goyim » … ils se comportaient, pour Hécatée, en quelque sorte comme des misanthropes «
qui se détournent du genre humain ».
C’est donc bien parce qu’ils avaient souffert en Egypte … dans le pays ou ils étaient étrangers … que les juifs sous Moïse, d’après Hécatée, décidèrent de se tenir à l’écart des autres peuples … nous ne serions être plus proche des récits Bibliques.
D) Ce qui fait la différence, notoire, entre Hécatée et Exode (au point de dire qu’il n’est pas au courant de ce dernier récit) … c’est d’une part, mais c’est secondaire, l’absence d’un séjour dans le désert … mais surtout que Moïse serait le fondateur de Jérusalem notamment … il n’attribue rien à David et autres mais tout à Moïse ???
C’est, encore une fois, que sa source juive principale est bien Esdras-Néhémie ou l’on trouve le même vocabulaire … «
le scribe versé dans la Loi de Moïse » (Es 7,6) … l’homme à qui le roi de Perse demande de «
monter à Jérusalem, en Yehud et d’y bâtir le Temple » (1,3).
La tradition qui identifie Esdras à Moïse est ici en marche … c’est ce qui deviendra le mythe fondateur chez les Juifs.
Dans Esdras-Néhémie l’expression : «
les habitants de Yehùd et de Jérusalem » revient comme un refrain … de plus, dans ces mm livres, le rôle de David dans l'histoire d'Israël se trouve minimisé sinon estompé … on ironise mm sur la royauté : «
Il y a un roi de Juda ! » (Ne 6,6) … tel un faux bruit que ses ennemis accusent Néhémie d'avoir fait courir pour asseoir son autorité.
De plus, tt relation ou mention de la reconstruction du temple de Jérusalem semble impliquer que celui-ci, relevé des ruines, est le premier (Es 6,15-18) … aucune allusion n'est faite à un édifice antérieur … si l'on fait référence à Salomon, c'est d'une façon critique (Ne 13,26).
L’œuvre d'Esdras/Néhémie est donc présentée comme une fondation pure et simple, sur la terre déserte ou ravagée de Yehùd que les Judéens revenus de l'Exil sont censés avoir trouvée … selon Hécatée, la population que Moise aurait menée jusqu'en Iouda trouva elle-mm un désert, où ensuite elle prospéra etc etc ...
«
Les ressemblances entre les livres d'Esdras et de Néhémie et notre fragment (d'Hécatée sur les Juifs) ne se limitent pas à un seul motif, mais s'étendent plutôt à tout un éventail de sujets [...]. Le fait que les livres d'Esdras et de Néhémie contiennent diverses sources ou couches de matériaux, écrits probablement au cours du V et au début du IV, et que notre fragment fut composé à la fin du IV, renforce l'idée d'un Vorlage [modèle commun un proto Esdras-Néhémie en qcq sorte]. » (D. Mendels)
E) Pour résumé Hécatée/Manéthon … d’un coté comme de l’autre … le peuple juif naît d’un groupe d’indésirable banni d’Egypte … on l’expulse vers une région de Palestine dont Jérusalem est le centre … Moïse est à la fois son chez politique et son législateur … c’est l’essentiel des traditions qui forment le schéma du récit de l’Exode.
Sans nous étendre plus en avant … la question est de savoir s’il existe un fait historique antique relatant des faits plus/moins analogues … qui auraient pu servir de trame « historique ».
Nous avons pour cela celui d’Ahmosis … qui justement poursuivit les Hyksos «
jusqu'à leur citadelle » de Canaan (Sharuhen/Charouhen) prés de Gaza … dont nous avons des traces dans ce récit
autobiographiqueTous les éléments sont là … sauf qu’à la place de «
Jérusalem » nous avons en réalité «
Sharouhen/Charouhen » … est-ce que ce récit a « inspiré » les uns et les autres en mélangeant Hyksôs avec hébreux et en changeant de lieu de destination ??? chacun Egyptiens/Juifs la « transformant » selon son bon vouloir ???
F) Sans revenir sur Hécatée et Manéthon … au IV siècle, au moins, l'existence et le premier rayonnement international d'un peuple de Ioudaioi «
Juifs » (là le qualificatif juif est bien approprié) sont bien attestés.
Il semble indéniable qu’Hérodote en (Hist. 2,104) les désignent en tant que «
Phéniciens de Palestine » au sujet de la circoncision … Cléarque de Soles, dans une fiction, fait dialoguer son maître avec «
un juif de la Coélé-Syrie (la vallée du Jourdain) » gagné à la culture grecque … et il note ceci : «
Les Juifs descendent des philosophes de l'Inde. Les philosophes s'appellent, dit-on, Calaniens dans l'Inde, et Juifs [Ioudaioi] en Syrie. Ils tirent ce nom du pays qu'ils habitent, la Judée [Ioudaia] ».
Mégasthène vers (312-281), décrit les juifs d'une manière pratiquement identique … «
Toutes les opinions exprimées par les anciens au sujet de la nature se retrouvent chez les philosophes étrangers à la Grèce, les unes chez les Brahmanes de l'Inde, les autres en Syrie chez ceux qu'on appelle Juifs [Ioudaioi] ».
Même Tacite beaucoup plus tard sera influencé par des auteurs étrangers … complètement ignorant du peuple juif et de son histoire ou ennemi de son culte.
Cordialement, Epsilon