Revenons au fond, les neuro-paléontologues mesurent les volumes internes et explorent les répartitions de ces volumes, ainsi que les traces laissées sur les faces internes par les structures des cranes. Ils notent les évolutions et essayent d'en tirer des conclusions. Mais, eux-mêmes relativisent leur travail en parlant des cranes découverts en Géorgie, à Dmanissi. Plusieurs cranes venant d'humains primitifs, et avec une telle variabilité que si on ne les avaient pas trouvés dans le même lieu on les aurait classés dans des groupes différents. Il faut tenir compte des variabilités individuelles. Ainsi, à Dmanissi, 2 des crânes ont plus de 730 cm3. Ce sont pourtant le crâne d'une femme (réputée avoir une capacité cérébrale plus faible) et d'un adolescent, donc dont le crâne n'avait peut-être pas sa taille adulte. Les 3 autres crânes ont un volume de 540 à 680 cm3. En pourcentage, cela fait déjà une assez grande différence . Voici ce qu'en dit Wikipedia :
Citer :
Le volume endocrânien des cinq fossiles trouvés à Dmanissi varie de 546 à 730 cm3, ce qui correspond plus ou moins à la variabilité trouvée chez Homo habilis (de 550 à 700 cm3 environ).
Citer :
Pour l'équipe de chercheurs de 2013, l'échantillon de Dmanissi fournit une preuve directe de la grande variabilité morphologique existant à l'intérieur des premières populations d’Homo, aussi bien qu'entre elles. De la comparaison des crânes de Dmanissi et des fossiles de la même période découverts en Afrique et en Asie, ils tirent la conclusion que plusieurs appellations taxonomiques existantes au sein du genre Homo seraient à regrouper.
En fait, on classe les populations anciennes en fonction de la taille du volume endocrânien. On part plus ou moins du principe que plus celui-ci est grand, plus les capacités intellectuelles sont développées ... Mais, cela est à relativiser. Pour démontrer cela, on va faire un bond dans le temps,
Homo georgicus, c'était il y a 1,7 millions d'années, allons à -176 500 BP (environ), dans
la Grotte de Bruniquel.Il y a un documentaire qui passe sur Arte au sujet de cette grotte est qui est disponible sur le site d'Arte :
Néandertal : le mystère de la grotte de Bruniquel. Je vous conseille d'y consacrer les 55 minutes nécessaires à le visionner.

On y apprend quelque chose d'assez important. Avant la découverte de cette grotte, pas mal de monde pensait que Sapiens avait amené une révolution en ce qui concerne la pensée conceptuelle et symbolique humaine. Il y avait quelques indices qui mettaient en cause depuis quelques temps cette Révolution artistique paléolithique. Déjà, on avait fait des découvertes en Afrique qui mettaient l'apparition de certains traits vers -200 000 / -150 000 BP. Et on découvre cette grotte, et on la date ... Bref, les humains vivants il y a environ 170 000 ans, que ce soit en Afrique ou en Europe, et sûrement en Asie étaient capables de réaliser des choses qu'on n'imaginait pas réalisable avant - 50 000 BP. Coté artefacts retrouvés, il n'y a pas de rupture technologique à cette période. Or, l'un des postulat de base était que les ruptures dans l'évolution des capacités intellectuelles devaient entraîner des ruptures technologiques et culturelles. Si on maintient ce postulat, il faudrait en déduire que les d'humains de périodes encore plus primitives avaient aussi ces capacités.
Comme nous l'avons déjà évoqué dans diverses interventions, il y a des chercheurs qui pensent que certaines évolution ont eu besoin d'une maturation intellectuelle. D'autres se basent sur un autre constat et qui vient un peu contredire :
Atlante a écrit :
J'ai bien peur d'avoir une réponse, Skippy, tout au moins pour les humains : l'humain est naturellement flemmard et opportuniste. Il évolue sous la pression des éléments, pas quand tout va bien autour de lui. Des humains ont vécu isolés sur leurs îles, à l'écart du reste du monde pendant des millénaires, sans changer de mode de vie depuis l'arrivée de leurs ancêtres sur lesdites îles. Pourquoi ? Parce qu'il n'y avait aucune pression pour les contraindre à changer de mode de vie. Quand tu as l'eau, la nourriture en quantité suffisante à proximité et un climat clément en permanence, pourquoi te casser la tête à développer des techniques plus élaborées pour produire plus (tout au moins en l'absence de monnaie ou de système de valeurs financières) ?
En fait, la plupart des espèces animales sont très conservatrices. Quand elles sont adaptées à un environnement, elles se contentent d'exploiter celui-ci sans forcément chercher à explorer d'autres niches écologiques ou d'autres environnement. C'est un constat qu'ont fait de nombreux écologues. Il y a parfois quelques individus marginaux qui sortent un peu des règles de base de leurs groupes, mais il y a une très forte mortalité chez ces marginaux... Sauf quand les conditions évoluent, et ce sont ces marginaux qui représentent parfois la chance du groupe à survivre. Si on suit ces chercheurs, les humains, durant de très longues périodes, ont simplement reproduit à l'identique le mode de vie de leurs ancêtres, sans trop chercher à le modifier. Mais, donc, en n'exploitant pas l'intégralité de leurs capacités : ils n'en avaient pas besoin. Ce serait la nécessité qui les auraient faits évoluer. Mais, Bruniquel remet aussi un peu en cause ce postulat en montrant que l'on n'a pas pris en compte la richesse de la vie symbolique de nos lointains ancêtres...
Il y a une 3ème possibilité : pour réaliser des évolutions, il faut avoir le temps et les capacités de les inventer. Cela suppose d'avoir du temps libre, mais aussi d'avoir une certaine masse critique d'humains en interaction pour idéaliser ce nouveau mode de vie et le mettre en application. Pour les néandertaliens, il faut se rappeler que la variabilité génétique des fossiles retrouvés montre que la population totale, à certaines périodes ne dépassait pas les 7000 individus. 7000 individus répartis sur une domaine géographique qui s'étendait à la péninsule ibérique, la frange méditerranéenne de la France, l'Italie et la péninsule des Balkans. Bref, il n'y avait peut-être pas assez d'individus pour réussir des sauts technologiques.